2.2.2. Effets de fréquence sur l’amorçage de répétition : données expérimentales

Une des recherches la plus communément citée à ce sujet est celle de Scarborough, Cortese, et Scarborough (1977). L’idée des auteurs était que la répétition d’un stimulus verbal affecte l’étape de recherche en mémoire lexicale. Selon la logique de Sternberg (1969), si tel est le cas, une variable affectant la recherche lexicale  (e.g., la fréquence) doit interagir avec la variable répétition. Ainsi, les auteurs postulent que si la fréquence et la répétition affectent une étape de traitement commune, elles devraient produire des effets interactifs. Les auteurs avaient donc explicitement pour objectif d’explorer les effets de fréquence sur l’amorçage de répétition. Ils ont conduit leurs expériences à travers des épreuves de décision lexicale et de dénomination. Ils utilisaient des mots dont la fréquence était comprise entre 1 et 660 occurrences par million (d’après la base de données de Kucera & Francis, 1967). Dans les expériences  de décision lexicale  (Expériences 1 et 2), les auteurs présentaient une liste d’items constituée de mots et de pseudomots et demandaient aux sujets de décider le plus rapidement possible si chaque item présenté était un mot de la langue ou pas. Certains étaient présentés deux fois dans la liste. Ainsi, un effet d’amorçage de répétition était obtenu si une réduction du temps de réponse à la seconde présentation était observée par rapport au temps mis pour répondre à la première apparition du mot. Le nombre d’items intervenant entre deux répétitions pouvait être de 0 (répétition immédiate), 1, 3, 7, 15 et 31 items. Etant donné que chaque item était visible pendant 1 seconde, il est possible d’évaluer approximativement les délais (SOA) entre deux répétitions du même mot : 1 s (lorsque l’amorce et la cible étaient consécutifs dans la liste), 2 s, 4 s, 8 s, 16 s et 32 s. Scarborough, Cortese et Scarborough (1977) ont mis en évidence un effet de répétition significatif  et qui persistait sur un délai relativement long. Les résultats de l’Expérience 2 ont mis en évidence l’effet de fréquence “classique” selon lequel les mots fréquents sont plus rapidement identifiés que les mots rares. De plus, les analyses des données obtenues sur les mots ont confirmé les analyses réalisées a posteriori dans l’Expérience 1 : l’interaction entre les facteurs Fréquence et Répétition était significative. Comme dans la première expérience, les effets d’amorçage obtenus sur les mots rares étaient plus importants que ceux obtenus sur les mots fréquents. Ainsi, Scarborough, Cortese et Scarborough montrent que les mots rares bénéficient davantage de la répétition que les mots fréquents. Cet effet de fréquence sur l’amorçage  est connu sous le nom d’atténuation de l’effet de fréquence (frequency attenuation effect). L’Expérience 3 utilisait la même procédure que les Expériences 1 et 2, mais proposait aux sujets une tâche de dénomination : les sujets devaient prononcer chacun des items présentés. Les résultats ont montré des effets d’amorçage de répétition significatifs pour les mots et les pseudomots. Les auteurs ont cependant souligné que l’ampleur de l’effet d’amorçage  obtenu sur les mots était plus faible dans une tâche de dénomination que dans une tâche de décision lexicale. Leur expérience n’a pas montré d’effet de fréquence sur les latences de prononciation, ce qui explique sans doute qu’elle n’interagissait pas non plus avec la répétition. Globalement, cette étude a donc révélé des effets d’amorçage à long terme et une atténuation de l’effet de fréquence en décision lexicale. Elle montre aussi que la tâche de dénomination ne semble pas adéquate pour engendrer des effets de fréquence et moins encore, une atténuation de l’effet de fréquence, c’est-à-dire des effets d’amorçage  plus importants pour les mots rares que fréquents.

Les recherches de Jacoby (1983), ainsi que celles de Jacoby et Dallas (1981), présentées au paragraphe 2.1.3.2 et utilisant une procédure et une tâche différente de celles de Scarborough et al. (1977) (i.e., procédure d’amorçage par phases, tâche d’identification perceptive) ont également mis en évidence une atténuation de l’effet de fréquence en phase test.

