Entretien n° 23 avec Famille FRANC

Le 4 mars 1998

E Ils n’ont pas fait les mêmes méthodes de lecture ?

M Si, ils ont fait les mêmes méthodes de lecture, je crois, Adrien et Jérôme, mais Ludovic, je ne me souviens pas, il ne me semble pas que c’était vraiment la même méthode, c’était globale... c’est pareil il me semble. Ce que j’ai trouvé en grande section, je me rappelle, les deux aînés ont 5 ans, déjà j’avais gardé les cahiers des plus grands, et ce que le grand faisait en CP, il le faisait déjà en grande section, donc l’apprentissage de la lecture s’est fait beaucoup plus rapidement en CP. En 3 ans, entre Adrien et le dernier, j’ai trouvé encore une autre évolution. Moi qui m’occupe plus des .........., c’est ce que j’ai dit à la maîtresse de grande section d’ailleurs. J’ai dit « mais même en trois ans, déjà en cinq ans j’avais trouvé, c’était la même maîtresse, c’était la même école, si déjà j’avais trouvé un changement, là c’est vraiment, ne serait-ce que la lecture, les tables., l’année dernière il faisait des trucs... bon c’était sous forme de jeux mais pour moi ça ressemblait à des tables d’addition ». Elle m’a dit : «  ben oui, mais je suis obligée de suivre l’évolution  ! ». Ça fait plusieurs années qu’elle enseigne elle m’a dit : « je suis bien obligée de suivre... ».

E Et c’est dommage un petit peu,...

M Oui.

E Pourquoi vous trouvez ça dommage?

M Ben, je trouve que, bon, c’est bien, dans le sens que, c’est vrai qu’arriver au bout de trois ans de maternelle ils en ont marre aussi, c’est l’histoire des cycles aussi, c’est vrai que maintenant c’est différent. Y’a des passages, le grand n’a pas connu les cycles. Ça n’existait pas. Le deuxième l’a connu et le troisième est en plein dedans mais... je veux dire qu’en fin de compte c’est bien parce que dans le sens, je vois le grand, arrivé en grande section, il en avait marre aussi de jouer, il voulait apprendre mais c’est dommage dans l’autre sens parce que je trouve que c’est vraiment les pousser. Ceux qui suivent, ça va, mais ceux qui ont des difficultés, moi j’ai peur que ça les enfonce encore plus.

E Et votre dernier, comment il se situe ? Il suit ?

M Lui, oui. Y’a pas eu de problèmes. Mais bon déjà avec les deux autres devant, il cherchait à apprendre mais à la limite je trouve que c’est un peu dommage. C’est devancer les étapes pour moi, moi je vois cela comme ça.

E Et vous pensez que vos deux aînés ont favorisé...

M Oui, le fait que...

E Et en quoi l’ont-ils favorisé ?

M Déjà le fait de les voir lire, il voulait lire, il cherchait. Nous, il nous demandait qu’on lui lise des histoires. Comme il apprenait certains mots, il essayait de les retrouver, déjà en grande section, l’année dernière...

E Vous lisez des histoires à Jérôme ?

M Oui.

E Depuis quand ?

M Depuis tout petit. Tous les soirs (sur un ton d'évidence).

E Tous les soirs.

M Pratiquement, sauf les soirs où on n’a pas trop le temps. Dès fois ça arrive parce qu’il y a des réunions...

E C’est vous madame, ou vous monsieur ?

M C’est moi. C’est moi qui arrive la première et même le soir avant de se coucher c’est souvent moi. A tel point que le matin, le petit ne voulait pas faire les devoirs avec son père. Maman : « c’est à toi ». « Oui, mais maman peut un jour ne pas pouvoir les faire ». « Mais, oui, mais papa il fait pas comme toi », « Forcément ! ».

E (s'adressant au mari) C’est vous qui vous occupez du travail d’école aussi ?

M Oui. T’es déjà pris par ton travail, tu ne rentres pas toujours à la même heure.

E Vous êtes plus disponible ?

M Oui, le soir. Disons que, on se partage les tâches aussi parce que mon mari fait la cuisine pendant que je fais les devoirs donc...

E D’accord, y’a un partage des tâches.

M On est obligé de toute façon.

E Quand on vous dit « apprentissage de la lecture », qu’est-ce que cela évoque pour vous? Si vous aviez une définition à donner de l’apprentissage de la lecture ? Votre expérience de parents...

