a- Du Rhône à Privas

La route quitte la vallée du Rhône en deux points distincts et sur les dix premiers kilomètres ce sont deux axes parallèles qui conduisent jusqu’à Privas où ils fusionnent. Le premier, tout comme actuellement, suit la vallée de l’Ouvèze, alors que le second passe plus au sud, par Chomérac.

Depuis Le Pouzin par la vallée de l’Ouvèze

Le premier axe, suivant la vallée de l’Ouvèze, quitte le Rhône au niveau du village du Pouzin où se trouve un château prélevant un péage à compter du XIIIè siècle au moins. Ce péage porte tant sur les navires rhodaniens que sur le trafic empruntant la vallée de l’Ouvèze ( 3158 ). Après le Pouzin, exceptés quelques passages étroits, la vallée de l’Ouvèze constitue un cheminement direct et sans difficulté pour se rendre à Privas distant de moins de 10 kilomètres. Le premier de ces passages étroits se situe immédiatement au départ du Pouzin. La route ne peut le franchir qu’en rive gauche de l’Ouvèze, immédiatement au nord du lit de la rivière, dans la mesure où au sud, des falaises tombent directement dans l’eau. Même au nord, le passage entre le versant du causse de Rompon et l’Ouvèze est resserré et ne laisse aucune possibilité à la route de s’écarter des bords de la rivière qu’elle suit donc au plus près. Juste avant ce défilé, la route passe au niveau du pont antique permettant à la voie d’Antonin le Pieux et à la route médiévale qui en est l’héritière de traverser l’Ouvèze. Tout au plus, la route s’écarte-t-elle de la rivière d’une centaine de mètres au niveau du hameau du Claux ( 3159 ). Ensuite, elle traverse le hameau des Fonts-du-Pouzin, au plan de village-rue caractéristique ( 3160 ). A ce niveau est mentionnée en 1487 la route allant vers les Ollières qui quitte la vallée de l’Ouvèze pour s’élever vers Saint-Cierges-la-Serre. Au niveau de Coin, la route actuelle, qui depuis le Pouzin s’est implantée sur la route médiévale du fait des contraintes de relief, s’en sépare pour passer au sud du hameau. Le tracé précédent est toutefois nettement identifiable sur le cadastre ( 3161 ). A Saint-Julien-en-Saint-Alban, la route passe une centaine de mètres au sud d’un quartier encore de nos jours dit de « l’Hôpital », toponyme qui doit conserver le souvenir d’un établissement d’accueil situé non loin de l’axe, mais dont la documentation médiévale n’a pas gardé de trace ( 3162 ).

A la sortie de Saint-Julien-en-Saint-Alban, la route continue en direction de Flaviac, toujours en suivant plus ou moins fidèlement le cours de l’Ouvèze dont elle ne s’écarte sensiblement qu’au niveau du lieu-dit de Logisson ( 3163 ). Après Logisson, elle passe au hameau de La Charrière, au nom évocateur de la route ( 3164 ), puis arrive à Flaviac même, village qu’elle traverse de part en part ( 3165 ).

Après Flaviac, la route continue en direction de Coux par le hameau de Cros ( 3166 ), puis par Blanc ( 3167. Entre Cros et Blanc, au niveau de Gagne, la route médiévale a toutefois certainement disparue, emportée par le méandre que l’Ouvèze décrit à cet endroit vers le nord ( 3168 ). Sur le cadastre, il est en effet net que le chemin initial est coupé par la rivière, imposant la construction d’un autre axe une cinquantaine de mètres au nord. Celui-ci se superpose au parcellaire signe qu’il n’est pas ancien. En effet, on a encore conservé le devis des réparations à faire suite à la destruction de la route accompagné de son plan explicatif, le tout daté de 1780 ( 3169 ).

Ensuite, la route passe au quartier de la Charrière, non loin de l’église de Lubilhac( 3170 ). Au niveau de Coux, la vallée de l’Ouvèze se resserre jusqu’à former une gorge profonde rendant le passage en direction de Privas très difficile. Subsiste encore sur les plans napoléoniens, un sentier pouvant s’apparenter aux vestiges de la route médiévale. Il continue au-delà de Coux, en rive droite de l’Ouvèze, puis traverse le Mézayon, affluent de l’Ouvèze, au quartier de Coste-Chaude ( 3171 ). Passant ensuite par Bas-Vanel et Vanel ( 3172 ), il arrive face à la porte occidentale de la ville de Privas . La route traverse ensuite cette dernière dont elle constitue la rue centrale, axe du développement urbain autour duquel se sont structurés tout à la fois l’habitat et la place du marché ( 3173 ).

