Geste n°1

L'essentiel, pour la maman, repose sur un bon suivi scolaire de la part des parents, mais se dit complètement incompétente pour apprendre à lire à ses enfants. Cependant, elle n'a pas pour autant confiance en l'enseignante et dans la méthode. Elle la trouve en partie responsable de la difficulté scolaire de ses deux autres enfants et de l'échec de Aymeric 421 . Sans forcément la critiquer, elle dira à trois reprises, que la maîtresse "a perdu pied avec son enfant". Et, dans son propos, un certain ressentiment vis-à-vis d’elle apparaît. Deux de ses amis orthophonistes lui "ont (d’ailleurs) conseillé de prendre en charge ce que ne pouvait pas prendre en charge la maîtresse. Donc on est parti sur l'ordinateur avec des phonèmes, et j'ai l'impression que c'est à partir de ce moment là qu'il s'est mis en route". Elle lui a donc proposé de revoir l'aspect phonétique de la langue en jouant avec lui sur ordinateur. Toujours d’après madame Paris, c'est grâce à cette prise en charge spécifique que l'enfant a commencé réellement à apprendre à lire. Cela étant posé, deux remarques s'imposent. Premièrement, la méthode 422 (lire au C.P.) utilisée dans le cadre de cette classe prend en compte les aspects phonétiques de la langue. Deuxièmement, en travaillant plus particulièrement avec son enfant l'apprentissage des phonèmes de la langue sur son ordinateur personnel, l'enfant investit non seulement la technique de la lecture mais "possède" sa mère dans la relation qu'il tisse avec elle à ce moment précis. Elle, qui ne l'a jamais intéressé au domaine de l'écrit, lui offre la possibilité enfin de partager une partie de son univers : l'écrit et le lire. La maman, même si elle s'en défend, est trop occupée par son travail et ses recherches universitaires pour avoir le temps nécessaire auprès de son enfant. Elle ne supporte pas l'injonction de la maîtresse, lorsque cette dernière écrit sur un cahier à l'adresse des parents : "sortez-les !". Malgré la présence d'une structuration familiale solide, on ressent, vu les activités de l'un et l'autre époux une certaine absence de leur part. L'enseignant dit à ce propos avec beaucoup de prudence : "On se connaît bien, parce que j'ai eu les autres enfants. Ce sont des parents qui suivent bien leurs enfants... Je dis "bien", mais je crois qu'il faudrait mettre "bien" entre guillemets. J'ai l'impression qu'il y a une certaine absence des parents étant donné leur travail. Je ne sais pas... Et qu'il y a un certain cafouillis général au niveau de l'organisation et que les enfants se débattent là dedans comme ils le peuvent".

Tout va trop vite pour son enfant et la méthode n'est pas attrayante pour lui, affirmera à plusieurs reprises la maman. Reprenant les propos de (BETTELHEIM, B.1983) qu'elle a lus, elle adhère tout à fait à la réflexion "qu'on comprenait qu'on n'avait pas envie d'apprendre à lire avec des livres qui n'étaient pas marrants". Le père, qui ne s'est jamais préoccupé de l'apprentissage de la lecture de ses enfants, a son avis sur la question : " il vaut mieux déchiffrer par syllabe parce que la lettre S + E ça fait se /SE/... Je pense que par saccades, c'est plus logique que d'apprendre tout un mot en entier, à la fin.....". Ce père n'a pas une bonne connaissance de la méthode employée qui prend parfaitement en compte cette dimension phonologique.

Notes
421.

M Le deuxième point, sur la technique de l’apprentissage, je crois que je n’ai pas de chance parce que 3 des 4 enfants sont tombés sur la même maîtresse en CP, et je pense que c’est une très mauvaise méthodologie, surtout qu’il y a eu 3 échecs relatifs.

422.

Voir chapitre 10 TOME I