Après Aubenas, où elle est mentionnée en 1414, la route se dirige vers Joyeuse. Elle quitte la ville par la porte du couvent des Frères Prêcheurs ( 3737 ), devenue porte Saint-Laurent lorsque cette église a accédé au statut de paroissiale et a perdu son vocable initial, Saint-Dominique. Dans l’axe de la porte, le cadastre de 1834 présente encore la « route de Joyeuse » ( 3738 ). Depuis la sortie de la ville, la route se dirige vers Saint-Etienne-de-Fontbellon en passant par le quartier de la Paillouse. Peu avant Saint-Etienne-de-Fontbellon, au quartier de la Croizette, la route médiévale rejoint le chemin antique qui lui se maintient dans la plaine, au coeur des terroirs les plus densément occupés au début de notre ère.
Après Saint-Etienne-de-Fontbellon, le passage de la route est attesté en 1501 à Uzer ( 3739 ). Entre les deux localités distantes de dix kilomètres environ, il faut se fier au cadastre et à la toponymie pour retracer la route, faute de terrier ou de tout autre acte foncier concernant une parcelle mitoyenne de l’axe. La carte de Cassini nous présente un tracé proche de celui de l’actuelle R.N. 104, mais le plus souvent décalé de cinquante à cent mètres à l’est ou à l’ouest. Même si aucun document ne nous assure qu’il s’agit bien du tracé médiéval, nous avons tout lieu de le penser tant l’inscription de la route dans le parcellaire ne pose aucun problème. A la sortie de Saint-Etienne-de-Fontbellon, la route oblique à l’ouest avant de traverser le ruisseau de Bourdaric au quartier du Pont ( 3740 ). Cependant, nous ne savons pas si un ouvrage existait là dès le Moyen Age. Peu avant la traversée de la rivière la route conduisant à Lagorce et Vallon par Saint-Sernin se sépare de la route de Joyeuse. Le tracé est ensuite net par le Grazel ( 3741 ) puis les Mazes où il rejoint l’actuelle R.N. 104 avec laquelle il se confond sur une centaine de mètres ( 3742 ). Ensuite, alors que la R.N. 104 oblique vers l’ouest, la route ancienne poursuit droit vers le sud par un tracé existant encore sous la forme d’un modeste chemin vicinal, parfois réduit à l’état de simple sentier. Passant à Boudeyre et Chastrenas ( 3743 ), la route arrive ainsi à Lachapelle-sous-Aubenas.
Au sud de Lachapelle-sous-Aubenas, la voie ferrée Aubenas - Alès et la R.N. 104 se superposent au tracé médiéval qu’il est donc difficile de retrouver de nos jours sans un recours précis au cadastre napoléonien. Ce dernier permet de retracer la route par les quartiers de La Croizette et de Lachamp ( 3744 ) où une terre reconnue à l’abbaye des Chambons en 1329 la confronte ( 3745 ), puis par le lieu-dit au toponyme évocateur de l’Hôpital ( 3746 ). Rien ne subsiste toutefois à son sujet dans la documentation médiévale et il est impossible de savoir avec certitude s’il s’agit d’un établissement charitable situé au bord de la route, ou de possessions des Hospitaliers de Saint-Jean-de-Jérusalem. Néanmoins, la commanderie la plus proche, celle de Jalès, ne semble pas avoir de biens dans le secteur ce qui permet de supposer que nous sommes en présence d’un lieu d’accueil lié au passage de la route. Au-delà de l’Hôpital, à partir du quartier de Boude ( 3747 ), le chemin ancien s’écarte de l’axe actuel en direction de l’ouest pour traverser la rivière de Lande, une cinquantaine de mètres en amont du pont actuel. Un ouvrage ancien subsiste encore, mais devant les nombreuses reconstructions dont il témoigne, il est difficile à analyser, des travaux de restauration récents compliquant la lecture de l’ouvrage. Il est donc présomptueux de prétendre pouvoir en attribuer les bases à telle ou telle période avec certitude. Néanmoins, on sait qu’il présente déjà au milieu du XVIIIè siècle sa physionomie actuelle, alors qu’un plan et une élévation en sont levés et que des travaux de consolidation sont menés à l’instigation des Etats du Vivarais ( 3748 ). Au-delà du pont, la route passe au quartier de l’Estrade puis arrive à Uzer. Le château d’Uzer se trouve presque en bordure de la route puisqu’en 1506, Antoine Lieutier, curé d’Uzer, lègue divers biens dont une terre labourable située retro castrum confrontant du levant avec le chemin d’Uzer à Joyeuse ( 3749 ). Aucun péage ne semble toutefois être attaché à ce chef-lieu de mandement. La documentation, très fragmentaire sur ce dernier, ne nous permet toutefois pas d’être affirmatif. Il en est de même pour le mandement de Vinezac que la route traverse immédiatement avant d’arriver à Uzer et pour celui de Laurac situé juste au sud. Aucun de ces châteaux ne semble prélever de péage ce qui est une configuration assez unique en Vivarais sur une route de cette importance.