Ce patron de résultat a été observé dans de multiples tâches : en décision lexicale (McKone, 1995 ; Kinoshita, 1989 ; 1995 ; Scarborough et al., 1977), en identification perceptive (Jacoby, 1983 ; Jacoby et al., 1981 ; Salasoo et al., 1985), en complétion de trigrammes et de fragments (McLeod, 1989 ; Roediger, Weldon, Stadler, & Riegler, 1992). Il semble donc que la fréquence d’un mot module l’ampleur des effets d’amorçage de répétition : dans des épreuves indirectes de mémoire, bien que les mots fréquents engendrent généralement  de meilleures performances que les mots rares (il s’agit ici de la fréquence lexicale des informations, c’est-à-dire du nombre moyen d’occurrences d’un mot dans la langue), les mots rares bénéficient bien plus de la répétition que ne le font les mots fréquents. Autrement dit, la facilitation engendrée par une exposition préalable du stimulus est plus importante pour un stimulus rare que pour un stimulus fréquent, ceci lorsqu’aucune référence à la première exposition n’est faite.

Toutefois, d’autres travaux utilisant le même type de tâches, montrent des effets d’amorçage de répétition équivalents quelle que soit la fréquence des mots. Ces recherches n’avaient pas pour objectif d’étudier les effets de fréquence sur l’amorçage. La plupart manipulaient pourtant la fréquence des stimuli avec un paradigme d’amorçage de répétition, ce qui nous a permis d’extraire des données présentées dans ces études, celles qui nous intéressaient à propos des effets de fréquence sur l’amorçage.  Par exemple, Sereno (1991, Expérience 1) avait essentiellement pour objectif de tester si les informations graphémiques des stimuli interviennent tôt dans les processus de traitement d’un mot et aident l’accès au lexique. Pour cela, il utilisait un paradigme d’amorçage en ligne et présentait un mot masque pendant 500 ms, le mot amorce pendant 60 ms et la cible (un mot ou un pseudomot) suivait immédiatement l’amorce. Sereno manipulait plusieurs conditions d’amorçage : une condition contrôle dans laquelle l’amorce consistait en une suite d’astérisques, deux conditions dans lesquelles les amorces étaient graphémiquement dissimilaires à la cible (dans l’une d’entre-elles, l’amorce était un pseudomot ; dans l’autre, il s’agissait d’un mot composé de lettres différentes de celles de la cible) et deux conditions dans lesquelles les amorces étaient graphémiquement similaires à la cible (dans l’une d’entre-elles, l’amorce était un pseudomot qui ne différait du mot cible que par la voyelle médiane ; dans l’autre, l’amorce et la cible étaient identiques). Les sujets devaient réaliser une décision lexicale  sur la cible. Dans cette expérience, Sereno (1991) manipulait aussi la fréquence lexicale des mots et a retrouvé le résultat classique de l’effet de fréquence sur les temps de réponse (les mots fréquents étaient identifiés plus rapidement que les mots rares). De plus, à partir de ces données, nous avons comparé les temps de réponse obtenus dans la condition contrôle et ceux obtenus dans la condition où l’amorce et la cible étaient identiques, ceci pour les mots rares d’une part et pour les mots fréquents d’autre part. Ainsi, l’effet d’amorçage  de répétition était de 45 ms pour les mots rares et de 36 ms pour les mots fréquents. La différence (9 ms) n’est certainement pas assez importante pour être statistiquement significative, aussi  il est possible de conclure que l’auteur n’a pas obtenu d’atténuation de l’effet de fréquence.

Ferrand (1996), quant à lui, étudiait l’évolution des effets d’amorçage de répétition à travers différentes valeurs de ISI (variant de 0 à 1000 ms), avec un paradigme d’amorçage de répétition masqué et une tâche de dénomination (voir paragraphe 2.1.3.1). Les données de la recherche de Ferrand (1996) ont mis en évidence des effets d’amorçage de répétition masqués équivalents pour les mots fréquents et rares, quel que soit le ISI.

