Geste n°4

Et pourtant, cette maman a commencé très tôt à raconter des petites histoires tous les soirs : "dix minutes et puis ça suffisait" mais "maintenant, (je) lui laisse le livre et qu'elle essaye de lire parce qu'autrement...", sous-entendu, elle ne ferait pas l'effort de s'y mettre toute seule.Comme on voit, cette maman a stoppé ce rituel. Désormais, sa fille est grande, elle apprend à lire, il est donc nécessaire qu'elle lise seule : "Ca la forcera à lire toute seule". Cette mère veut, plus fort que tout, que son enfant sache lire "qu'elle aille [même] 304 jusqu'au bac". Elle ne se sert pas du levier fantastique de la triade parent-enfant-livre, qui est un moment magique, pour la plonger dans l'univers de l'écrit.Cet enfant qui a besoin, peut-être plus que quiconque, de par son histoire affective et les soubresauts de la vie familiale, qu'on aménage un temps pour se retrouver accompagnée devant le monde magique du livre, est laissée seule devant l'univers des signes. Cette mère pourrait trouver dans la grande variété des éditeurs et des écrivains, des livres lui permettant de mettre des mots sur les maux de leur histoire familiale. De là, naîtrait un dialogue mère-fille, salvateur pour les deux. Mais la douleur affective de la séparation du père et le manque d'habitude d’utilisation du livre semblent tels que la mère ne peut avoir recours aux contes, à l'histoire banale, pour dépasser la souffrance de l'absence.

Notes
304.

C'est nous qui rajoutons