Entretiens dans le cadre de l’enquête pendant l’année 1998

Entretien N° 13. Famille GELE

Le 10 février 1998

E Qu’est-ce que ça évoque pour vous. C’est peut-être un peu difficile pour vous dans la mesure où vous êtes enseignante mais tant pis... d’avoir cette double casquette de parents et d’être enseignante.

M C’est sûrement difficile, moi je vais essayer de parler plus en temps que parent. Ça a été passionnant. Alors au niveau de l’apprentissage de la lecture, c’est tout ce qui contribue à amener l’enfant à avoir envie d’apprendre à lire. Ça s’est fait naturellement et en fait on a sûrement été très vigilant par rapport à ce souci là mais c’est arrivé comme ça sans qu’on s’en rende compte, ce désir d’apprendre à lire. Ça c’est fait naturellement et on a été un peu épaté quoi.

E Vous avez fait des choses ?

M Oui, c’est vrai qu’au départ, l'aînée, la première, on lui a lu des petits livres on a tout mis en place, pour résumer, on a un peu oublié et c’est elle qui progressivement est rentré, nous a sollicité énormément pour qu'on .... en fait parce que c’était vraiment un désir d’apprendre.

E Et si vous aviez une définition à donner sur le terme d’apprentissage de la lecture, qu’est-ce que vous diriez ?

M L’apprentissage de la lecture, c’est... c’est dur à définir... c’est ... le désir d’apprendre, désir de lire mêlé à l’attrait des lettres, des écrits... mettre du sens sur des dessins, quoi en fait. C’est marrant comme cela se fait naturellement en fait, je crois.

E Ça veut dire que vous avez commencé avant le CP ?

M Oui. Oui. Le CP ça a été une finalité pour elle. Oh oui, ça a été une finalité. Elle sait dit « je suis en CP, ca y est maintenant, je peux apprendre à lire » mais en fait elle était prête. Tout était mis en place.

E Qu’est-ce qui avait été mis en place ?

M Je crois que c’est ça, ce qui avait été mis en place, c’était « pourquoi j’ai envie d’apprendre à lire, à quoi ça sert de lire ». En fait c’est ça, c’est ça qui a été mis en place, tout au long de la maternelle et puis en grande section ça a commencé, grande section, CP et bien maintenant on va arriver à la technique. Le petit truc qui me manquait. Mais enfin la technique elle... moi ça m’a épaté, parce que la technique elle est venue toute seule, ça a été très rapide.

E Vous aviez mis des choses en place avant ? Qu’est-ce que vous faisiez comme actions pour...

M En fait, c’était d’une part, on lui a sûrement lu des livres très vite...

E C’est-à-dire à partir de quel âge ?

M Autour d’un an peut-être. D’autre part elle nous posait énormément de questions, c'est une enfant très curieuse donc on lui a toujours répondu à ses questions. Et puis après, progressivement... mais, c'est venu par rapport à l’écrit, c’est vrai quand on lisait, bon, des réflexions qu'elle se faisait par rapport aux mots qui étaient... un mot qu’elle retrouvait qui était écrit gros par exemple, ou des lettres qu’elle retrouvait, qui étaient dans son prénom et puis à chaque fois elle me demandait comment est ce que cela ça chante cette lettre... donc on lui répondait à chaque fois, inconsciemment, je pense que cela c’est mis en place comme ça. Et puis, le fait qu’elle a été inscrite à la bibliothèque très vite.

E Elle est inscrite à la bibliothèque, à l’âge de ?

M Trois ans. A la médiathèque, parce qu’on habitait à Saint-Sébastien et puis nous-mêmes on y était inscrit, donc ça c’est fait naturellement aussi. Elle a des abonnements...

E Elle a combien d’abonnements ?

M Elle en a eu deux, tout le temps. Un magazine et autrement des livres de " l'Ecole des Loisirs".

E Des livres que vous lui lisiez ?

