La chaîne causale que nous étudions est relativement longue, puisqu’elle comporte trois niveaux.
La nature et les attributs des connaissances technologiques ne sont pas directement observables empiriquement.
Une première approche consisterait à tenter d’étudier séparément chacun des trois niveaux de causalité : dans un premier temps la relation entre le type de compétences mobilisées par les firmes pour innover et la nature des connaissances technologiques qui leurs sont associées (a→b) ; dans un second temps les relations existant entre la nature des connaissances et leurs attributs (b→c) ; dans un troisième temps l’impact de ces attributs sur les caractéristiques des trajectoires technologiques (c→d). Cette première stratégie est relativement lourde à mettre en oeuvre et nous confronte directement au problème de la mesure empirique de la nature et des attributs des connaissances technologiques et économiques sur lesquelles repose l’innovation. Bien que nous ayons par ailleurs entrepris certains travaux allant dans cette direction en explorant le lien existant entre les conditions d’appropriation et la persistance des comportements innovants nous n’opterons pas ici pour cette démarche (Cabagnols [1999]216).
Une seconde approche que nous retiendrons consiste à réduire la relation initiale a→b→c→d à l’étude d’une relation directe entre a et d. Nous n’étudions plus alors que l’impact de la nature des connaissances technologiques sur les caractéristiques des trajectoires technologiques. Cette analyse présente le double avantage de la simplicité et de la continuité avec les développements empiriques proposés dans le chapitre IV où nous avons mis l’accent sur le parallèle existant entre d’une part les compétences mobilisées par les firmes pour innover et, d’autre part, la nature et les attributs des connaissances sur lesquelles elles s’appuient. Par conséquent, les variables exogènes que nous retiendrons pour expliquer la persistance des comportements innovants seront les mêmes que celles déjà employées dans le chapitre IV, à savoir les compétences mobilisées par les firmes pour innover.
Nous avons proposé d’identifier empiriquement les attributs des connaissances technologiques en considérant que les outils d’appropriation (brevet, lead-time, complexité, secret) jugés les plus efficaces par les firmes pour protéger leurs comportements innovants nous renseignaient sur les attributs des connaissances qui président à leur développement. Nous avons alors évalué l’impact de l’efficacité de ces différents outils sur les principales caractéristiques (en termes de persistance et de continuité) des trajectoires technologiques sur lesquelles s’engagent les innovateurs de produits, procédés et produits & procédés.