Geste n°1

Le lien entre l'école et la famille est réalisé partiellement. A plusieurs reprises dans le courant de l'année, les parents ont rencontré l'enseignante. Il est vrai que Christopher pose des problèmes de comportement et à ce titre le père s'est même déplacé pour mettre les choses au point avec son fils. "C'est un enfant d'une instabilité, très difficile à cerner. Il recherche en même temps l'adulte, il recherche l'enfant, il peut être violent [...] il a un contact violent" dira l'enseignante de cet enfant. Les réprimandes de l'école sur son comportement sont reprises 360 à la maison apparemment de manière ferme - peut-être même "musclée"-. Dans cette confidence livrée par la maîtresse de l'enfant, la confiance vis-à-vis de l'école se résume à ce qu'il y ait adéquation du comportement social de l'enfant par rapport aux lieux où il vit. Autrement dit, il se doit d'être discipliné et obéissant et, à ce titre, le père réagit rapidement comme pour dire "mon enfant doit se tenir correctement, autrement ce sera la punition". Les parents ne cherchent apparemment pas la raison de cette instabilité dans le dialogue avec leur fils et dans la reprise (sept fois) du mot dur concernant le père -"il est très dur"- invite à penser que ce dernier peut être même violent. De nombreuses études ont montré le fait qu'un enfant dit violent ne fait que reprendre le traitement qu'on lui inflige à la maison. La mère, quant à elle, essaie de temporiser, tout en disant de son mari, "il est très rigoureux avec lui-même donc il est très rigoureux avec les autres" 361 .

La méthode de lecture ne convient pas tout à fait à la maman, qui s'occupe le plus souvent du travail scolaire : " je trouve que ce n'est pas évident au départ, je trouve que c'est trop du par cœur, c'est trop le mot qu'ils visionnent, ils arrivent pas...". En effet, la méthode de lecture utilisée dans cette classe, appelée méthode feuilleton, est basée sur le principe de faire mémoriser assez vite des mots et de permettre ainsi aux enfants de les reconnaître, afin de les réutiliser plus aisément dans d'autres phrases. Dans cette méthode - MIKA-, l'étude de la correspondance phonie-graphie n'est pas tout à fait exclue mais se tient au second plan. Dans un tel contexte d'apprentissage, la maman perd ses propres repères et aurait souhaité autre chose : " j'aurais préféré, par exemple que R et A ça fait /RA/. Pourtant, il a appris en maternelle sauf que pour lui, il s'est retrouvé en C.P.... pouf... c'était oublié. Alors en fin de compte, il faut reprendre". A notre connaissance, il n'y a aucune méthode qui préconise l'étude de la correspondance phonie-graphie en maternelle de façon systématique. Madame Bourgeton doit confondre avec les jeux de découverte sonore ( reconnaissance de phonèmes simples, de bruits : tondeuse, porte qui claque, instrument de musique, etc. ; jeux de reproductions sonores (faire un rythme avec les mains, constituer un algorithme sonore avec instrument à percussion, etc…). Revenant à la lecture de son enfant, elle ne comprend pas, par exemple, qu’il ne soit pas capable de reconnaître un mot en dehors du contexte où il l'a appris : " Je trouvais si y'avait un mot par exemple "maison", s'il connaissait pas le mot, il était incapable de me dire parce que /M/ et /AI/, ç'a fait /MAI/". Elle reste, comme beaucoup de parents, à ce qu'elle a elle-même connu et complète l'apprentissage de la lecture à sa manière.

Notes
360.

Un père très très dur, ça, je le sais autrement et j'ai eu une fois à le constater parce que j'avais donné une punition à Christopher. Ils ont déboulé tous les deux et puis lui a abordé son fils et c'était ferme. A la maison, il est très très dur avec lui. Elle, elle temporiserait certainement un peu plus. Mais,...bon... je pense qu'ils ont raison quelque part. Il faut être ferme avec Christopher. Il lui faut des limites à cet enfant là. maintenant de quelles façons et commet s'y prendre ? Je n'en sais rien.[...] mais un père très très dur.

361.

Propos recueillis auprès de l'enseignante.