M Oui. Disons que c’est autour d’un rituel. On lit dans la journée et puis il y a le rituel du soir, on choisit chacune un livre, donc il y a deux livres le soir.

E Pour retracer la famille, vous avez deux enfants ?

M Trois. L’aînée va avoir 7 ans, la seconde va avoir 5 ans et la petite dernière qui a eu 1 an.

E Et vous faites la même chose pour les autres enfants je suppose.

M Et même la deuxième, cela va presque plus vite. La deuxième a eu les lectures de l’aînée tout de suite beaucoup plus longues, bon elle les entendait, elle l’écoutait pas forcément jusqu’au bout au départ et puis après progressivement...

E Est-ce que vous continuez à raconter des histoires à la grande ?

M Oui, elle y tient. C’est autour d’un rituel, le soir elles savent, qu’avant de se coucher, elles ont droit à une histoire chacune, et comme on les lit ensemble, ça leur fait deux histoires.

E Alors qu’on pourrait penser que maintenant elle sait lire, on n’a plus besoin de la lecture.

M Mais je crois qu’on a un plaisir qui est différent. C’est-à-dire que là on est sur les genoux, c’est le petit moment où on se retrouve et ça permet aussi de parler d’autre chose quelquefois, autour du livre. C’est pas forcément... et puis c’est un plaisir d’entendre bien lire, d’entendre, on y met le ton. Ça lui permet aussi d’intervenir dans l’histoire, différemment que... Là, elle vit peut-être mieux l’histoire, parce que c’est vrai qu’elle a une lecture qui est encore assez... qui est pas très rapide et qui est plus attaché à tout ce qui est lettres et mots et donc elle a un petit peu de mal à prendre un peu de recul par rapport à sa lecture, c’est encore un peu trop frais. Mais je pense que ça risque de durer un moment... le plaisir d’être sur les genoux avec un livre.

E Ça lui plaît ?

M Oui, ça lui plaît, pour l’instant.

E Au niveau de la méthode de lecture qui est utilisée, qu’est-ce que vous en pensez, en tant que parent ?

M En tant que parent, c'est à dire que ça s'est passé. C’est pas très facile, avec Camille parce que disons à la Toussaint elle savait lire. En septembre, elle s’est dit « ça y est, je vais apprendre lire » donc elle était obnubilée par ça donc en très peu de temps elle a appris à lire, donc la maîtresse a été amenée à lui proposer autre chose, donc toute de suite elle lui a fait lire des livres, des petits livres, des histoires entières. Y’avait pas de méthode à proprement parler, quoi, qui passe par quelquefois le syllabique... donc en fait, nous on en est très content parce que c’est tout à fait adapté à Camille qui s’est jamais ennuyée et qui se trouve très très bien en CP, même ayant appris à lire très vite. Disons qu’elle fait autre chose.

E Autre chose que la méthode de lecture à proprement parlé.

M Tout à fait. Ça tout de suite été basé sur le sens, en fait. Elle est partie tout de suite partie sur des histoires, donc elle avait des questions sur ces histoires, elle avait dessiné ce qu’elle avait lu, des choses comme ça, c’était bien. J’ai trouvé bien, c’était tout à fait approprié à l’enfant.

E Donc elle a pas eu ce temps de méthode de lecture...

M Disons, elle y retourne de temps en temps parce qu’au niveau de l’écrit, cela peut lui poser des problèmes, donc elle revoit tous les sons, tous les différents AN, tout ça, avec les autres bien sûr. Elle est toujours en lien avec le groupe, mais elle lui propose autre chose donc c’est bien aussi.

E C’est-à-dire que les enseignantes on su s’adapter à l’enfant.

M Oui.

E Et vous trouvez ça bien !

M Oui. Dans le sens, on elle est toujours très très contente d’aller à l’école, même, elle est très contente de lire avec les autres, on a vu comment ça s’écrivait an aujourd’hui. Donc elle se trouve tout à fait à l’aise dans le groupe.

E Et au niveau de la bibliothèque, vous y allez souvent actuellement ?