P On essaye de déchiffrer les mots, savoir connaître leur sens.

M Pas forcément le sens au départ.

P Comment est formé un mot, la structure des mots, des sons...

M Ou la structure de la phrase, savoir qu’il y a une majuscule au début, un point à la fin... Quand il y a un nom propre, si c’est un héros du livre, ils voient bien qu’il y a une majuscule et que c’est pas écrit pareil.

P C'est à dire qu'ils apprennent d’abord des sons, c’est la phonétique comme quand on apprend une langue étrangère, c’est pareil, on apprend d’abord la phonétique et ensuite on apprend à les écrire. Donc il y a deux étapes, y’a le son, ce qu’on entend et ce qu’on voit sur le papier. Donc, l’apprentissage de la lecture, la lecture normalement c’est ce qu’est écrit, ce qui n’est pas oral.

E Vous faites une distinction.

P Oui.

E Vous lisiez des histoires à vos enfants régulièrement ?

M Oui, et puis j’ai un mari qui est féru de lecture donc automatiquement ils le voient. Moi, je lis moins, je me force à lire, mais c’est vrai que, y’a la bibliothèque, on a pas mal de bouquins, histoire, la géo...

P .Y'a la bibliothèque de G.

M C’est beaucoup d’histoire, de géo, de documents, pour les enfants aussi parce qu’on a toute une collection de Larousse, de l’Univers.

E Vous êtes un grand lecteur vous ?

P Ah oui, j’ai toujours lu et j’aime lire, une à deux heures par jour. Tous les jours.

M Le soir, tu ne t’endors pas sans avoir...

P ...lu quelques pages. Même si il est minuit, une heure, c’est rare que je ne lis pas dix pages avant de me coucher ou vingt...

E Et qu’est-ce que vous lisez ?

P Surtout l’histoire, ce qui se rapporte à l’histoire. La guerre de Vendée, l’histoire de la région...

E Ça vous intéresse. C’est votre pôle actuellement ?

P Oui, tout ce qui s’est passé dans la région pendant la guerre de Vendée.

E Et vos enfants vous voient lire ?

P Ah oui, de toute façon, tantôt je les ai menés chez le dentiste, dans la salle d’attente, moi j’amène un bouquin et je lis.

M Et le petit d’ailleurs a emmené son livre.

P Ah lui, lui aussi.

M Il nous avait fait rire parce qu’il a dit : « cette fois-ci maman, tu ne me le lis pas, la maîtresse elle a dit d’essayer de le lire tout seul ». Ils ont des étapes aussi. Celui qui a 14 ans, il a plus de devoirs, et il prend moins le temps de lire et c’est vrai qu’il lit moins qu’il a fait.

P Même en vacances, j’emmène toujours un bouquin. J’emmène un ou deux bouquins avec moi. Si je vais sur la plage, je lis. Si je vais dehors, je vais dans le hamac, je ne m’endors pas et je lis. Je ne lis pas le journal, les magazines rarement.

M Moi qui n’aimait pas lire et bien il m’a donné l’envie de lire. C’est vrai que je ne lis pas beaucoup par rapport à toi. C’est vrai que je me lève de bonne heure le matin, donc le soir...

E Vous êtes fatiguée.

M Oui. C’est vrai que les enfants... Mme B. avait fait un sondage, c’était... Adrien était en CP, donc ça remonte à 3 ans, elle avait fait un sondage sur les enfants qui regardaient la télé ou qui lisaient le matin. Et sur 20, y’en avait trois qui lisait le matin. Les autres regardaient la télé le matin avant de venir à l’école.

E Et qu’est-ce que vous en pensez vous ?

M Je suis pas d’accord parce que justement dans le lot, y’avait mon gars qui lisait ou qui faisait un dessin, qui s’occupait quoi, ou il relisait ce qu’il avait à apprendre. La maîtresse, y’avait des parents qui lui avait reproché de... de y’avait été à la réunion des parents... tu sais, cela lui avait été reproché... tu sais, les parents. Face à la télé justement, qu’elle n’avait pas à poser cette question là. Elle, elle l’avait fait dans le but, comme ça, à titre gratuit et des parents lui ont reproché...

E Comme si il y avait une opposition entre la lecture et la télévision ?

