La géographie routière nous inciterait à regrouper dans un même ensemble tous les axes quittant le nord de la vallée du Rhône, de Lyon à Valence, et se rendant au Puy. En effet, nous savons grâce au Guide du Pèlerin de Saint-Jacques que les Bourguignons et les Teutons (sic) se rendent en Galice par Le Puy. Il est vraisemblable que, suivant la vallée de la Saône, la haute vallée du Rhône, la route de Bourgoin et d’Aoste, ou encore la vallée de l’Isère, ils aient gagné Le Puy par les routes d’Annonay, de Valence et de Chalencon, au gré de leur point d’arrivée dans le sillon rhodanien. Cependant, toutes ou presque permettent de converger vers Saint-Agrève où dès avant 1273, l’hôtel-dieu entretient un important hôpital au carrefour routier du faubourg de Lestra, en contrebas du castrum ( 1570 ).
C’est d’ailleurs l’un de ces itinéraires que suit Urbain II en 1095. Venant d’Italie et se dirigeant vers Clermont, il est à Valence le 5 août 1095, où il consacre la cathédrale Saint-Appolinaire. Ensuite, il apparaît le 15 au Puy, où il célèbre l’Assomption, et adresse à Lambert, évêque d’Arras, une bulle le convoquant au concile à venir. De là, suivant un itinéraire plutôt sinueux, il se dirige vers la Chaise-Dieu, puis descend vers Saint-Gilles en passant par Romans, où il se trouve le 23 août, et le sillon rhodanien. Ce n’est qu’ensuite qu’il remontera vers Clermont pour ouvrir le concile, non sans être passé au préalable par Cluny ( 1571 ). Il est toutefois impossible de préciser quel chemin le souverain pontife a suivi entre Valence et Le Puy. On peut toutefois penser que, sauf facteur précis imposant de faire un détour, le chemin suivi a été soit la route de Tournon et la vallée du Doux, soit celle du plateau de Vernoux par Chalencon, les deux se rejoignant à Saint-Agrève, avant de continuer jusqu’au Puy ( 1572 ).
En 1107, c’est au tour de Pascal II de parcourir le trajet du Puy à Valence, alors qu’il revient de Troyes et se rend en Italie ( 1573 ), mais là encore, les indications sont trop imprécises pour savoir qu’elle route il emprunte de Valence au Puy. Pour sa part, Gélase II se rend à Vézelay à la rencontre de Louis VI en décembre 1118. Remontant le sillon rhodanien, il n’en souhaite pas moins passer au Puy, où il se rend en un voyage rapide, quittant le sillon rhodanien à Valence pour le rejoindre à Vienne, passant sans doute par la route du contrefort sud du mont Pilat, avant de continuer par Lyon jusqu’en Bourgogne ( 1574 ).
Bien qu’avare de renseignements, la documentation nous livre toutefois le portrait de quelques pèlerins empruntant la route conduisant de Serrières au Puy par Yssingeaux. Ainsi, en 1275, les pontonniers du port de Serrières acceptent de faire passer gratuitement les hommes et les troupeaux du prieuré de Saint-Sauveur-en-Rue, en contrepartie de quoi, ils demandent que l’hospitalité leur soit accordée au prieuré lorsqu’ils se rendront à Notre-Dame du Puy, ainsi qu’à leur retour ( 1575 ). Plus au sud, des romipetas venientes de Anicii sont encore attestés en 1429 au port de Valence, alors qu’ils ont des difficultés avec le grangier du seigneur de Crussol qui entend leur faire payer un péage, et ce malgré leur statut ( 1576 ).
) AD 43, hôtel-dieu, 1G 13.
) Crozet (R.) : « Le voyage d’Urbain II et ses négociations avec le clergé de France », art. cité, p. 274-275.
) L’érudit vivarois Albin Mazon, relate dans ses notes l’existence d’un manuscrit latin, qu’il attribue au cartulaire de Quintenas, dont l’existence même est aujourd’hui inconnue, et qui aurait été conservé à la fin du XIXè siècle à la cure de Lamastre [AD 07, 52J 56, p. 261]. Ainsi, le pape « fut reçu en très grande cerémonie au château (de Tournon) ; de là il se dirigea vers Macheville avec une suite nombreuse et vingt mules blanches, en suivant un chemin qui commence au ruisseau de Grozon jusqu’au prieuré, où il célèbra une messe solennelle le huitième jour de septembre 1’année du seigneur 1095 ». Outre l’origine inconnue de cette tradition, puisque c’est ainsi qu’il faut l’appeler faute de précision diplomatique, remarquons déjà que le 8 septembre, le pape est loin de la route de Valence au Puy, qu’il a empruntée en fait un mois avant. La date du 8 août pourrait alors tout à fait fonctionner. En fait, ce bref récit n’a pour lui que la vraisemblance, mais aucun élément probant ne vient l’étayer et il semble relever de la pure invention.
) Fédou (R.) : Les papes du Moyen Age à Lyon, op. cit., p. 39 ; Jaffé (Ph.), Wattenbach (W.) : Regesta pontificum romanorum ad condita Ecclesie ad annum post christum natum MCXCVIII, op. cit., t. I, n°6112 et ss.
) Fédou (R.) : Les papes du Moyen Age à Lyon, op. cit., p. 39 ; Jaffé (Ph.), Wattenbach (W.) : Regesta pontificum romanorum ad condita Ecclesie ad annum post christum natum MCXCVIII, op. cit., t. I, n°6651-6681.
) Cartulaire de Saint-Sauveur-en-Rue, n°CCXIV.
) AD 26, 2E 2666, f°6.