M Alors on y va... on peut garder les documents un mois maximum, donc on y va entre trois semaines et un mois. Elles ont droit à 8 livres chacune, cinq livres et trois magazines, quelque chose comme ça.

E Donc une quantité...

M Oui, y’a quoi de faire.

E Elle a des livres aussi ici ?

M Oui, du fait de ses abonnements et puis aux anniversaires, souvent y’a un livre...

E Est-ce que vous pouvez chiffrer globalement le nombre de livres qu’elle a ?

M A quelque chose près de livre livre?

E Oui avec les magazines cela va faire plus.

.E Oui surtout qu'on en a achetés autrement en dehors des abonnements. Elle en a entre 100 et 150 peut-être.

E Qu’elle partage avec frère et soeur ?

M Ses soeurs, puisqu’elles sont trois filles. La petite a récupéré tous les livres en carton et donc, autrement c’est à peu près ça qu’elles se partagent entre toutes les deux. Y’a des livres dans les deux chambres, mais l’aînée c’est elle qui en a le plus dans sa chambre. Elle a tout gardé. Tout ce qu'elle a depuis sa naissance.

E Je vois que vous partez en voyage. Je change un petit peu de registre, est-ce que avant de partir vous faites une liste de tout ce que vous avez à faire, ou c’est comme ça ?

M Non je ne fais pas de liste.

E Est-ce que vous utilisez un calendrier ? un agenda ?

M Oui. Elle en a un dans sa chambre aussi

E Et vous ?

M Oui

E Vous y inscrivez les événements à venir, c’est votre planning ?

M Oui.

E Autrement, au niveau d’un pense-bête, vous utilisez ?

M Non.

E Quand vous faites vos courses, vous utilisez la liste de course ?

M Oui, pas toujours. Tout dépend du temps que j’ai. Si j’ai peu de temps je fais une liste mais sinon, pas forcément.

E Est-ce que vous tenez un livre de compte dans la famille ?

M Non.

E D’autres questions par rapport à vos habitudes, quand vous partez en vacances, vous prenez des photos, ou vous filmez, est-ce que vous classez tout ça ?

M Oui, c’est dans des albums.

E Et vos papiers administratifs, qu’est-ce que vous en faites, est-ce que vous les classez ?

M Ils sont classés.

E Oui, d’accord. Au niveau des recettes de cuisine, est-ce que vous les copiez ?

M Oui, j’ai un livre. J’ai un cahier.

E Aussi bien vous que votre mari, est-ce que vous lisez ?

M Ah! Oui Oui. Nous aussi, on a des abonnements. Et on lit tous les jours

E Tout à l’heure on parlait de l’histoire qui était racontée, qu’elle est la place du papa là dedans ?

M On fait, un soir sur deux. Chacun son soir.

E C’est-à-dire qu’il participe pleinement...

M Ah oui oui. C’est vrai que spontanément elles viennent demander une histoire ou ça arrive qu’elles nous voient en train de lire, bon, elles veulent une histoire elle aussi. Oui, ça peut-être à n’importe quel moment dans la journée. Cela peut correspondre à un moment où elles s’énervent, pour les calmer. Quelquefois elles ne savent pas trop comment s’occuper, ça permet de relancer aussi des moments de la journée. Oui oui! Tout à fait!

E Au niveau de la leçon le soir, comment cela se passe ?

M C’est-à-dire que le soir elles vont à la garderie. Quand on les récupère, c’est soit l’un ou l’autre, vers 5 heures et demie et toute de suite, elle aime bien nous lire son histoire qu'elle a à lire tous les soirs. Alors, là du coup c’est elle qui nous lit quelque chose. Mais c’est tout ce qu’il y a.

E Combien de temps passe-t-elle, un quart d’heure ?

