C- De la vallée de l’Eyrieux à Saint-Agrève par Vernoux, cartes n°73 et 74

D’autres axes parallèles arrivant des abords de la vallée de l’Eyrieux se greffent encore sur le chemin principal au niveau de Vernoux. Même s’ils semblent d’importance moindre que celui passant par Toulaud, mentionnons-les comme autant de possibilités offertes aux voyageurs venant du sud de la vallée du Rhône de gagner Saint-Agrève. Le relief très découpé en de nombreuses serres offre de multiples possibilités de cheminement sur chaque crête qui toutes finissent par se regrouper au niveau du plateau de Vernoux.

A l’est, le premier groupe d’itinéraire se structure autour du Col de Méran, dit au Moyen Age « Croix » de Méran, en référence sans doute à une croix implantée au carrefour routier.

Ce dernier est directement accessible depuis Saint-Marcel-de-Crussol, dans la vallée du Rhône, par un chemin confrontant un territoire de dépaissance en 1394 ( 2921 ). Un chemin de crête, encore cadastré au début du XIXè siècle mais largement abandonné maintenant, relie encore Saint-Marcel à la Croix de Méran par les lieux-dits de Griffaut, la Béraude et Goutailler ( 2922 ). Il constitue certainement un vestige du tracé médiéval.

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Carte n°73

Au Col de Méran se greffe un second axe venant de la vallée du Rhône. Il s’élève depuis Beauchastel en parcourant une ligne de crête directe et rectiligne. Encore nettement cadastré, bien que non mentionné au Moyen Age, sa physionomie de chemin de crête correspond à ce que l’on connaît des caractères des chemins médiévaux de la région. Ce chemin quitte la vallée du Rhône non loin de Beauchastel au lieu de Colombier pour continuer sur la crête des Girondins jusqu’au Col de Méran distant de cinq à six kilomètres.

En direction du sud, un autre chemin est mentionné au milieu du XVIè siècle au territoire de Boullon comme le « chemin de Pierregourde à Saint-Laurent » ( 2923 ). Encore bien cadastré, il suit la crête de Brunel, au départ de Saint-Laurent-du-Pape jusqu’à Boulon et ensuite, il continue par la serre de Boulon jusqu’au col de Méran.

Ces trois axes qui se rejoignent au niveau de la Croix de Méran continuent ensuite unitairement vers la Croix de Saint-André. En 1304, entre Méran et Saint-André le chemin est dit « allant à Boffres » ( 2924 ).Sur cette section, le relief impose le tracé puisque le chemin est isolé sur une serre qu’il suit de bout en bout sans pouvoir vraiment s’en écarter. Nous le retrouvons donc sur le Serre du Combeau puis sur le Serre de Barthe qu’il suit jusqu’à Saint-André où il retrouve le chemin royal venu de Soyons et Toulaud ( 2925 ).

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Carte n°74

Un dernier itinéraire est pour sa part isolé au sud et gagne directement la Croix de Saint-André sans passer par le Col de Méran. Il quitte la vallée de l’Eyrieux au niveau du pont de Pontpierre, mentionné dès 1280. A cette date, notre chemin sert partiellement de limite lors de la transaction de bornage entre les seigneuries de Pierregourde à l’est et de La Tourette à l’ouest ( 2926 ). La limite part du pont, puis monte sur la serre de Pontpierre et continue sur la serre en direction de Montraut puis de la Cabane des Baux. Ensuite, la limite oblique et ne suit plus notre chemin. Toutefois, sur le cadastre, celui-ci se poursuit par les serres de Font Limouse, de Barthes et de Lierne jusqu’à la Croix de Saint-André. Sur cette section, il ne sert plus de limite aux mandements de Pierregourde et de la Tourette, mais il est manifestement choisi en 1311 pour borner ceux de Boffres à l’ouest et de Pierregourde à l’est ( 2927 ). Il est alors dit chemin allant à Boffres.

Notons que la Croix de Saint-André marque elle aussi, comme celle de Méran, le carrefour de plusieurs routes : la route arrivant de Méran au sud-est, celle montée de Pontpierre au sud et celle venue de Toulaud et allant à Vernoux dans le sens est-ouest.

Tous ces axes traversent le mandement de Pierregourde dans lequel est prélevé un péage mal documenté mentionné à deux reprises au XIVè siècle ( 2928 ).

L’importance de tous ces chemins que nous venons de décrire est globalement assez secondaire par rapport à l’axe principal qu’ils viennent rapidement rejoindre. La première utilité de ces chemins est d’éviter au voyageur venant du sud ou ayant traversé le Rhône aux ports de Charmes et de Beauchastel ( 2929 ) de remonter vers le nord jusqu’au niveau de Valence, lui épargnant ainsi un long détour. Les ports de Charmes et de Beauchastel permettent en outre de traverser le Rhône et de gagner la vallée de la Drôme qui constitue alors une grande pénétrante vers les Alpes du sud et au-delà l’Italie.

Notes
2921.

) AD 69, EP 122, pièce 11.

2922.

) Gilhac-et-Bruzac, cadastre de 1812, tableau d’assemblage.

2923.

) AD 69, EP 132, pièce 16.

2924.

) AD 69, EP 121, pièce 3.

2925.

) Gilhac-et-Bruzac, cadastre de 1812, tableau d’assemblage.

2926.

) AD 69, EP 121, pièce 1.

2927.

) Ibidem, pièce 10.

2928.

) Sur le péage de Pierregourde, cf. t. I, annaxe n°13.

2929.

) Rossiaud (J.) : Réalité et imaginaire d’un fleuve. Recherches sur le Rhône médiéval, op. cit., t. I, vol. II, p. 436-440.