C- Les cartes routières anciennes

Qui parle de cartes anciennes évoque immédiatement la Table de Peutinger, du IIIè siècle, seul vestige de la cartographie antique à concerner nos régions ( 159 ). Toutefois, bien que plusieurs axes assurément antiques, comme la voie d’Antonin le Pieux, traversent le Vivarais, aucun n’y figure malheureusement, absence significative.

Il en est de même pour l’une des plus anciennes cartes routière de France, la carte de Melchior Tavernier de 1632 sur laquelle ne figure aucune route vivaroise ( 160 ). Seule la cité de Viviers y est représentée, à l’écart de tout axe routier, le plus proche étant celui de la rive gauche du Rhône. Il est vrai que cette carte représente les routes postales qui, pour l’essentiel, rayonnent autour de Paris ou de Lyon, mais ne traversent pas la France transversalement et donc ignorent les Cévennes et le Vivarais.

Il faut attendre les cartes dressées à la demande des Etats de Languedoc et des Etats particuliers de Vivarais, ou encore de l’Intendance de Languedoc au XVIIIè siècle, pour voir les axes régionaux pris en compte. Souvent imprécises, elles ne nous ont été que d’un secours limité, à l’exception la carte routière de la sénéchaussée de Beaucaire de Ducros et Berthaut, gravée sur les ordres des Etats de Languedoc en 1790 qui nous paraît être la plus complète ( 161 ).

La carte de Cassini est la plus détaillée de nos cartes anciennes. Elle nous renseigne avec une précision inégalée alors sur le tracé des itinéraires les plus importants du XVIIIè siècle et apporte nombre de toponymes liés à la route inconnus par ailleurs ( 162 ). Bien que tardive, elle est un utile complément pour l’étude de certains tracés sur lesquels des travaux sont intervenus entre la cartographie de Cassini et la rédaction du cadastre, essentiellement sur le territoire des communes où cette dernière a été la plus tardive. Aux cartes de Cassini, il faut adjoindre les assemblages qui en ont été extraits pour l’ensemble du Languedoc, chaque diocèse ayant fait l’objet d’un tirage spécifique ( 163 ). Souvent similaire en tous points à la carte de Cassini, il est néanmoins possible d’y découvrir quelques variantes routières intéressantes.

Pour finir, mentionnons la plus récente en date des cartes prérévolutionnaires, la plus méconnue aussi, dressée par les successeurs de Cassini à la tête de la carte de France après 1784. A une échelle plus large, puisqu’établie au 1/345600è environ alors que la première est au 1/86400è, elle est moins précise en matière de toponymie dans la mesure où elle livre moins de lieux-dits, mais les tracés routiers y sont plus nombreux que sur la carte de Cassini. Y figurent en effet de nombreux axes strictement régionaux qui ne semblaient pas présenter un intérêt assez grand aux yeux de Cassini mais qui pour un certain nombre sont les héritiers de chemins que nous avons identifiés comme médiévaux ( 164 ).

Ces cartes présentent l’avantage de la relative précision topographique, surtout celles de Cassini et de Capitaine, et permettent donc de situer exactement certains tracés que l’on aurait aujourd’hui des difficultés à localiser. Toutefois, il faut prendre garde au fait qu’elles sont pour l’essentiel postérieures aux grands travaux de viabilité entrepris à partir de la fin du XVIIè siècle, ou plus souvent du début du XVIIIè siècle, sur ordre des Intendants de Languedoc, à la requête des Etats de Languedoc ou des Etats particuliers de Vivarais.

Notes
159.

) La table de Peutinger est publiée en annexe de Desjardin (E.) : La géographie de la Gaule d’après la table de Peutinger, op. cit.

160.

) La carte de Tavernier est publiée en annexe de La guide des chemins de France de Charles Estienne, éditée par Jean Bonnerot, op. cit.

161.

) Sur les étapes de la cartographie languedocienne et les apports de chaque époque, on consultera avec profit : de Dainville (F.) : « Cartes anciennes du Languedoc (XVIè-XVIIIè siècle) », op. cit., et plus particulièrement les p. 185-191 sur les cartes routières et les p. 189-190 sur la carte de Ducros.

162.

) La région étudiée est partagée entre les cartes n°88, 89 et 90.

163.

) Nous avons pour notre part utilisé celles gravées par le sieur Aldring, publiées à Montpellier peu avant la Révolution, et conservées en plusieurs exemplaires dans tous les dépôts d’archives languedociens.

164.

) Le Vivarais est couvert par les cartes n°15 et 19, rééditées par l’I.G.N. en 1997.