Ainsi, il semble que l’atténuation de l’effet de fréquence observée dans le cadre de tests indirects de mémoire puisse être obtenue quelle que soit la tâche utilisée (sauf peut être, dans une épreuve de dénomination ; voir Scarbourough et al. 1977, mais aussi Skinner & Grant, 1992 pour un résultat contradictoire). Ce n’est apparemment pas le type de tâche qui détermine l’absence ou la présence de l’atténuation de l’effet de fréquence, mais plutôt les conditions dans lesquelles les informations apparaissent. En effet, avec des amorces non masquées, les effets de répétition sont plus importants avec des mots rares que fréquents tandis qu’avec des amorces masquées, cette atténuation de l’effet de fréquence disparaît. Les deux recherches que nous présentons pour clore cette revue de littérature ont pour avantage de comparer, dans le cadre d’une même recherche, avec le même matériel, les effets de fréquence dans différentes conditions expérimentales (amorces masquées/non masquées).

La recherche de Humphreys, Besner, et Quinlan (1988) utilisait des épreuves d’identification perceptive. Outre le fait qu’ils examinaient les effets d’amorçage de répétition avec des amorces masquées et non masquées (voir paragraphe 2.1.3.1), l’intérêt de cette étude est que les auteurs manipulaient aussi la fréquence des mots. Contrairement à d’autres auteurs pour lesquels les effets de fréquence et de répétition interagissent lorsque les amorces ne sont pas masquées (e.g., Jacoby, 1983 ; Jacoby et al., 1981 ; McKone, 1995 ; Scarborough et al., 1977), les auteurs ont montré que l’effet de répétition était équivalent quelle que soit la fréquence des mots et quelles que soient les conditions de présentation des amorces. La relation entre les effets d’amorçage de répétition et de fréquence a été plus particulièrement étudiée dans les Expériences 2a et 2b. Les résultats ont conforté les effets additifs de la fréquence et de la répétition pour des amorces masquées (Expérience 2a) et non masquées (Expérience 2b). A noter que dans l’Expérience 2b, les essais se déroulaient selon la procédure de l’Expérience 1 (session d’amorçage  non masqué) décrite au paragraphe 2.1.3.1. Or, nous avons précisément émis quelques doutes à propos de leur procédure d’amorçage “non masqué”. Si comme nous le pensons, leur condition d’amorçage “non masqué” agit comme une condition d’amorçage masqué, il est logique (étant données les expériences réalisées avec un paradigme d’amorçage  non masqué présentées auparavant) qu’ils n’obtiennent pas d’effet de fréquence sur l’amorçage,  ni dans l’Expérience 2a, ni dans l’Expérience 2b.

Forster et Davis (1984) cherchaient explicitement à déterminer si les effets d’amorçage étaient dus à des changements au niveau lexical  (changement d’état des entrées lexicales) ou à la formation de traces épisodiques de l’amorce et s’intéressaient principalement à l’atténuation de l’effet de fréquence. La fréquence des mots fréquents était comprise entre 40 et 60 occurrences par million et celle des mots rares, entre 1 et 2 occurrences par million, d’après la base de données de Kucera et Francis (1967). Les résultats de l’Expérience 1 (paradigme d’amorçage de répétition en ligne, amorces masquées, tâche de décision lexicale, voir p. 73) ont clairement montré que les mots fréquents étaient plus rapidement identifiés que les mots rares. Mais cet effet de fréquence n’interagissait pas avec la répétition : l’effet d’amorçage de répétition masqué observé pour les mots fréquents était équivalent à celui des mots rares. Pour vérifier que l’absence d’atténuation de fréquence est bien due à la procédure de masquage (et non pas au matériel expérimental ou à un manque de puissance de l’expérience), l’Expérience 3 a été réalisée avec les mêmes items que ceux de la première expérience et avait pour objectif de répliquer l’atténuation de l’effet de fréquence avec une procédure d’amorçage non masqué. Cette expérience utilisait un paradigme d’amorçage par phases. Au cours de la phase d’amorçage, les mêmes stimuli que ceux de la première expérience étaient présentés et les sujets devaient réaliser une décision lexicale sur chaque item. Les sujets traitaient donc toutes les amorces de façon consciente puisqu’ils devaient fournir une réponse pour chacune d’entre-elles. Dans la phase test, les mêmes items étaient à nouveau présentés, avec autant d’autres stimuli nouveaux. Dans ce cas, l’effet d’amorçage de répétition était significativement plus important pour les mots rares que pour les mots fréquents. Il semble donc que cet effet, pour apparaître, nécessite que les amorces soient traitées consciemment. Les auteurs ont tout d’abord supposé que l’absence d’atténuation de l’effet de fréquence dans l’Expérience 1 était attribuable à la procédure de masquage. Toutefois, les différences de procédures entre les Expériences 1 et 3 (L’Expérience 3 demandait de fournir une réponse aux amorces alors que l’Expérience 1 n’avait pas cette exigence)  pouvaient aussi expliquer l’apparition de l’effet de fréquence sur l’amorçage. Leur Expérience 4 tentait de répondre à cette alternative. Cette expérience avait donc pour objectif de répliquer les résultats obtenus dans l’Expérience 3 en utilisant le même paradigme d’amorçage par phases, mais sans demander aux sujets de répondre aux amorces. Celles-ci étaient présentées au cours d’une phase d’amorçage de façon à ce que les sujets n’aient pas à la traiter explicitement et les effets de ces amorces étaient évalués dans la phase test (tâche de décision lexicale). Les effets d’amorçage de répétition n’étaient pas significatifs, ni l’interaction entre les facteurs Fréquence et Répétition : ces résultats suggèrent que l’importance des effets de répétition est influencée par la réponse exigée sur l’amorce. Pourtant, Humphreys et al. (1988, Expérience 3) n’ont pas répliqué ce résultat, puisqu’ils ont observé que l’effet de répétition obtenu avec des amorces non masquées n’était pas dû au fait de donner une réponse aux amorces. Nous pensons effectivement que rien ne prouve, dans l’Expérience 4 de Forster et Davis (1984), que les sujets n’aient pas traité les amorces : avec une procédure d’amorçage non masqué, il semble difficile de faire autrement.