M Même pas. Surtout qu’en fait, et en plus c’est même pas systématique, y’a des soirs où elle a pas envie. Donc, je pense qu’elle doit pas mal s’investir dans la journée, donc le soir... ou cela vient plus tard dans la soirée. Quelquefois, elle a pas avant de la faire, donc elle la fait, et au moment de lire l’histoire dans son lit le soir « ah, j’ai pas fait ma lecture » et puis il y a une petite angoisse. Donc elle va la chercher et on la lit toutes les deux. Mais...

E Ce sont des choses qui sont faites rapidement !

M Oui, très rapidement.

E Au niveau des jeux, est-ce que votre enfant joue à des jeux « éducatifs », comment ça se passe ? Quels sont ses jeu en général?

M Ses jeux. C’est une fana des jeux de cartes. Donc tous jeux de société et puis elle joue bien avec sa soeur. Elles ont deux ans de différence, la plus jeune, elle s’y met aussi. Donc à deux, c’est plus facile, parce que nous ça nous permet de nous dégager aussi, donc elles jouent beaucoup aux cartes... le nain jaune... mille bornes... le rubi-cube, des choses comme ça. Elles sont très jeux de société.

E Et puis aux poupées aussi ?

M Ah oui. Ça c’était pour parler de tout ce qui était jeu de ... jeux de poupées, alors, poupées.. marchandes... il leur faut beaucoup d’espace quand elles jouent. Donc les chambres deviennent des pièces... Autrement, elles sont très vélo, tout ce qui est jeux dehors, parce qu’on a la chance d’avoir un jardin, donc elles y sont très souvent. Là je pense plus aux jeux de société parce que cet hiver c’était vraiment leur truc... mais ça correspond aux saisons aussi. Là elles commencent à sortir.

E Vous jouez avec eux, ça vous arrive ?

M Oui.

E L’un ou l’autre.

M Oui, ou tous ensemble. Surtout... j’ai plus ça en mémoire, parce que l’hiver c’est plus des occupations très importantes mais sinon... c’est vrai que là maintenant, c’est vrai qu’elles sont plus dehors maintenant.

E Vous jouez avec eux.

M Oui. Mais elles jouent bien toutes les deux. Aussi, quand elles jouent toutes les deux, elles sont en bas, à côté de nous.

E Y’a toujours une présence.

M Oui, elles aiment bien parce que... elles sont très dessins. Elles font énormément dessins, des dessins on en a.. Elles sont très dessins.

E Elles écrivent beaucoup ?

M Camille, elle commence à écrire ... non elle écrit pas sur son dessin.

E Davantage du dessin.

M Oui, elle écrit un peu, parce qu’en haut elle a un tableau, elle écrit de temps en temps. Non, non c’est des dessins.

E Je vois qu’il y a un ordinateur ici, est-ce qu’elle utilise l’ordinateur ?

M Elles ont eu deux CD-ROM à Noël. Donc, là ce sont des histoires ou il faut... c’est à partir de .. j’aime lire... là pour l’instant elle écoute les histoires. Y’a des histoires qui sont entières qui sont racontées mais après y’a possibilité de se raconter, de prolonger l’histoire en inventant la suite... mais pour l’instant elle n’a pas envie de ... d’y toucher. Autrement, elle a eu des petits jeux.

E Des choses qu’elle utilise régulièrement, ou qu’elle utilisait avant ou c’est récent ?

M C’est récent. On l’a eu depuis la rentrée Septembre. C’est pareil ça a été pas mal au début, autour de Noël, mais ça y est, c’est passé, ça va, ça vient. Ça lui prend dès fois, si l’après-midi est un peu plus long, c’est vrai que les activités, ça changent encore beaucoup... donc là des fois elle a envie de venir, mais cela ne dure pas très très longtemps parce que elle se retrouve toute seule, je crois que c’est ça aussi, face à son écran, elle est un peu toute seule, elle aime autant les autres jeux parce que cela lui permet de jouer avec sa soeur ou avec nous.

E Et au niveau de la place de la télévision dans votre famille ?

