5.1 La méthodologie de diagnostic

Notre méthodologie ci-après exposée se déroule en cinq étapes : les principes généraux, la méthodologies de recueil de l'information, le positionnement du chercheur, la méthodologie de dépouillement de l'information et la restitution des résultats.

5.1.1 Les principes généraux

Le dictionnaire 489 nous fournit la définition suivante du mot "diagnostic" : "Se dit des signes qui font connaître la nature des maladies - Identification d'une maladie d'après ses symptômes - Jugement porté sur une situation, sur un état, après en avoir dégagé les traits essentiels". Pour C. Marmuse (1996 490 ) la référence au diagnostic médical, si elle est souvent rencontrée dans la pratique ou dans la littérature, ne résout en rien la question du diagnostic d'entreprise. Pour l'auteur, le médecin effectue son diagnostic sur un être humain qui est une réalité "naturelle" dont il ne peut modifier les caractéristiques (les manipulations génétiques sont et resteront encore sans doute pour quelque temps encore du domaine des laboratoires).

Pour J. Lebraty et R. Teller (1994 491 ), les analogies avec les systèmes physiques et biologiques sont des assimilations pour le moins hasardeuses. Les auteurs donnent, à titre d'exemple, l'assimilation courante qui peut être faite entre le consultant et le médecin ou encore entre les maladies et les dysfonctionnements. Nous pourrions également préciser que si des analogies semblent exister, l'entreprise assimilée à l'être humain, organisme vivant, ne "vit" que rarement le dimanche par exemple. Nous poserons donc, à partir des remarques précédentes, que les analogies auxquelles nous venons de faire référence et celles que nous utiliserons visent seulement à mieux illustrer notre pensée, notamment au niveau des objectifs du diagnostic.

Concernant ces objectifs, et sans revenir sur ceux opératoires identifiés au chapitre 4, nous considérerons qu'ils répondent à notre volonté de préventeur institutionnel, ainsi qu'a celles des acteurs des opérations de construction impliqués dans notre recherche, d'identifier les caractéristiques référentes d'un système performant de management des processus de construction, ainsi que les dysfonctionnements récurrents et les suggestions venant respectivement réduire et potentiellement renforcer les performances de ce système.

Plus encore, et compte tenu de la consommation d'énergie et de coûts que représente la réalisation d'un diagnostic, nous poserons l'hypothèse selon laquelle le diagnostic s'inscrit inconsciemment ou consciemment dans une phase de transformation du système. Pour reprendre l'analogie utilisée par J-C. Sournia (1992 492 ), "le diagnostic joue pour un malade un rôle psychologique indispensable qui appartient déjà à la thérapeutique et pour lequel on ne peut s'empêcher de faire une transposition au domaine de l'entreprise". Le diagnostic, par sa "fonction occasionnelle" (Martinet A-C., 1988 493 ) de "labourage et d'oxygénation" des pratiques, nous semble pouvoir introduire une sensibilisation suffisante pour éveiller, créer ce que H. Lesca (1992 494 ) désigne comme un "déclic" permettant de transformer la vision que l'on a du système et, par voie de conséquence, amorcer sa transformation.

Cette fonction transformative du système par le diagnostic peut s'expliquer par une recherche intuitive et cognitive de positionnement des acteurs concernés sur l'objet considérés par eux comme stratégique dès lors que le modèle proposé semble cohérent. Le diagnostic est certes un outil de transformation, mais aussi le premier produit de cette transformation. Il est le point de départ perceptible de la première forme de l'apprentissage organisationnel qui se fait par "accumulation d'expériences" (Koenig G., 1994) 495 ) constitutives de la base nécessaire de la deuxième forme que constitue l'expérimentation et l'approche projet abordée plus loin. Trois types de questionnements apparaissent rapidement :

  • quel est mon positionnement par rapport au modèle proposé ?
  • quels dysfonctionnements réduirent l'efficacité de la régulation des activités élémentaires requises et attendues ?
  • quels propositions d'améliorations peuvent elles être faites ?

Le maître d'ouvrage par exemple qui nous intéresse en priorité va lui s'interroger sur l'ensemble du processus stratégique que nous rappelons ci-dessous, alors que les autres acteurs auront vraisemblablement des positionnements plus étroits et segmentés. De façon délibérée notre intention est de centrer notre diagnostic "sur ce qui ce fait", sur l'évaluation des liens entre déficits systémiques cindynogènes et régulation des activités élémentaires, au plans intra-processus et inter-processus comme l'indique la figure suivante.

Figure 89 : Processus stratégique et identification des systèmes de régulation
Figure 89 : Processus stratégique et identification des systèmes de régulation

Après avoir déterminé en première partie les éléments différenciés et interdépendants du système de régulation finalisée d'une opération de construction, puis présenté les principes généraux du diagnostic, nous préciserons lors des développements suivants les aspects méthodologiques et conceptuels mis en place pour identifier sur nos terrains, les pratiques de régulation.

Notes
489.

LAROUSSE, dictionnaire de la langue Française.

490.

Marmuse C. , "Politique générale: langages, intelligence, modèles et choix stratégiques", Economica, 2ieme édition, 1996, 646 p, p.282.

491.

LEBRATY J. et TELLER R., "Ingénierie du diagnostic global d'entreprise", Editions Liaisons, 1994, 165 p., p. 19.

492.

SOURNIA J.-C., "Logique et morale du diagnostic", Gallimard, 1962, p. 44.

493.

MARTINET A-C., "Diagnostic stratégique", Vuibert, 1988, 157 p.

494.

LESCA H., "FENNEC : Tableau de bord pour l'évaluation de la veille stratégique de l'entreprise", op. cit., 1992, pp. 209-216.

495.

Koenig G., "L'apprentissage organisationnel : repérage des lieux", Revue Française de Gestion, N° 99, 1994.