M Pour eux, il m’était l’enfant devant la télé et c’était un moyen soi-disant de se détendre. Moi, je sais qu’ils regardent la télé, c’est vrai... Le matin non, je ne suis pas d’accord. Le soir, bon passe. On a compris après...

P On a jamais laissé d’enfants tout seul le matin. On a la chance d’avoir quelqu’un à domicile les garder, les emmener à l’école et tout ça, donc c’est différent aussi.

M Oui, mais je pense qu’on ne les a jamais habitué à regarder la télé le matin non plus.

P Le mercredi, dès qu’ils se lèvent, ils regardent la télé, ça ou l’ordinateur, c’est l’un ou l’autre.

M Là, on se gendarme.

E Vous avez un ordinateur ?

M Oui.

E Un pour trois enfants.

M Oui, ils n’en ont pas chacun un. Déjà c’est déjà pas mal.

E Et Jérôme s’y met ?

M Oui. Le grand lui a adapté quelques petits jeux. J’ai un neveu qui lui a passé des jeux d’enfants, alors il est tout content parce que ça c’est des jeux à lui.

E Jérôme regarde souvent la télévision ?

M Le mercredi et le dimanche, sinon non.

P Pendant les vacances et en revenant de l’école, il regarde peut-être une demi-heure.

M Déjà j’arrive, il sait qu’on fait les devoirs.

E Et ses devoirs, comment ça se passe ?

M Hier soir, je me suis fait attraper, j’ai dit : « c’est mardi, tu les feras demain matin avec papa ». Il ne voulait pas les faire avec son père et c’est vrai... « non tu les feras avec papa, maman est fatiguée ce soir », « oui, mais papa il fait pas comme toi », « oui, mais peut-être mais un jour ou l’autre, je peux être absente aussi, il faut que tu t’habitues ». Et puis je suis arrivée du boulot : « maman, j’ai fait mes devoirs avec papa ».

E Généralement, ça se passe quand ?

M Quand j’arrive à 6 heures du boulot.

E Ça se passe bien ,.

M Oui, y’a pas de problèmes. Il sait déjà avant ce qu’il y a à faire, j’ai même pas besoin de regarder dans le cahier. Je regarde par acquis de conscience mais il sait très bien ce qu’il a à faire.

E Il passe combien de temps, un ¼ d’heure, une ½ heure ?

M Un ¼ d’heure sauf quand il y a une poésie à apprendre.

E Là, c’est un petit peu différent.

M Y’a dès fois, au bout de deux jours la poésie est sue. L’autre fois il y en avait une qui était un peu plus longue et il avait décrété qu’il n’arriverait pas à l’apprendre. Son frère le grand était malade, et il avait des poésies à choisir, et justement la poésie qu’il était en train d’apprendre était dans le lot des poésies à choisir en CM1. Donc il a été malin, « tu sais maman il a quinze jours pour l’apprendre, moi, je l’ai eue dans mes poésies, je l’ai prise celle là comme ça on va l’apprendre ensemble ». Et c’est vrai que le petit il a bien appris avec son frère.

E Il y a une coopération entre les enfants.

M Ah oui, pour ça.

P Par exemple, il regarde « télé 7 jours », il voit que les images, mais si il veut voir le film, parce qu’ils ont droit de regarder la télé le mardi soir et le samedi soir, si on est là et si on a personne. Il va essayer de voir ce qu’il y a comme film, il va essayer de découvrir. Si il y a des mots qu’il n’arrive pas à comprendre, il demande à ses frères de lui lire. Je vois dans la voiture, quand on allait à Nantes chez le dentiste, tous les mots qu’il n’arrivait pas à déchiffrer, il demandait au grand.

M Il a une soif d’apprendre.

E C’est un garçon qui a envie d’apprendre des choses ?

M Oui, je pense. Il a envie que ça soit parfait. Quand il ne réussit pas, il se culpabilise, il se renferme et puis... on a l’impression qu’il se punit lui-même. Alors je dis : « non, c’est pas parce que t’as fait une erreur... » mais non, mais pour lui ou alors il va me dire : « maman, l’évaluation c’était dur » et puis en fin de compte l’évaluation elle est bonne, mais si il bute sur un truc, il va...

E Il va un peu se bloquer. Et quand il joue à quoi aime-t-il bien jouer ?

M Ah, raconter des histoires, on entend des histoires lues ou vue à la T.V..