M Alors... pour l’instant elles ne la regardent pas en fait. Ce qu’elles regardent, on doit avoir deux cassettes de dessins animés, deux Walt Disney, donc cela leur avait été offert, sinon elles n’ont pas l’habitude de regarder la télé le soir, ni le mercredi. Elle la regarde quelquefois le matin, parce que le matin elles ont parfois dix minutes avant de partir.

E C’est une chose régulière ?

M Non, pas du tout, c’est très occasionnel. Ça dépend si un matin, il s’est trouvé qu’elle était prête plus rapidement et puis, nous on a un petit peu de temps pour faire autre chose, c’est vrai que quelquefois elle demande. Non, non c’est très occasionnel.

E C’est un petit peu réglementé chez vous ?

M Ah non, pas du tout. Non. Elles ne le demandent pas. C’est vrai que nous, on ne la regarde que quand elles sont couchées en fait le soir, donc, c’est vrai qu’elle est pas allumée dans la journée. Et puis elles n’ont pas l’habitude, comme y’a pas d’émission qu’elle regarde régulièrement, elles n’en font pas la demande...

E ... systématiquement.

M Oui, oui c’est vrai. Maintenant on commence à être un peu plus attentif mais pour ça faut avoir un programme télé plus détaillé par rapport à des émissions qui sont intéressantes, notamment sur la 5. Mais faudrait prendre le temps de regarder le programme. C’est vrai qu’on ne prend pas le temps de le faire, donc voilà, en fait on ne la regarde pas.

E Pour revenir à l’histoire racontée le soir, est-ce que vous pouvez réexpliquer pourquoi vous racontiez des histoires le soir ? Quand vous avez commencé au départ ...

M Pourquoi, quand... Ça correspondait au moment du soir, c’est calme, je trouve que c’est un moment propice...

E le soir ou le matin peu importe mais pourquoi est-ce que vous le faisiez ?

M Pourquoi ? Je sais pas. Déjà moi, j’ai toujours lu avant de m’endormir donc je pense, que moi, lire une histoire sans dormir... ça correspondait quand même plus au soir, donc je me disais, bon ça va... la nuit va être meilleure, ça va permettre de partir avec des images plein la tête. Mais en fait, quand elles étaient toute petites, on en lisait, parce qu’elles venaient sur les genoux, donc ça permettait d’avoir aussi un câlin. Camille était très très indépendante, donc c’était un moment qui permettait de l’avoir un peu avec soi. Elle a marché très tôt, elle a été très vite indépendante, et puis elle aimait pas trop ça les câlins. En fait, oui, ça peut-être été aussi un moyen de l’avoir aussi sur les genoux et puis après, ça c’est prolongé... et puis on savait, nous le plaisir qu’on avait à lire donc on se disait donc forcément qu’elle allait trouver du plaisir. Et puis cela avait l’air de lui plaire, donc ça nous engageait à continuer.

E Ça vous engageait à continuer...

M Oh bah tout à fait.

E Ça lui plaisait ?

M Oui, ça lui plaisait et puis ça leur plaît toujours. Quand on va à la médiathèque, on y passe bien plus de temps qu’on voudrait, nous. Parce que faut lire d’abord les livres là-bas avant de les relire ici, donc, ça prend un peu de temps mais ça fait partie des activités du mercredi souvent.

E Vos enfants font beaucoup d’activités autrement ?

M Y’a que l’aînée qui fait du sport le mercredi matin, du multisports...

E Sur Basse-G.

M Sur Basse-G.

E Entre vous et votre mari, faites-vous de petits mots quotidiens ?

M Oui, ça nous arrive de laisser des mots mais c’est pas... non, c’est pas systématique mais ça arrive occasionnellement, oui c’est pareil. Autour du bureau, on laisse des choses...

E C’est une pièce importante là où on est dans ce bureau ?

M Nous, on y passe beaucoup de temps, donc c’est vrai que les filles viennent du fait de l’ordinateur, maintenant, un petit peu. Mais c’est vrai que nous, soit l’un, soit l’autre, on est souvent là.