Au sud d’Uzer, la route se dirige vers Joyeuse. Son passage est attesté en 1501 au lieu-dit de Fontayne ( 3750 ), aujourd’hui Fontane, proche de La Croizette ( 3751 )où se sépare la route conduisant à Largentière ( 3752 ). Au-delà, le cadastre permet de penser que la route médiévale ne suit pas exactement le tracé de l’actuelle R.N. 104 qui est le fruit de travaux du XVIIIè siècle. En effet, après le quartier de Prends-toi-Garde, la route moderne traverse la plaine du ruisseau de Blajoux en rive gauche, mais sur plusieurs kilomètres, elle se surimpose au parcellaire et au réseau viaire ancien. Le tracé médiéval est au contraire probablement localisable au niveau du chemin figurant au cadastre napoléonien et passant par le village de Laurac même, puis par Chaussart, l’Oustalou et de l’Estrade ( 3753 ), peu avant Rosières. Entre Lestrade et Rosières, la route franchit un petit ruisseau au lieu-dit de La Planche qui doit conserver le souvenir d’un modeste ponceau de bois. A Rosières, la route traverse le village puis arrive face à la Beaume. Cette rivière est à l’heure actuelle franchie au niveau même de Rosières alors que le toponyme « Le Pont » situé 200 mètres en amont de l’ouvrage actuel rappelle le point de franchissement ancien. Le premier ouvrage médiéval dont il ne reste rien à l’heure actuelle, sauf peut-être deux bases de culées sur les deux rives, est en travaux en 1342 puisque cette année-là, les responsables de l’oeuvre du pontem in fluvio Beyme s’occupent de l’approvisionnement du chantier en bois ( 3754 ). Nous ne savons toutefois pas s’il s’agit de travaux d’entretien, de restauration ou d’une construction ex nihilo.
Au niveau de Joyeuse, où se perçoit un péage dès le milieu du XIIIè siècle au moins ( 3755 ), la route traverse la ville de part en part et en constitue la rue principale le long de laquelle s’est structuré le développement urbain ( 3756 ). En 1338, elle entre en ville par la Portam Majorem castri puis prend le nom de Carreria Recta et Majore ( 3757 ). Après Joyeuse et jusqu’à Saint-Ambroix, il est possible d’identifier deux itinéraires principaux, l’un passant par Beaulieu et la plaine de Jalès, le second passant aux Vans et suivant au plus près le talus cévenol ou même y pénétrant sur quelques kilomètres.
) AD 07, 2E 32, f°37r°.
) Aubenas, cadastre de 1834, section B2 dite de Bois Vignal.
) AD 07, 3H 3, f°142.
) Saint-Etienne-de-Fontbellon, cadastre de 1834, section D2 dite du Village.
) Saint-Etienne-de-Fontbellon, cadastre de 1834, section B dite de Blanc.
) Saint-Sernin, cadastre de 1834, section A dite des Mas.
) Lachapelle-sous-Aubenas, cadastre de 1834, section B1 dite de La Chapelle.
) Lachapelle-sous-Aubenas, cadastre de 1834, section C dite La Croizette.
) AD 07, 1H 1.
) Vinezac, cadastre de 1833, section B2 dite de Prunias.
) Vinezac, cadastre de 1833, section C dite de la Côte.
) AD 07, C 820.
) Mazon (A.) : Notice sur Uzer, op. cit., p. 24.
) AD 07, 3H 3, f°150v°.
) Uzer, cadastre de 1833, section A2 dite d’Uzer.
) AD 07, 3H 3, f°150.
) Rosières, cadastre de 1809, section C dite des Chotards.
) AD 07, 2E (MJ) 1, f°14r°.
) AD 07, 1H 11.
) Sur le développement urbain de Joyeuse, cf. t. I, p. 499-500.
) AD 07, 2E 10739.