E A quoi joue-t-il, ses jeux favoris ?

M La bagarre avec ses autres frères, ça ils connaissent.

E Il aime bien le contact physique.

M Il joue au foot avec le deuxième, aux voitures, construire avec des légos... Mais il s’invente des histoires, il aime bien inventer des histoires, il aime bien dessiner.

E Tout à l’heure, vous disiez qu’il jouait à l’ordinateur. Est-ce qu’il joue à des jeux de société ?

M Oui, c’est ce qu’il nous a demandé à Noël. Un jeu avec plein de jeux de société. Vous savez, les grandes boites avec le jeu de petits chevaux, de dames, le jeu d’oie... la bataille navale. Il joue à des jeux de société, "pro action"........ son football, le foot, c’est avec son frère... Il joue au baby-foot. Des fois, ils jouent à l'instituteur

E Est-ce qu’il joue avec vous à des jeux ?

M Non ! pas forcément. Si, de temps en temps, ça leur arrive, au Monopoly... ça fait longtemps... parce que c’est long le Monopoly. Mais le petit, il ne joue pas. On joue avec lui.

P Il fait la banque. Il donne un billet de telle catégorie... C’est lui qui donne les billets. C’est un jeu que j’adore, parce qu’il faut calculer, c’est un jeu d’argent... y’a des recherches, c’est pas un jeu bête, il faut réfléchir.

M Sur l’ordinateur, ils ont un jeu sur Indiana Jones, il faut chercher des trésors... ils sont passionnés de ça...

E Et Jérôme s’y implique aussi ?

M Oui, ils sont tous les trois autour de l’ordinateur en train d'essayer, il faut faire comme ci ou comme ça..

P Hier c’est le deuxième qui a réussi à aller le plus loin dans la recherche.

M Le dernier n’arrive pas bien à manipuler, il va pas assez vite, ou il clique trop fort... il laisse cliquer les autres mais il leur dit, y’a des choses que c’est lui qui trouvent par rapport aux grands.

E On sent qu’il y a une coopération...

M Entre les frères oui. Ça n’empêche pas des éclats de voix.

E C’est normal. Ça vous est arrivé de rencontrer l’enseignante par rapport au travail ?

M Non, pas spécialement. Au début de l’année, elle connaissait déjà le deuxième. Quand elle est arrivée à G., c’est lui qu’elle a eu en premier peut-être bien. Je ne sais plus. Donc, elle le voyait donc elle le connaissait. Elle m’avait dit « si y’a pas de problème, je ne vois pas l’utilité... », on est allé à la réunion de classe, c’est vrai, on a discuté après un petit peu, comme elle disait : « si vraiment y’a un gros problème, d’accord »...

E Y’a pas de problèmes, c’est un enfant qui marche bien.

M Apparemment non. Oui c’est un enfant qui marche bien. La semaine dernière ils ont fait la fête des grands-mères, je ne sais pas si vous avez vu sur FR. 3.

E J’y ai contribué un petit peu, j’ai soulevé des tables, ils ont emprunté du matériel chez nous.

M Justement, ma belle-mère faisait partie des mamies. « Tu te rends compte, mamie elle écrivait avec une...... plume ». Et quand je lui ai dit qu’on écrivait avec ça, c’était pas vrai. « Papa et toi vous n’avez pas écrit avec ça ». « Tu sais papa il a encore ses cahiers d’école, je vais te les faire voir ».

P Il est parti voir si il les trouvait...... On avait encore l’encrier, les grandes tables où on se mettait quatre avec un banc, on n’avait pas de dossier. On allait à sa place un encrier en porcelaine. J’ai connu ça.

E Moi aussi j’ai connu. Il était content de faire ça.

M Oui oui, je crois que c’est un truc qui leur a bien plu. Je crois que Chantal était très contente de l’expérience. Justement, j’y suis allée la semaine dernière, mardi matin, parce que j’avais vu dans le livre de lecture qu’il parlait des facteurs. Jérôme m’a dit, « j’ai dit à la maîtresse que tu n’étais pas factrice mais que tu travaillais dans un bureau de poste ». Tu peux dire à Chantal que si elle veut venir visiter le bureau, avec la classe de Stéphane ils sont venus visités le bureau, les gamins ils aiment bien, je suis allée la voir justement pour lui en parler. Elle m’a dit : « je suis en plein dans la fête des mamies, c’est une idée à retenir mais pour l’instant, je n'y pense pas.. ».