E Elles viennent souvent ici...

M Oui, elles savent qu’on est là, donc elles viennent, elles aiment bien voir ce qu’on est en train de faire, des choses comme ça.

E Des questions, plus en rapport avec la vie générale de la famille, quelles sont vos exigences par rapport au travail scolaire ? Par rapport à la scolarité générale de l’enfant.

M Nos exigences, c’est-à-dire... je ne sais pas si on n’a vraiment d’exigences, parce qu’en fait... on fait confiance quelque part. Jusque là, on a toujours été satisfait de ce qui leur avait été donné, oui, plus ou moins. Pour Camille, souvent très bien... je trouve qu’on a su prendre en compte vraiment sa personnalité. Je trouve que c’est surtout ça qui m’a plu dans les... dans la relation qu’elle a pu avoir avec les enseignants qu’elle a eus. Parce qu’en fait, c’est une petite fille qui est assez angoissée, qui se pose beaucoup de questions. Je trouve que ça a été très très bien perçu et on a su la... l’entourer, la rassurer, tout ça. Je trouve que c’est important. Surtout qu’elle est très exigeante par rapport à son travail. Nous, ce qu’on voulait justement c’est que... qu’elle se laisse respirer un peu, qu’elle reste petite fille, elle était en maternelle, qu’on la laisse grandir.

E Une petite qui a envie de grandir...

M Oui, un peu trop dès fois. L’année dernière, avec l’enseignant, j’avais beaucoup parlé, j’étais en congé maternité, ça tombait bien. Mais, par contre, ce que je trouve intéressant au niveau du travail scolaire, c’est prendre l’enfant vraiment où il en est, c’est-à-dire que, je vois Camille, elle avait envie de faire des choses au niveau scolaire, donc l’enseignante lui proposait aussi. Je pense que, autrement, elle se serait un peu ennuyée, donc fallait bien gérer ça, fallait pas trop lui en donner, parce que je trouvais qu’elle s’en donnait suffisamment elle mais fallait pas lui faire baisser son intérêt pour la suite.

E Est-ce que dans la maison, vous avez ce qu’on pourrait appeler « des règles d’éducation » ?

M Sûrement, oui.

E A quoi vous tenez par exemple ?

M A quoi on tient ?

E Dans le quotidien?

M Dans le quotidien, oui, tout ce qui est autour de la politesse, du respect de la personne, du respect de son travail, de son... et beaucoup, ... ce qu’elle nous renvoie quand elle revient de l’école, moi ce qui me gêne un peu, quelquefois, « bah tu sais, y’en a un, il a pas réussi, vraiment c’était facile, il a pas réussi sur... » c’est ce côté compétition qui est un peu, on a du mal à leur faire comprendre que chacun va à son rythme et que chacun en est là où il en est et s’il a pas réussi aujourd’hui, il réussira demain quoi. Je trouve que dans leur tête d’enfant ils ont déjà ce souci de comparaison et d’évaluer l’autre tout le temps. C’est un peu... c’est un peu énervant. Le soir, au moment des repas, on est souvent obligé de remettre ça à plat. C’est là qu’on se parle davantage, même la petite qui n’a que 5 ans, est capable de redire des choses comme ça, je trouve ça un peu..

E Disons que ça se passe dans le débat familial...

M Oui, mais c’est vrai que souvent on est obligé de remettre des pendules à l’heure, autour de ça. Je trouve que c’est quelque chose qui est important, le respect de l’autre, aussi bien dans sa différence que...

E Est-ce qu’il vous arrive autrement de contrôler son travail ? Vous avez parlé un petit peu mais comment est-ce que vous contrôler son travail ?