Le tracé que suit ce chemin est toutefois très abrupt dans sa descente au fond de la vallée du Mézayon et dans sa remontée du côté de Privas, présentant un profil interdisant tout charroi lourd. Un second axe suit une pente plus douce. Nous ne sommes pas parvenus à dater, mais qui est probablement postérieur à celui traversant le Mézayon que nous venons de décrire. La chronologie du carrefour de Coux ne laisse subsister aucun doute sur ce point.

Il traverse l’Ouvèze au niveau de Coux, précisément au quartier du Pont ( 3174 ). L’existence de cet ouvrage n’est toutefois pas attestée au Moyen Age, mais ses caractères architecturaux inclinent à situer sa construction au XVè ou XVIè siècles ( 3175 ). Face au quartier du Pont qui se trouve en rive gauche de la rivière, le cadastre napoléonien indique le toponyme « Pont-Perdu », situé en rive droite de l’Ouvèze. Ceci laisse penser qu’un autre ouvrage a existé avant celui que nous venons d’évoquer, mais rien n’en subsiste ni sur place, ni dans les textes. Ensuite, la route continue vers Privas par le lieu-dit du Tauléac, où elle rejoint la route venue de Baix. Le détournement de la route par Coux et le Tauléac est de toute évidence un déplacement d’itinéraire cherchant à faciliter le débouché de la route dans la plaine de Privas. De ce fait, il évoquerait le XVIIIè siècle et l’essor du transport par roulage que ne permettait pas le passage de la vallée du Mézayon. Néanmoins, sa bonne inscription dans le parcellaire et l’absence de dossier le concernant dans les archives de l’Intendance de Languedoc comme dans celles des Etats du Vivarais indiquent qu’il est très probablement plus ancien, sans que nous ne puissions toutefois en proposer une datation.

Notes
3158.

) Cf. t. I, annexe n°13.

3159.

) Le Pouzin, cadastre de 1810, section B1 dite du Bourg.

3160.

) Rompon, Cadastre de 1810 section de G dite des Fons.

3161.

) Saint-Julien-en-Saint-Alban, cadastre de 1810, section D dite de Cellier.

3162.

) Saint-Julien-en-Saint-Alban, cadastre de 1810, section B dite de Couchat.

3163.

) Flaviac, cadastre de 1811, section D1 dite de Pargiraud.

3164.

) Flaviac, cadastre de 1811, section D1 dite de Pargiraud.

3165.

) Flaviac, cadastre de 1811, section B3 dite de Flaviac.

3166.

) Flaviac, cadastre de 1811, section B3 dite de Flaviac.

3167.

) Flaviac, cadastre de 1811, section B3 dite de Flaviac.

3168.

) Flaviac, cadastre de 1811, section B3 dite de Flaviac.

3169.

) AD 07, C 776.

3170.

) Coux, cadastre de 1811, section D dite de la Charrière.

3171.

) Coux, cadastre de 1811, section B dite de Chassagne.

3172.

) Privas, cadastre de 1811, section A dite de la Ville.

3173.

) Sur le développement urbain de Privas et sa relation avec la route, cf. t  , p. 502-503.

3174.

) Coux, cadastre de 1811, section F dite des Branches.

3175.

) Cet ouvrage est toutefois difficilement datable avec certitude. Il se présente comme une arche d’une trentaine de mètres d’ouverture, ce qui est particulièrement audacieux et signe d’une excellente maîtrise technique. Le pont du Doux à Tournon, construit fin XVè siècle et ouvert à la circulation début XVIè siècle, est l’exemple extrême en la matière avec une ouverture de près de 50 mètres, mais il prouve contrairement à ce qui a trop souvent pu être dit que de telles arches ne sont pas étrangères au Moyen Age finissant. Le plein cintre de son arche permet en outre assurément de situer sa construction antérieurement à l’intervention des ingénieurs du corps de Ponts et Chaussées qui ont systématiquement introduit l’arc surbaissé pour ce type d’ouvrage large.