4.2.3. Résultats et discussion

Des analyses de variance ont été réalisées sur les temps de réponse moyens mis pour identifier correctement les mots cibles. Celles effectuées avec les sujets (notées Fs) en tant que facteur aléatoire, incluaient les facteurs Relation amorce/cible (identiques, différentes), Fréquence des items (fréquents, rares) et Temps de présentation de l’amorce (50, 700 ms) en tant que facteurs intra-sujets. Celles réalisées avec les items (notées Fi) en tant que facteur aléatoire, incluaient les facteurs Relation amorce/cible (identiques, différentes) et Temps de présentation de l’amorce (50, 700 ms) en tant que facteurs intra-sujets, ainsi que le facteur Fréquence des items (fréquents, rares) en tant que facteur inter-sujets.

Le Tableau 9 montre les temps de réponses moyens obtenus dans la tâche de décision lexicale de cette expérience.

Tableau 9 - Temps de réponse moyens (en ms) obtenus en décision lexicale et effets d’amorçage correspondants calculés par sujet. Les erreurs standards sont indiquées entre parenthèses.
Conditions expérimentales Relation amorce/cible Amorçage de répétition
Temps d’exposition des amorces Fréquence des items Différentes Identiques
50 ms Fréquents 619 (14.4) 590 (20.1) 29
Rares 703 (14.4) 633 (24.8) 70
700 ms Fréquents 617 (16.8) 590 (18.6) 27
Rares 717 (17.0) 630 (27.2) 87

Les analyses ont révélé un ensemble de résultats très similaire à celui observé dans l’Expérience 4, avec un ISI de 3000 ms. Elles ont mis en évidence des effets principaux significatifs des facteurs Fréquence, Fs(1, 15) = 125.3, p < .0001 et Fi(1, 126) = 82.4, p < .0001 et Relation amorce/cible, Fs(1, 15) = 39.5, p < .0001 et Fi(1, 126) = 42.8, p < .0001, ainsi qu’une interaction de ces deux facteurs, Fs(1, 15) = 15.3, p < .005 et Fi(1, 126) = 4.8, p < .05. Les effets d’amorçage étaient significativement plus importants pour les mots rares que pour les mots fréquents, bien qu’ils étaient significatifs à la fois pour les mots rares, Fs(1, 15) = 73.8, p < .0001 et Fi(1, 63) = 30.9, p < .0001 et fréquents, Fs(1, 15) = 9.4, p < .01 et Fi(1, 63) = 12.4, p < .001. L’effet principal du facteur Temps de présentation n’était pas significatif et ce facteur n’interagissait avec aucun autre.

Ainsi, contrairement à nos attentes, nous avons obtenu un effet d’amorçage significatif  à 3000 ms, et une atténuation de l’effet de fréquence quel que soit le temps de présentation de l’amorce. Ce résultat est surprenant : en rendant la tâche interférente plus difficile, nous espérions réduire le degré d’attention allouée à l’amorce. Or, il semble que l’effet inverse se soit produit. Une explication possible serait que la tâche interférente, en exigeant davantage d’attention de la part des sujets, a globalement augmenté leurs capacités attentionnelles sur l’ensemble de la tâche proposée. Ainsi, pendant le laps de temps entre la présentation de la matrice et le signal visuel de réponse, les participants avaient la possibilité d’allouer ce niveau d’attention accru au traitement de l’amorce, d’autant plus dans les cas où il y avait peu de carrés à compter. En effet, le nombre de carrés rouges pouvait être détecté très rapidement dans les matrices n’en contenant que 3 ou 4. D’autre part, des recherches sur les effets de fréquence en reconnaissance (e.g., Maddox & Estes, 1997) expliquent les différences obtenues avec des items fréquents et rares en proposant que les stimuli rares sont davantage traités que les stimuli fréquents. De façon similaire, il semble que les stimuli nouveaux (i.e., non familiers) attirent davantage l’attention que les stimuli anciens ou familiers (Cowan, 1993 ; Gati & Ben-Shakhar, 1990 ; Johnston, Hawley, Plewe, Elliott, & DeWitt, 1990). Ainsi, dans notre expérience, les participants peuvent avoir alloué plus d’attention à l’amorce lorsqu’il s’agissait d’un mot rare (les mots fréquents pouvant être traités de façon plus automatique), ce qui pourrait expliquer, du moins partiellement, l’atténuation de l’effet de fréquence obtenue. L’Expérience 5b a été conduite pour tester cette hypothèse.