E Donc vous êtes en lien un petit peu avec l’école, pas forcément pour parler du travail de Jérôme... (s'adressant au père) vous également, moins ?

P Si. A la kermesse, je participe. J’ai un stand.

M Et puis je fais partie des parents d’élèves.

P De l'A.P.E.L.

M Donc, j’ai arrêté cette année, mais ça me prenait du temps...

E Vous êtes une femme engagée...

M Oui, j’estime.

P J’ai été vice-président de la garderie périscolaire de G. pendant 8 ans...

M Tu fais partie de la bibliothèque aussi.

P Oui, je vais partie de la commission municipale, gestion patrimoine et culture. Là, ils ont demandé pour aller au musée des beaux-arts. J'ai pris une journée pour y aller, je ne sais pas parce que en Peinture, tout ce qui est art, ça m’intéresse beaucoup mais faut voir ... il n’y aurait pas assez de parents... alors il y aura une réunion de préparation... ce sera des recherches à faire sur la peinture et comment les amener à aimer la peinture. Après y aura un programme de fait, par catégorie, ce sera des questions à faire, faudra qu’ils trouvent les réponses, là-bas, dans les salles d’exposition, je pense que c'est un genre comme ça...

M On tient quand même à participer. D’ailleurs, au niveau de l’A.P.E.L., on avait fait il y a quelques années une réunion sur la lecture. On s’était rendu compte qu’il n’y avait pas beaucoup de parents qui étaient intéressés. Sur une centaine de familles, y’avait peut-être dix familles, on enlevait les bureaux d’A.P.E.L., les bureaux d’OGEC, ça faisait pas beaucoup de monde.

E Quel est votre réflexion par rapport à ça ?

M Je trouve que les parents ne s’investissent pas tellement.

E Quand on parle d’investissement comme vous le soulignez, qu’est-ce que cela veut dire ?

M Dans le sens, là c’était un sujet la lecture, on avait fait une autre fois sur le sommeil, c’était pareil, y’avait presque pas de parents. Et je sais que dans le cadre de la lecture, on avait invité le responsable de la bibliothèque, tout ça...

P Moi, le samedi matin, je prenais une classe. Y’avait CP. Le samedi je les prenais pendant une heure, deux heures et je racontais une histoire pour essayer de les intéresser à la lecture et de les faire venir à la bibliothèque après. Je recevais la classe, ensuite, soit je faisais par des cassettes sur le thème d’une histoire ou d’un conte, conte de PERRAULT, je prenais un thème à chaque fois et ensuite je racontais des histoires et c’était à eux de raconter la suite. A la fin de l’histoire, je leur demandais de raconter si il avait vécu une histoire semblable ou je faisais un rapprochement avec l’histoire qu’il avait entendue ou si ils n’avaient pas compris... ou si ils voulaient des explications, je donnais des explications. C’était en lien avec la bibliothèque. C’était intéressant, c’est vrai qu’il adorait venir, le samedi matin ils n’avaient pas trop envie de travailler, ... c’est une approche, ou alors je leur faisais découvrir des mots. C’était en accord avec la maîtresse, elle disait... ..... moi je ne sais pas trop où ils en sont dans les cycles d’apprentissage ou d’approfondissement... comme c’était les petits, c’était avant le CP ou le CP, le premier cycle, donc fallait qu’ils découvrent des mots. Je leur demandais de rechercher certains mots, certaines phrases dans les livres. Je leur disais vous avez tous les livres à votre disposition, vous recherchez certains mots pour avoir...... le thème sur les animaux, la nature ou sur les plantes, fallait qu’ils me découvrent des mots, comme ça ils recherchaient des mots, comme ça ils avaient à les écrire...

E Vous êtes très impliqués à tout ce qui est attrait à lecture !

M Oh oui. Y’avait eu aussi un conte qui avait été raconté aux enfants.

P Oui, on avait fait venir une conteuse professionnelle...

M Pour intéresser la période CP, Adrien était en CP.

P Elle avait une petite maison en carton. C’était un genre de marionnettiste ambulant et elle a raconté 3 - 4 histoires, y’avait le Chaperon rouge, des contes beaucoup russes. Elle vivait ses contes, elle les mimait avec des marionnettes et cela les avait intéressés.

