Les routes issues de cette phase de travaux, généralement qualifiées de « routes des Intendants », ont fait l’objet de nombreuses tractations préalablement à leur construction ou à leur modification ( 165 ).
Tout d’abord, les Etats particuliers du Vivarais ou encore ceux du Languedoc manifestaient la volonté de voir modifier telle route ou encore l’Intendant, désireux d’améliorer telle ou telle relation, souhaitait engager des travaux. Cependant, très vite le problème du choix du tracé et des modifications à y apporter se posait et divisait les communautés d’habitants. Chacune d’elle voulait son « chemin neuf » tout en déniant à ses voisines le même droit. Dès lors, de nombreuses commissions ont été dépêchées sur les lieux pour multiplier les « visitations » dont les procès verbaux sont autant d’indications sur les situations qu’elles rencontrent et sur les chemins anciens devant être rectifiés. Plus encore que leurs rapports qui justifient d’adopter telle ou telle option pour les travaux, ce sont les plans que renferment ces dossiers qui nous sont les plus utiles. Ils présentent en effet généralement de façon conjointe le chemin ancien à modifier et le projet futur, le chemin ancien correspondant le plus souvent, comme nous avons pu le constater en de nombreux cas, à un état de la fin du Moyen Age au moins.
Ces visitations pouvaient intervenir à différentes échelles. Certaines portaient sur la totalité d’un axe routier, comme par exemple celle effectuée par Louis de Froidour, réformateur général des Eaux et Forêts en 1668 sur le chemin de Régordane entre Montpellier et Le Puy, mais aussi sur les chemins reliant le Bas-Vivarais au Velay ( 166 ). D’autres se limitaient à l’examen d’un tracé routier sur quelques centaines de mètres, comme par exemple au XVIIIè siècle au niveau du col de l’Arenier entre Privas et Mézilhac où il n’est question que de rallonger la route de 300 ou 400 mètres pour lui éviter une brusque pente ( 167 ).
Outre des précisions sur les routes, ces dossiers renferment de nombreuses indications sur les ponts. Lorsque l’un d’eux s’effondrait sous la poussée d’une crue ou simplement nécessitait des travaux d’entretien un peu importants, une vue en élévation des interventions à faire était dressée et superposée à un dessin de l’édifice ancien. Les différentes phases de travaux encore visibles sur certains ouvrages sont donc datables avec précision, ce qui permet d’isoler avec plus de certitude les éléments médiévaux subsistants.
L’ensemble de la documentation routière moderne constitue donc un passage obligé pour une étude précise des itinéraires médiévaux. Elle apporte en effet de riches compléments sur les tracés tels qu’ils sont au début du XVIIIè siècle, à l’issue de plusieurs siècles de portage, avant les grands changements introduits par l’avènement du roulage.
) Cf. Bordes (M.) : « Les routes des intendants », art. cité. et plus particulièrement les p. 159-164 sur les travaux touchant la viabilité de l’arrière pays languedocien.
) Cf. à son sujet la thèse qu’en a tirée Marcel Girault : Edition critique et commentée du Procès-Verbal de « La visitation du Chemin de Regordane », effectuée par Louis de Froidour en 1668, Ms 665 de la B.M. de Toulouse, op. cit..
) AD 07, C 773 bis.