M Oui, dans le sens que dès qu’elle rapporte quelque chose de l’école, elle me montre ce qu’elle a fait et elle nous réexplique, y’a des choses où elle a pu se tromper, des choses comme ça, de voir si elle a su pourquoi elle s’était trompée, si elle souvient, des choses qui lui ont plu par rapport à ce qu’elle a fait. Oui, bien sûr, on regarde ce qu’elle fait. Et puis d’ailleurs elle a à coeur... à coeur et pas à coeur... parce que j’ai l’impression qu’elle fait bien la part des choses entre l’école et la maison. Quelquefois elle rentre de l’école, elle pose son cartable et puis l’air de dire c’est terminé, maintenant je suis à la maison et puis ça revient un peu plus tard. J’ai l’impression qu’il y a un moment quand elle rentre le soir, qu’elle a besoin de faire un break...

E de couper...

M oui.

E C’est quelque chose que vous respectez en fin de compte ?

M Oui, oui. C’est pour ça que certains soirs elle va prendre son livre spontanément pour faire sa lecture et puis d’autres soirs où elle sera pas du tout décidée... mais c’est vrai qu’on en avait parlé avec l’enseignante qui disait que le travail du soir, c’était pas du tout, pour elle, cela n’avait pas un caractère obligatoire, on le fait si on en a envie. C’est vrai que les journées sont suffisamment longues pour se permettre des tolérances comme ça.

E Quand vous dites « on », vous associez aussi votre mari ?

M Oui, oui. Parce qu’en fait quand on va voir l’enseignante, on est toujours tous les deux.

E Et c’est quelque chose que vous faites souvent ?

M Non.

E Ou d’un point de vue informel ?

M Oui, là ça correspondait plus... on est allé vers le mois de décembre parce que ça correspondait à un moment où Camille était bien fatiguée, elle voulait plus aller à l’école. Je pense qu’elle s’était bien donnée et puis, le mois de décembre était un peu long. On était allé pour ça... parce que le matin elle avait du mal à partir... donc ça correspondait plus... on se disait elle avait peut-être envie, elle, qu’on aille voir ce qui se passe. Et je crois que c’est Camille, c’est la maîtresse qui avait dit à l’école «  il serait bien que je commence à voir vos parents ». Elle m’avait dit au début de l’année, bon c’est pas la peine de venir tout de suite. Et je pense que Camille avait dû me le redire ça, et puis comme ça lui tient à coeur, elle avait dû nous relancer... et puis ça correspondait à un moment où je pense qu’elle en avait besoin.

E Au niveau de la famille, qui décide, qui organise les différentes tâches à la maison ? C’est partagé ?

M Oui, c’est tout à fait partagé. Comme on a la même profession donc on a les mêmes horaires, donc c’est bien partagé... y’a pas de tâches particulières qui reviennent plus à l’un qu’à l’autre. Sauf tout ce qui est autour de la voiture, là pas du tout... mais sinon, sinon.

E Pour le talon sociologique, votre année de naissance ?

M 1963.

E Votre mari.

M 1967.

E Vous êtes propriétaire depuis ?

M 2 ans.

E Au niveau du salaire mensuel, entre 5 et 10.000, 10 et 15, entre 15 et 20...

M Entre 10.000 et 20 000

E Vous travaillez tous les deux à mi-temps ?

M A temps complet tous les deux.

E Je pense qu’on a fait le tour. Est-ce que vous auriez quelque chose à rajouter ?

M Non, je vois pas trop. Hormis le fait, pour revenir à l’apprentissage de la lecture... Ce qui me gêne dans cet apprentissage, c’est le côté réglementaire, un peu. Dans le sens, où il est décidé qu’à un moment donné, un enfant doit apprendre à lire alors qu’en fait certains sont prêts plus tôt et c’est dommage qu’ils soient freinés et d’autres ça viendrait peut-être plus tard. Je trouve dommage que certains subissent un échec, l’échec de cet apprentissage, parce qu’ils sont pas prêts lorsqu’ils arrivent en CP. Ça... c’est plus ça que je remettrais en question quoi. Je trouve qu’on n’arrête pas d’en parler, qu’on en parle... qu’on en parle quoi.

E Et on fait pas grand chose.