E Je suppose que Jérôme vient à la bibliothèque toutes les semaines ?

P Quand j’ai la permanence, en général, il vient avec moi. Pendant les deux heures le mercredi, quand je suis le mercredi ou le samedi matin.

E En tant que bénévole. Et Jérôme passe son temps à la bibliothèque...

P Oui, il aime bien.

E Et je suppose qu’il doit ramener sous son bras...

P Il ramène des livres à chaque fois.

M Il en ramène pour ses frères.

P Oui, il pense à ses frères. Des bandes dessinées mais bon...

E Au niveau du...

P Il lit bien. Très bien.

M Très bien, y’a des mots qu’il accroche bien sûr. Là il aime bien aussi le soir que je lui lise, il aime pas trop, lui, lire. Ce que je fais, on le lit chapitre par chapitre et quand il y a une grande feuille avec un dessin en bas, je lui dis : « tu lis jusqu’au dessin ». Il rouspète mais il le fait quand même. Il accroche mais...

E Vous continuez à lui lire des histoires...

M Ah oui. Parce que je trouve que c’est important. Et si j’ai pas le temps, c’est le deuxième qui couche dans la même chambre qui lui lit l’histoire et le grand faisait ça avec le deuxième. Il me dit  « moi, ça me fait un exercice de lecture ». C’est vrai, à parler tout haut aussi, faut bien qu’il lise haut aussi parce que sinon il lirait n’importe quoi. Dès fois, je lui dis « tu as écouté ce que tu as dit ». « Ah oui, ça doit pas être ça ». Alors je lui dis : « écoute ce que tu as dit ». « Ah oui, c’est pas ça ».

E Au niveau de vos habitudes d’écriture, est-ce que vous écrivez autrement ?

P J’écris beaucoup quand je faisais la garderie scolaire, les lettres, les embauches, tout ce qu’il y a d’administratif, je faisais...

M On écrit, quand on est en vacances on envoie des cartes.

P Au premier de l’an, on fait 50 cartes de voeux à peu près. Quand on part en vacances on écrit 30 - 40 cartes. Ils font leurs cartes, on ne part pas sans qu’ils aient fait leurs cartes aux papys, mamies, parrains, marraines, frères et soeurs au minimum, y’a les amis en plus quelquefois. On consacre un après-midi ou une matinée, même si on va pas loin, si on va aux Sables.

M Ils regardent ce qu’on a écrit.

E Est-ce que vous avez un répertoire téléphonique.

M Oui, manuel. Et je ne veux pas mettre en mémoire. C’est pour faire travailler la mémoire justement et travaillant dans le milieu, je me suis aperçue que quand on met en mémoire, les chiffres on ne s’en rappelle plus après. C’est vrai, un copain le disait, il a mis en mémoire les numéros de téléphone, il s’est rendu compte qu’il ne savait plus les numéros de téléphone. Je dis que c’est là que c’est grave. « T’aurais pas mis en mémoire ». Ça m’oblige à chercher le numéro dans l’annuaire et dans un répertoire manuel. Il me dit « tu as peut-être raison parce que comme ça, ça m’oblige...

E Vous utilisez le calendrier, ou un agenda ?

M Agenda, non.

P J’ai mon bloc sur moi.

M On a un grand calendrier près du téléphone et on note ce qu’on a à faire.

P On a un grand calendrier, pour voir...

E Est-ce que vous utilisez le pense-bête ?

M Pour se souvenir... pas vraiment.

P Au travail, on est obligé.

M On fait travailler notre mémoire.

P Ici, on note pratiquement.

M Et on arrive à pas oublier trop de trucs. Ça arrive.

E Quand vous faites vos courses, vous faites une liste ?

M Non, je fais une liste dans ma tête.

P Si, quand on a beaucoup de choses à acheter.

E Quand vous partez en voyages, est-ce que vous faites une liste des choses à emporter ?

M J’ai un mari qui le fait, moi non.

P Oui, sinon on oublie toujours quelque chose, c’est fatal. Je prends un livre, je coche au fur et à mesure ce que je mets dans la valise pour rien oublier. Je la fais un mois avant. Quand une fête, c’est pareil.

M On est assez fête de famille pour se retrouver et tout.

P On est obligé de tout noter. On fait déjà un plan de table. On place les gens. Je suis très méthodique...

M Heureusement que tu n’es pas comme moi.

E Il y a une complémentarité.

