Le principal intérêt de cette approche est son caractère non directif. Elle pose les hypothèses minima qui assurent l’apparition d’un phénomène de complémentarité entre innovations de produits et de procédés. La prise de parti en faveur de ces hypothèses doit ensuite être fondée sur une théorie et / ou l’observation empirique afin de :
Définir les cas de réalisation des hypothèses.
Mesurer l’exactitude des prédictions du modèle.
Deux hypothèses clefs sont particulièrement intéressantes et déplacent le débat des conditions de valorisation des innovations de produits et de procédés vers leurs conditions de développement :
Celle de non suradditivité des coûts d’investissement en flexibilité de produit et de procédé.
Celle d’indépendance ou corrélation positive entre les lois de distribution des innovations de produits et de procédés.
Comme le montrent Cohen et Levinthal [1990] la réponse tout au moins à la première question est largement d’ordre cognitif et fait référence à la nature et aux propriétés des compétences développées en vue de l’innovation de produit ou de procédé.
Malgré l’intérêt de ce modèle, cette approche pâtit d’un certain nombre de limites :
La première à trait à l’opposition long terme / court terme qui y est développée. Ainsi que le soulignent les analyses évolutionnistes, les apprentissages de court terme constituent le support de l’évolution de long terme des firmes : l’apprentissage est cumulatif, à ce titre il peut donner lieu à des trajectoires difficilement infléchissables (Cohen et Levinthal [1990]).
La seconde et principale limite concerne la temporalité des innovations de produits et de procédés qui semble importante. Il n’existe pas d’équivalence entre innover en produit, ensuite en procédé (et inversement) et innover simultanément en produit et en procéder comme l’indiquent les travaux de Capon, Farley, Lehmann et Hulbert [1992] : les innovations de procédés lorsqu’elles apparaissent indépendamment des innovations de produits ne sont pas porteuses des mêmes bénéfices économiques que les autres formes d’innovations (en particulier en termes d’accroissement des ventes). Les boucles de rétroaction sont donc susceptibles de varier grandement d’un cas à l’autre (sans doute positives dans le cas des innovations de produits et positives faiblement voir négatives dans le cas des innovations de procédés). La chronologie des innovations serait donc une variable importante (apparition simultanée, apparition d’innovations de produits puis procédés ou inversement procédés puis produits).
Cette analyse permettrait néanmoins d’apporter une explication à ce constat d’une asymétrie entre les innovations de produits et de procédés : les innovations de produits entraîneraient l’apparition d’innovations de procédés tandis que les innovations de procédés exerceraient un effet moins stimulant sur les innovations de produits. L’explication de cette asymétrie serait simple :
Comme de nombreux auteurs l’ont souligné, le développement d’innovations de produits se fonderait sur des compétences beaucoup plus générales que celles aboutissant à des innovations de procédés.
Il s’ensuit que les innovations de produits sont susceptibles d’accompagner une croissance de flexibilité plus importante que les innovations de procédés.
Par conséquent l’effet d’entraînement des innovations de produits sur les innovations de procédés serait plus important que l’effet d’entraînement des innovations de procédés sur les innovations de produits