Pour résumer, Forster et Davis (1984), dans une tâche de décision lexicale, ont observé cette atténuation de l’effet de fréquence avec des amorces non masquées, et ont constaté que cet effet n’apparaissait pas avec des amorces masquées. D’autres études ont effectivement mis en évidence une atténuation de l’effet de fréquence lorsque les informations traitées sont parfaitement perçues et identifiées (voir aussi, Jacoby, 1983, Jacoby et al., 1981 ; Nevers & Versace, 1998b ; 1999a ; Norris, 1984 ; Scarborough et al., 1977 ; Versace, 1998 ; Versace & Nevers, en révision). A l’opposé, les expériences réalisées sous des conditions d’amorçage masqué n’ont pas révélé d’effet de fréquence sur l’amorçage de répétition (voir aussi, Ferrand, 1996 ; Ferrand, Grainger, & Segui, 1994 ; Forster, Davis, Schoknecht, & Carter, 1987 ; Humphreys et al., 1988 ; Humphreys, Evett, & Quinlan, 1990 ; Nevers & Versace, 1998a ; Rajaram & Neely, 1992 ; Segui & Grainger, 1990a, 1990b ; Sereno, 1991 ; Versace, 1998). Autrement dit, dans des conditions où l’amorce n’est pas perçue consciemment, l’ampleur des effets d’amorçage semble être équivalente quelle que soit la fréquence des informations.

Pour expliquer l’ensemble de ces données, Forster et Davis (1984) ont proposé que l’amorçage était constitué de deux composantes : une composante épisodique sensible à la fréquence de l’information traitée, persisterait à long terme et nécessiterait un traitement conscient de l’amorce, et une composante lexicale, non sensible (paradoxalement) à la variable “fréquence des informations”, de durée plus brève et intervenant même lorsque l’information n’est pas traitée consciemment. Ainsi, Forster et Davis (1984) soutiennent l’idée selon laquelle l’atténuation de l’effet de fréquence observée avec des amorces non masquées résulte de la composante épisodique et les effets d’amorçage observés avec des amorces masquées, d’une activation de traces préexistantes en mémoire, traces de nature lexicale. Cette idée nous semble plausible. Ce qui l’est moins, à nos yeux, c’est qu’ils aient conclu à une intervention de la composante lexicale des effets d’amorçage malgré le fait qu’ils n’aient pas obtenu d’effet d’amorçage de répétition masqué dépendant de la fréquence   lexicale.