M Voilà. Il aime bien faire ça.

E Vous faites la cuisine, vous écrivez des recettes. On fait des recettes, oui... Jérôme est abonné à Perlin, toutes les semaines il lit son Perlin. Il sait très bien le jour. Il sait que le grand le mercredi il reçoit son Info Junior. Il sait que le lendemain il reçoit son Perlin.

E Y’a des recettes dedans ?

M Oui, des recettes de cuisine.

P Ils ont chacun leurs étagères, ..... répertoriées..............

M Le grand a gardé ses « Je lis déjà », non ... « Les histoires vraies ». Ludovic était abonné à « Youpi ». Le dernier il .. (recherche du genre d'abonnement)...

E Vous classez vos papiers administratifs ?

P Oui, ça fait un moment. De temps en temps, j’ai un bureau pour ranger tout. J’ai une collection de livres...

M Ils peuvent les consulter pour faire des recherches.

P J’ai les « Tout l’Univers », les Larousse, encyclopédie sur la nature, on a tous les TINTIN...

E Qui sont accessibles aux enfants ?

P Oui. Ce sont des collections de luxe. Ils ont le droit de les prendre si ça reste à la maison.

E Tintin et Milou cohabitent avec les encyclopédies !

P Voilà, y’a tous les Lucky Luke, tous les Astérix, toute la collection d’Hergé en fait.

M Ce monsieur connaît ta maîtresse.

E Bonjour tu te rappelles de moi ?

J Oui.

M Tu ne me l’avais pas dit.

E J’étais venu dans la classe.

P Ils ont de quoi apprendre l’histoire. J’ai toute l’histoire en bandes dessinées racontée en bandes dessinées etc... j’ai en fiches tous les personnages de l’histoire, un résumé de chaque personnage. Quand ils ont besoin, ils peuvent consulter. Ils ont leurs petites fiches...

E Vous avez des documents en histoire en bandes dessinées ?

M Oui, c’est pas mal fait.

E Là ou je ne suis pas d’accord, c’est qu’il traite les Vendéens de brigands...

P A l’époque ils étaient appelés comme ça.

E Oui, mais moi ça m’avait marqué.

P Pour l’Assemblée Constituante, c’était des brigands parce qu’ils n’arrivaient pas à bout. Tous les gens qui n’arrivaient pas à bout, c’était des brigands automatiquement. Et le terme est resté.

E C’était dans la présentation...

P Mais dans tous les livres d’histoire de Vendée, ils en parlent.

E Jérôme fait du sport ?

P Non, il ne fait rien. Il voulait du foot cette année, mais c’était un peu jeune, et nos horaires, c’est pareil, c’est pas facile d’être disponible pour les trois. Donc, on a décidé d’attendre l’année prochaine. Il fera un multisport, c’est le mardi soir en sortant de l’école. Il fait de la musique, à M., c’est pas à côté, deux fois par semaine. Autrement l’autre fait du foot, le mercredi et le samedi après-midi.

E C’est toute une organisation de la famille aussi !

P Je fais du sport aussi. Y’a que ma femme qui ne fait pas de sport. J’en faisais cinq heures par semaine avant. Maintenant je fais une heure par semaine car je n’ai plus le temps matériel.

E Vous êtes très associatifs.

P On fait partie d’une association d’A., au centre de soins.

E Votre année de naissance, vous ?

P 1954. Ma femme 1956.

E Votre revenu mensuel familial ? Entre 5.000 et 10.000, entre 10 et 15.000, entre 15.000 et 20.000, ou entre 20.000 et 25.000 ou au-delà ?

P Plus de 20.000.

E Vous travaillez à temps plein ?

P Temps partiel. 80 %.

E Et votre femme ?

P A temps plein.

E C’est un choix ?

P Oui, je tenais à avoir mon mercredi. Le problème le mercredi, y’a pas d’activité. Alors je prends tous mes rendez-vous sur Nantes pour les yeux, les oreilles, les dentistes. L’aîné a un appareil, tous les mercredis on y allait. L’autre c’est l’orthophoniste un mercredi sur deux. Pour les oreilles, c’est pareil, j’y vais régulièrement, chacun leur tour. Les deux aînés, tous les six mois. Pour les yeux, une fois tous les six mois. Donc ça revient à peu près régulièrement. Y’a pas un mercredi où je n’ai rien, soit je vais à Nantes, soit chez l’orthophoniste.

