Partie 1 : Routes et itinéraires à la fin du moyen-âge

Le réseau routier vivarois médiéval n’avait, jusqu’à présent, jamais fait l’objet de travaux d’ensemble. L’histoire de la route vivaroise antérieurement au XVIIè siècle restait presque totalement à écrire ( 133 ). Si l’érudition s’est assez souvent penchée sur la question, le manque de rigueur caractérise, en ce domaine plus encore que dans bien d’autres, ces travaux. Le plus grand flou y règne et sous la plume des historiens régionaux, le moindre chemin local, pour peu qu’il soit pavé, devient très rapidement un axe majeur et forcément romain voire protohistorique ( 134 ).

Ce vide historiographique n’est toutefois pas une caractéristique strictement vivaroise et se constate malheureusement assez généralement en de nombreuses régions. Certes, la situation s’est nettement améliorée depuis les années 1970 alors qu’Alain Derville déplorait le manque d’attention des historiens pour qui « les chemins médiévaux font piètre figure entre la voie romaine, parée des prestiges que l’on sait, et la route royale de Trudaine, parée d’inconscients prestiges... » ( 135 ). Néanmoins, le tableau historiographique reste maigre, de nombreuses études s’attachant avant tout à un axe précis, particulièrement bien documenté, ou important ( 136 ).

Dans les lignes qui suivent, notre premier souci sera de cerner les forces et les faiblesses de la documentation en matière d’histoire routière, pour établir une méthode permettant d’identifier assurément les itinéraires de la fin du Moyen Age.

Ce n’est que dans un second temps, que nous pourrons identifier et décrire les principaux axes routiers régionaux. Nous ne livrerons toutefois dans les pages qui suivent qu’une présentation synthétique du tracé des itinéraires, les descriptions détaillées de chacun d’entre eux faisant l’objet du second volume de notre thèse. Par-delà l’établissement de cette carte, puisqu’un réseau n’est pas la simple juxtaposition d’éléments isolés mais bien leur parfaite articulation, seule cette dernière parvenant à former un tout cohérent, il sera indispensable de hiérarchiser les axes mis en évidence et d’en établir la chronologie.

Notes
133.

) Le réseau routier vivarois mis en place par l’administration royale aux XVIIè et XVIIIè siècles a fait l’objet d’une première approche assez détaillée, portant plus sur les aspects politiques, administratifs et financiers de la construction routière que sur la route elle-même, son tracé ou ses techniques. Cf. Bardoux (L.) : Les routes en Vivarais au XVIII è siècle, étude l’oeuvre routière des Etats particuliers du pays de Vivarais (1700-1789), op. cit.

134.

) L’ensemble de ces travaux que nous ne mentionnerons pas ici en détail mais sur lesquels nous reviendrons dans la suite de notre propos au sujet de tel ou tel itinéraire se trouve référencé et synthétisé dans l’ouvrage largement fantaisiste de Pierre-Albert Clément : Les chemins à travers les âges en Cévennes et Bas-Languedoc, op. cit. . L’auteur, passant allègrement de la protohistoire ancienne au cadastre napoléonien, tente de démontrer dans une vaste confusion chronologique que le réseau routier médiéval et post médiéval est largement héritier des drayes protohistoriques ou de prétendus axes préhistoriques. Ceci donne la teneur de la majeure partie de la production érudite en la matière !

135.

) Derville (A.) : « La première révolution des transports continentaux, (c.1000 - c. 1300.) », art. cité, p. 181.

136.

) Bautier (R.-H.) : « La route française et son évolution au cours du Moyen Age », art. cité, p. 71-72.