En fait, leur explication lexicale des effets d’amorçage de répétition masqués repose principalement sur l’hypothèse selon laquelle la formation d’une trace épisodique de l’événement amorce est empêchée par la procédure de masquage. Selon la logique de Forster et Davis (1984), si l’influence du facteur épisodique est minimisée, alors l’absence d’atténuation de l’effet de fréquence (reflétant l’intervention de cette composante épisodique) ne peut s’expliquer que par l’autre facteur, en l’occurrence le facteur lexical.

Pourtant, si comme le supposent ces auteurs, les effets d’amorçage  de répétition masqués s’expliquent par une composante lexicale, cela signifie qu’une amorce masquée doit être capable d’induire une activation à un niveau lexical. Dans ce cas, de même que les effets d’amorçage non masqués, les effets d’amorçage de répétition masqués, devraient dépendre de la fréquence lexicale du stimulus. Les Expériences 1, 2 et 3 du chapitre suivant ont été réalisées pour tester cette hypothèse. Si cette hypothèse se vérifie, alors il sera réellement possible de conclure que la trace du mot (fréquent ou rare) ayant engendré ces effets d’amorçage est de nature lexicale.

D’autre part, dans la plupart des recherches sur les effets de fréquence et d’amorçage, les auteurs ont d’abord testé les effets de fréquence sous des conditions d’amorçage  masqué, puis ont utilisé le même matériel pour observer ces effets sous des conditions d’amorçage  non masqué. La comparaison est toutefois problématique puisque des paradigmes très différents ont été utilisés d’une expérience à l’autre. Contrairement aux études sur les effets d’amorçage  de répétition avec des amorces masquées, la majorité de celles qui étudiaient les effets d’amorçage avec des amorces non masquées utilisaient un paradigme dans lequel les sujets étaient successivement soumis à une phase d’étude puis à une phase test. C’est notamment le cas dans la recherche de Forster et Davis (1984) : l’Expérience 1 utilisait un paradigme d’amorçage  à court terme avec des amorces masquées et l’Expérience 3, un paradigme d’amorçage à long terme (i. e., par phases) avec des amorces non masquées. Nos expériences ont été réalisées pour remédier à ce problème méthodologique : nous avons manipulé le même matériel d’une expérience à l’autre et conservé le même paradigme expérimental, que les amorces soient masquées ou non.

Une autre difficulté méthodologique à laquelle nous avons tenté de répondre est celle du choix des items dits “fréquents” et “rares”. Nous avons extrait notre matériel de la base de données Brulex (Content, Mousty, & Radeau, 1990), version informatisée du corpus Trésor de la langue française (1971). A la suite de notre revue de littérature, il est apparu que la plupart des auteurs, et parmi eux des auteurs français ayant utilisé la base de données susnommée, n’ont pas observé d’effet de fréquence sur l’amorçage de répétition masqué (e.g., Ferrand, 1996). En étudiant plus attentivement le matériel utilisé par cet auteur, nous nous sommes aperçus qu’il avait choisi comme mots rares, des mots d’une moyenne de 27 occurrences par million, c’est-à-dire des mots tels que grisou (21), luette (21), pagaie (21), brelan (25), binôme (29), gadoue (29)..., et comme mots fréquents, des mots d’une moyenne de 461 occurrences par million, c’est-à-dire des mots tels que par exemple, âpreté (442), liasse (455), nymphe (455), chenal (463), spasme (480), futaie (484) 7. Or, ces mots “fréquents” nous paraissent plutôt rares dans le langage courant. Le faible écart (subjectif) entre les gammes de fréquence des mots fréquents et rares utilisés dans la recherche de Ferrand (1996) explique peut-être que l’auteur n’ait pas observé d’atténuation de l’effet de fréquence. Par conséquent, dans nos expériences de décision lexicale, nous avons largement augmenté cet écart (voir Annexes 1 et 2).

Notes
7.

Les mots cités en tant qu’exemples ne sont peut-être pas ceux réellement utilisés dans la recherche de Ferrand (1996), celui-ci n’ayant pas fourni d’annexe de son matériel dans l’article en question. Les exemples proposés illustrent simplement le type de mots ayant ces fréquences lexicales moyennes.