Le remarquable essor du grenier de Pont-Saint-Esprit, qui surclasse tous les autres greniers Languedociens, est tout à fait compréhensible. Alors que ces derniers sont nombreux et se contrarient, assurant seulement leur domination sur des territoires réduits, celui de Pont-Saint-Esprit s’ouvre largement vers le nord et le nord-ouest. Ainsi, il est de fait en situation de monopole vers les montagnes du Massif Central, seul le Rouergue, le sud du Gévaudan, ou encore le diocèse de Saint-Flour trouvant meilleur compte à passer par des greniers plus méridionaux en empruntant la route de Lodève et du causse du Larzac par Millau, plus directe ( 1422 ). De même, alors que le Lyonnais, le Mâconnais et le Forez sont tenus de s’approvisionner en sel languedocien, le grenier de Pont-Saint-Esprit est le plus septentrional, donc a priori le plus commode pour ces régions. Dans les deux cas, le Vivarais se trouve dans une situation privilégiée, sur un passage obligé, soit pour les routes transversales à destination du Velay, du Gévaudan et de l’Auvergne, soit pour les navires remontant vers le Lyonnais, le Forez et le Mâconnais.
) Pour une présentation érudite de la route, cf. Soutou (A.) : Le Larzac autour de la Couvertoirade, op. cit., p. 3-7, et pour sa mise en perspective dans les grands courants commerciaux européens à la fin du Moyen Age, cf. Bautier (R.-.H.) : « Recherches sur les routes de l’Europe médiévale, de Paris et des foires de Champagne à la Méditerranée par le Massif Central », art. cité, p. 126-132.