M Si, dans le sens, comme je disais par rapport à Camille, si cela a été pris en compte du fait que... elle était prête à apprendre à lire, elle a appris à lire et ça a été pris en compte... mais c’était plus facile de le prendre dans ce sens là, parce que bon, un enfant qui sait lire, après on lui donne une petite activité, il se débrouille tout seul. C’est plus dans l’autre sens, un enfant qui arrive en CP et qui n’est pas prêt, il lui manque peut-être pas grand chose...

E D’après vous, qu’est-ce qui a fait que Camille est allée très vite dans son apprentissage de la lecture ? En deux mois...

M Parce qu’elle avait très envie quoi. Je crois que l’envie, ça fait 80 % et puis après... elle nous avait tellement demandé,  « je comprends pas parce que dans ce mot là, tu viens de me dire maman, je vois deux A et je n’en entends qu’un », donc on est amené à dire, oui parce que le A quelquefois avec le N il se change en AN et puis ça s’est fait comme ça, elle avait tout intériorisé...

E Mais, qu’est-ce qui a fait qu’elle a eu envie, comme ça ?

M Parce que je crois qu’on lui a mis plein de livres. Et puis, elle a vu les livres, y’avait ça parce que d’abord on se faisait plaisir et puis lire, ça pouvait permettre aussi de faire plein de choses, parce qu’en fait on les emmène partout. Quand on fait les courses, on lit les prix et puis, elle me demandait... La lecture ça sert tout le temps. C’était les panneaux quand on partait en vacances. On se disait pour passer le temps. On regardait les panneaux et sous forme de jeux... c’est vrai que la lecture, elle s’est vite rendue compte qu’on s’en servait tout le temps.

E C’est une imprégnation à long terme.

M Oui, moi je crois. Et je pense qu’un enfant à qui on a proposé justement, pas imposé, ça se fait naturellement, apprendre à lire, c’est quelque chose assez naturel, mais y’a tellement de choses à mettre en place avant, c’est ça. Y’a des enfants qui arrivent, à qui on a pas proposé ça, ils se retrouvent après en décalage, et puis ils ne sont pas prêts quoi. L’école elle doit justement leur permettre de pouvoir rattraper ce décalage.

E C’est votre conviction.

M Oui, je pense. Et en fait, je pense qu’il y a des enfants qui arrivent à l’école et qui disent, tiens on va apprendre à lire, à faire des choses...

E Et puis y’en a d’autres...

M Y’en a d’autres qui arrivent et puis « c’est maman qui a dit que j’allais aller à l’école parce que j’ai trois ans ». Mais bon qu’est-ce qu’on va y faire, alors là ?

E C’est-à-dire que vous situez davantage l’école dans une continuité de travail qui a déjà été entamé par la famille ?

M Oui, quelque part, oui sûrement. Et puis l’école, c’est pas l’endroit du savoir, et du tout pouvoir et du ... je trouve que ça s’inscrit dans la vie de l’enfant et faut pas qu’il y ait cette barrière quoi.

E Vous ne mettriez pas la responsabilité de l’éducation de l’enfant à l’école ?

M Non, non non. Parce que je crois que c’est là que justement dès fois, on peut arriver à un échec, dans le sens où l’école est présentée comme l'autorité ou comme « tu verras, quand tu seras à l’école, tu pourras pas faire ça »... non, là c’est peut-être plus l’enseignante qui parle, mais je trouve que c’est un peu ça et c’est une fausse image qu’on se fait de l’école quelquefois. C’est difficile.

E Un détail, j’ai oublié vos diplômes ?

M Le plus élevé, mon diplôme d’instit.

E Vous avez un DEUG en sociologie ?

M Oui.

E Votre mari ?

M Pareil, DEUG de sociologie et école d’instit.

E Je vous remercie. C'est dommage que votre mari n'ait pas pu participer.

M C'est vrai, mais on a une fille qui est malade et on prépare tout de même notre départ en vacances.