De Saint-Péray à Vernoux

Au-delà de Saint-Péray, la route passe au quartier de la Crozette ( 2853 ) et continue par Biousse ( 2854 ) et Tourtousse ( 2855 ), toujours en rive droite du Mialan. Ensuite, le sentier cadastré au début du XIXè siècle arrive au hameau de Fausse, puis suivant les crêtes du Bois des Communes ( 2856 ), de la serre des Baubes, de la serre de Fourneloup ( 2857 ), arrive enfin au sud de Boffres non loin du lieu-dit « La Gleize » ( 2858 ). Sur le cadastre napoléonien, de Tournon à Boffres, ce chemin porte encore le nom « d’ancien chemin de Saint-Péray à Vernoux » ( 2859 ), la « nouvelle route » suivant un parcours bien différent, passe plus au nord par Alboussière ( 2860 ). C’est d’ailleurs du fait de ce détournement complet de la route que le sentier de crête correspondant à l’axe médiéval n’a pas fait l’objet de modifications significatives, sauf peut-être sur une courte section, de Tourtousse à Chabret, peu avant Boffres.

Sur cette section, un second itinéraire se séparant du sentier de crête serpente sur les flancs sud de la colline : ce tracé passe au lieu-dit Le Tracol, toponyme associé à la présence d’une route. Multipliant les lacets, il évite la partie la plus raide du tracé ( 2861 ). Au niveau de leur carrefour, la chronologie des deux axes ne fait pas de doute ; ce second chemin, se sépare nettement du sentier de crête et lui est donc postérieur. Il évoquerait éventuellement un aménagement de roulage que nous serions tentés d’attribuer au XVIIè ou plus encore au XVIIIè siècle. Toutefois, la très bonne inscription de cet axe dans le parcellaire nous interdit de penser qu’il s’agit d’une création ex nihilo liée à l’essor du roulage. Le toponyme de Tracol, de construction latine, ne peut lui non plus renvoyer au XVIIIè siècle mais nous place plus sûrement au Moyen Age.

Après la Gleize, en direction de Vernoux, le chemin est mentionné à deux reprises au XIVè siècle. En 1340 ( 2862 ), Hugues, seigneur de Pierregourde, rend hommage au comte de Valentinois pour le manse de Savinas, hommage renouvelé dans les mêmes termes en 1349 ( 2863 ) par sa veuve. A l’occasion de ces hommages, le manse de Savinas est borné. Sa limite nord suit le chemin descendant directement vers Vernoux depuis la limite des territoires de Boffres et de Savinas, passant à la Garde. Le lieu-dit de La Garde figure encore sur les cartes actuelles ( 2864 ), à la limite des communes de Boffres et de Vernoux, limite qui correspond à celle des mandements de Boffres et de Pierregourde au XIVè siècle.

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Carte n°65

Un péage se lève dans l’étendue du mandement de Boffres. Mentionné à deux reprises dans le courant du XIVè siècle, en 1303 et en 1335, il est alors aux mains de la famille dauphinoise de Clérieux ( 2865 ). La route ne passant pas directement au pied du château de Boffres, un poste de perception distinct de ce dernier devait exister. Aucun document ne nous permet de le localiser, mais le toponyme La Garde ne serait-il pas à mettre en relation avec ce poste ? C’est possible, le lieu-dit évoquant indéniablement un point de surveillance se trouve situé sur la route exactement à son entrée dans le mandement.

Les deux hommages de 1340 et 1349 en faveur du comte de Valentinois indiquent non seulement que notre chemin passe au lieu de La Garde, mais aussi que depuis ce lieu-dit, il descend en droiture vers Vernoux. Effectivement, depuis La Garde, un sentier globalement rectiligne gagnant Vernoux par le Col de la Justice Vianet et le Bois du Four figure au cadastre napoléonien. Il pourrait correspondre au tracé « en droiture » du XIVè siècle ( 2866 ). Le toponyme de Col de la Justice qui borde la route avant Vernoux se situe sans doute d’ailleurs aux limites du mandement. Il devait s’y élever des bois de justice, symbole du pouvoir seigneurial que l’on retrouve souvent le long des routes, comme sur le chemin montant de Toulaud à Vernoux au lieu-dit du Serre des Fourches qui limite le mandement de Pierregourde.

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Carte n°66

Au niveau de Vernoux, le chemin traverse le mandement de Châteauneuf [de-Vernoux] dans l’étendue duquel un péage se perçoit aux deux derniers siècles du Moyen Age ( 2867 ). Le château de Châteauneuf, situé environ cinq kilomètres au nord de la route n’est pas en mesure de servir de poste de perception, mais nous ne pouvons déterminer où le péage se levait précisément. Peut-être celui-ci se percevait-il au village de Vernoux, petit centre villageois auquel sont associés des marchés et des foires locales dès la fin du XIIIè siècle, que la route traverse ?

Notes
2853.

) Saint-Péray, cadastre de 1811, section de I dite de Vichouère.

2854.

) Saint-Péray, cadastre de 1811, section de F dite de Putier.

2855.

) Saint-Péray, cadastre de 1811, section de G dite de Tourtousse.

2856.

) Toulaud, cadastre de 1811, section de C dite de Biguet.

2857.

) Toulaud, cadastre de 1811, section D dite de Juventin.

2858.

) Boffres, cadastre de 1824, section E1 dite de La Gleize.

2859.

) Toulaud, cadastre de 1811, tableau d’assemblage.

2860.

) Alboussière, cadastre de 1811, tableau d’assemblage.

2861.

) Toulaud, cadastre de 1811, section de C dite de Biguet.

2862.

) AD 69, EP 119, pièce 6.

2863.

) AD 69, EP 119, pièce 9.

2864.

) Carte I.G.N. 1/25000è, n°3036 Ouest, Saint-Péray.

2865.

) Cf. t. I, annexe n°13.

2866.

) Vernoux, cadastre de 1824, section F2 dite du Pêcher.

2867.

) Cf. t. I, annexe n°13.