Geste n°1

Le rapport que tisse cette maman avec l'école semble basé sur le registre de la confiance, attendant beaucoup des enseignants qui entourent sa fille. Sur les conseils du psychologue scolaire, l'enfant est même suivi en psychothérapie depuis quelques mois maintenant. Elle est satisfaite de l'école et sollicite des rendez-vous auprès des deux enseignantes en fonction des problèmes rencontrés par sa fille. Elle ne comprend pas tout à fait la méthode de lecture préconisée par l'école ; la réunion de classe ne lui a rien apporté et madame Guille aurait préféré qu'elle ait lieu dès les premiers jours de la rentrée. "J'ai pas compris le système" dira-t-elle, "à l'école il fonctionne, c'est un peu bizarre. Elles 302 ne nous expliquent pas en fin de compte comment elles fonctionnent". Elle ne comprend pas la méthode qui a un départ global (GAFI), certes, mais qui propose très vite des mises en situation phonie/graphie. Pour combler ce manque, apparent pour elle, au moment de l'aide à apporter à l'enfant, elle va reprendre ce qu'elle a elle-même connu, c'est à dire le départ grapho-phonétique systématique qui n'est pas tout à fait la démarche préconisée : " moi, j'ai pris dans mes souvenirs, je lui ai appris en syllabes d'abord, et à l'école c'est d'abord visuel. Je ne suis pas trop pour. J'aime mieux les syllabes et là, elle comprend mieux avec les syllabes. Les premières lettres, comment on fait. Détailler le mot... [...] syllabes par syllabe voire même si la syllabe ne fonctionne pas, lettre par lettre pour associer les sons". Cette incompréhension vis à vis de la méthode ne s'est pas transformée en hostilité radicale, comme on peut le voir chez certains. Elle aime bien le support du livre, sans réellement bien saisir la logique interne de la méthode 303 . Lorsqu'elle dit à un moment que le meilleur moyen d'apprendre à lire, c'est tout "d'abord aimer la lecture, avoir envie", il faut le comprendre dans le sens d’une capacité d'attention pour connaître les lettres, les syllabes et les mots. Cela est bien entendu fondamental, mais elle omet la dimension du sens même de l'acte lexique. Il semblerait qu'il y ait, dans son propos, une représentation de l'apprentissage le réduisant en une décomposition mécanique de lettres et de sons.

Notes
302.

Il s'agit des deux enseignantes travaillant à mi-temps

303.

E Au niveau de l’apprentissage de la lecture, qu’est-ce qu’il faut pour qu’un enfant apprenne bien ? — M (silence). Un livre... leur livre qu’ils ont, il est très bien. Parce que c’est pas, y’a des petites phrases, « papa, maman s’en vont au marché », là c’est vraiment l’histoire de tous les jours avec Gafi, il est marrant... toute une histoire qui peut se passer... et puis c’est des prénoms assez... j’aime bien ce livre là. Mais, autrement elle a des fiches de lecture. J’ai bien aimé les supports qu’ils ont mais... ce qu’il faut ? Je dirais une maîtresse patiente.