b- La transhumance ecclésiastique

La majorité des établissements régionaux pratiquent la transhumance. S’il est impossible de chiffrer l’importance des troupeaux transhumants de chaque établissement, on peut toutefois esquisser un classement sommaire très impressionniste basé sur l’importance des actions engagées pour obtenir et conserver des pâturages d’estive ou d’hivernage et sur leur étendue. Les abbayes cisterciennes, Mazan et Aiguebelle avant tout, semblent dominer cette pratique, suivies de la commanderie de Jalès et de l’abbaye d’Aiguebelle qui elles aussi possèdent de vastes domaines pastoraux chèrement défendus. Les bénédictins de Saint-Chaffre, s’ils pratiquent bien la transhumance, se limitent probablement à un nombre de bêtes incomparablement moindre que les abbayes cisterciennes, ne possédant que peu de pâturages d’été et encore moins d’herbages d’hiver. Il en est sans doute de même pour l’hôtel-dieu du Puy. C’est probablement dans cette catégorie qu’il faut l’intégrer avec ses 1500 moutons environ, ce dernier ne semblant pas posséder plus d’herbages que l’abbaye de Saint-Chaffre. A une échelle encore moindre, il faut probablement placer le modeste prieuré de Saint-Sauveur-en-Rue, ou la commanderie de Devesset, dont les troupeaux sont tout à fait méconnus, de même que les herbages. Ceci, malgré une documentation relativement abondante, est le signe de leur importance toute relative. La chartreuse de Bonnefoy possède des troupeaux qu’elle fait probablement hiverner en Bas-Vivarais, mais jamais cette question n’apparaît dominante dans sa politique foncière, qui demeure avant tout préoccupée de renforcer son « désert ». Il est vrai que saint Bruno, s’il n’a pas interdit l’élevage, en a strictement lié le développement à celui du nombre de frères, lui même restreint ( 1262 ).

Quelques exceptions notables subsistent, comme l’abbaye bénédictine de Cruas, à laquelle il faut associer les moniales de Soyons, de Lavilledieu, de Mercoire et de Clavas, dont aucune ne fait transhumer ses troupeaux, bien que pratiquant l’élevage. A un moindre niveau, il faut aussi signaler que de simples prieurés, comme celui d’Asperjoc, pratiquent la transhumance, mais à une échelle beaucoup plus réduite, puisqu’en 1303 le prieur transige avec le seigneur de Raphaël pour faire estiver unam cabanam usque ad numerum ducentorum ovinum sur les terres de ce dernier ( 1263 ). La documentation manque souvent totalement pour connaître de telles pratiques à une échelle relativement réduite.

Notes
1262.

) Sur l’attitude des différentes règles face à la consommation de viande et à l’élevage, cf. Aubrun (M.) : « L’élevage pendant le haut Moyen Age, particulièrement dans les moyennes montagnes de la France centrale, d’après l’hagiographie et les statuts monastiques », art. cité, p. 220-221.

1263.

) AD 07, 1J 106.