L’irréversibilité des choix technologiques

D’un point de vue technique les opportunités d’imitation plus importante du côté des produits que des procédés et le rôle particulier des connaissances factuelles impliqueraient une plus faible irréversibilité des choix technologiques relatifs aux produits que de ceux liés aux procédés. De plus, le know who intervenant dans le développement des comportements innovants de produits et de produits & procédés ne ferait pas directement référence à des objets techniques mais à des savoirs organisationnels. Ce type de connaissance suivrait donc une logique de développement partiellement indépendante de celle des objets techniques qu’elle contribue à faire émerger. Ceci lui conférerait une certaine flexibilité du point de vue de son champ d’application technique rendant donc son redéploiement plus facile. Par ailleurs, ainsi que nous l’avons montré à partir des travaux de Cohen et Levinthal [1990], le développement d’innovations de produits et de produits & procédés implique de surmonter un ’trade-off inward looking outward looking’. Pour ce faire la firme doit assurer le développement concomitant de connaissances pointues et suffisamment diversifiées. Cette diversité permet alors non seulement d’accroître les ’capacités absorptives externes’ présentes mais réduit en même temps les risques ultérieurs de lock-out73. Pour ces différentes raisons il est possible de supposer que les innovateurs de produits et de produits & procédés seraient confrontés à des risques d’irréversibilité plus limités que les innovateurs de procédés.

Notes
73.

lockout’ (Cohen et Levinthal [1989]) : lorsqu’une firme ne développe pas ses capacités absorptives dans un domaine, ses anticipations se figent. Par la suite, lorsqu’une opportunité émerge elle risque de ne pas être perçue ou de ne pas être accessible faute de capacités d’absorption nécessaires pour l’exploiter. La firme est de fait contrainte dans des domaines technologiques spécifiques de par le développement autonome de ses capacités d’absorption. Si elle ne réalise pas suffisamment tôt des investissements pour diversifier ses capacités absorptives dans certains domaines, elle peut par la suite être incapable de rattraper ce retard. Ce phénomène devrait être plus fréquent en cas de trajectoire orientée vers les innovations de procédés puisque ces dernières reposeraient plus sur des compétences spécifiques.