3.1 Le management des opérations de construction : les grandes ruptures historiques jusqu'au début du XXe siécle

Se nourrir, se protéger sont pour l'homme des fonctions vitales et essentielles. Depuis la nuit des temps l'homme à d'abord cherché des abris, puis rapidement à su en construire avec les matériaux disponibles autour de lui. Dès l'époque néolithique (6 000 à 2500 environ avant J-C.) il vivait en villages dont les cabanes étaient quasiment toutes identiques (Guilaine et al, 1986 355 ). Chaque homme ou presque, en dehors peut être des monuments funéraires, était capable de reprendre à son compte la totalité de l'acte de bâtir en étant tour à tour Maître d'ouvrage, maître d'œuvre à la fois concepteur et entrepreneur.

Rappelons ici que le maître d'ouvrage est le commanditaire d'un projet dont il a fixé la finalité, le maître d'œuvre apporte les compétences nécessaires à la conception et à la réalisation de l'œuvre, ainsi que les ressources disponibles spécifiques requises pour la concrétiser (matériaux, matériels, technologies,……). L'acte de bâtir dans ce contexte peut se définir comme la combinaison des trois fonctions essentielles de commanditaire, de concepteur et d'entrepreneur qui constituent le triptyque fondateur de l'acte de bâtir. Tant que ces trois fonctions ont été combinées par une personne ou d'un groupe réduit et structuré (la famille, la tribu…) les problèmes de management des opérations de construction de l'époque n'ont pas posé vraisemblablement de problèmes insurmontables de coordination, l'ajustement mutuel* au sens de H. Minsberg (1982 356 ) devait largement suffire. La figure suivante illustre de façon simplifiée l’acte de bâtir qui se résume là à un nombre très limité d’activités élémentaires compte tenu du nombre réduit d’acteurs (un par pôle) ayant à combiner des ressources et des compétences limitées aux fins d’exigences basiques (clos, couvert).

Figure 62 : Les trois pôles de l’acte de bâtir 
Figure 62 : Les trois pôles de l’acte de bâtir 

L'acte de bâtir réduit à sa plus simple expression théorique à savoir une finalité, une compétence, une ressource devient une activité élémentaire. Dès que l'homme à voulu faire des constructions un peu plus élaborées, ou que des révolutions techniques sont arrivées, ces trois fonctions ont commencé à se dissocier, les activités élémentaires à se multiplier et les acteurs les portant sont alors souvent rentrés en conflits. Si nous admettons que le management des projets de construction consiste arbitrer les tensions entre ces trois types d’acteurs, il devient intéressant de repérer dans le temps les inducteurs de tensions qui ont vraisemblablement été à l'origine de profonds changements dans la conduite des opérations de construction. Chaque acteur à pu être selon les époques inducteur de rupture. Toutefois les principales ruptures proviennent du degré de sophistication des intentions des maîtres d'ouvrages ou des ressources et technologies nouvelles disponibles, l'architecte stricto sensu ne faisant qu'harmoniser des antagonismes.

Nous distinguons deux grandes époques de l'antiquité au début du XXe siècle. La première époque (quatre périodes) jusqu'à la fin du XVIIe siècle consacre la mise en œuvre des principes de l'harmonie Vitruvienne (solidité, utilité, beauté), la deuxième époque (trois périodes) jusqu'au XXe siècle est marquée par l'émergence des technologies issues de la révolution industrielle.

Notes
355.

GUILAINE J. et DEMOULE J.-P. dir., "Le Néolithique de la France" , Picard, Paris, 1986, pp.. 121-145.

356.

Mintzberg H., "Structure et dynamique des organisations", les éditions de l'organisation, Paris, 1982.