E Vous aviez fait ce choix pour les enfants ?

P Oui, aussi, et puis comme j’avais beaucoup d’activités, il me fallait du temps disponible pour pouvoir m’occuper d’activités, sinon je n’aurais pas le temps de tout faire.

E Sinon votre femme est fonctionnaire...

P Elle a du temps dans la journée. Elle commence tôt le matin, elle fait deux heures, elle a une coupure de 4-5 heures et puis elle reprend l’après-midi jusqu’à 6 heures. Donc elle travaille un samedi sur deux. Moi je ne travaille ni le mercredi, ni le samedi. Autrement j’organise mon temps comme je veux.

E Votre profession ?

P Je suis à la poste aussi. Je suis responsable de bureau de poste. Je vais contrôler. J’ai 25 bureaux à m’occuper dans le département, j’organise mon travail comme je veux. J’ai un minimum de 2 heures le matin et 2 heures l’après-midi à Beaulieu. On se déplace dans les bureaux pour voir comment ça se passe. On vérifie la comptabilité, ils nous appellent quand ils ont un problème...

E Vous êtes inspecteur des PTT. C’est le terme ?

P Oui, maintenant c’est plus comme ça. C’est cadre.

E Et votre femme est cadre également ?

P Non.

E Vos diplômes ?

P On a le même niveau. Bac.

E Vous avez des formations PTT ?

P Oui, formation continue, on a passé des diplômes...

E Des examens « maison »...

P Oui, voilà on prend des cours par correspondance...

E Est-ce que ça vous arrive de faire des petits mots quotidiens entre vous ?

M Ça m’arrive de faire un petit message aux enfants, le soir quand ils arrivent de l’école par le grand ramène les deux autres...

E C’est rare ?

P Quand on se voit pas, quand je rentre tard le soir.

M Oui, voilà.

P Si il y a des choses à faire, parce que le matin on ne se voit pas tous les deux, quand j’arrive, bon quelquefois... ou j’ai une réunion...

M Non autrement, c’est vrai... les enfants nous voient écrire. Je vois au mois de septembre, mon filleul a ouvert trois places de foot à Nantes et à son parrain parce qu’il travaille à.... ... j’avais mis un gros papier sur lequel j'avais écrit " Bonne Fête" « y’a une grosse surprise, papa va arriver de bonne heure alors pressez-vous à manger »... ils se sont dit « c’est bizarre »... comme c’était mardi, les devoirs pouvaient être fait le lendemain. Ils se sont doutés que c'était une surprise mais ils ne savaient pas ce que c'étaient.

E Pour revenir à la lecture, quel est le meilleur moyen pour vous d’apprendre à lire ?

(silence)

P Le déchiffrage des mots d’un livre ou de quelque chose de concret...

M L’association d’images et de mots. Ils ont plus de... ils sont dans le monde du visuel, c’est vrai qu’ils arrivent à découvrir le mot grâce à l’image. L’association des deux. Les sons, c’est peut-être plus par l’oral. Si les parents parlent mal, automatiquement les enfants parleront mal. Ce n’est pas pour incriminer les parents mais c’est vrai , on a notre rôle que si on parle mal, l’enfant entendra mal, répétera mal.

E D’après vous, Jérôme, il a appris à lire quand et où ? Quand a-t-il commencé son apprentissage de la lecture ?

P A l'école , oui.

M Déjà petit, si, parce qu’il voyait ses frères lire donc il aimait bien les images, mais de là vraiment à apprendre la lecture, peut-être pas, mais déjà les images. Déjà on lui lisait les histoires, fallait bien qu’il ait un livre. Donc, il a appris à l’école c’est vrai, mais il a appris aussi à la maison, je pense

E Il a appris à la maison également ?

M Pour moi je crois. L’école a contribué plus mais comme on lui lisait des histoires. On en lisait au grand et on en lisait au petit. A son niveau, parce qu’il y avait des livres épais, donc tout petit il avait ces livres là, il les a encore d'ailleurs.

E Vous pensez que le bain de lecture que vous lui avez donné, ça a favorisé l’éclosion de la lecture ?

M Oui, je pense.

P A la bibliothèque, Il vient avec moi et a commencé à lire tout seul. il sait comment sont formées les lettres, il fait une association.

E Vous l'avez fait quand il était petit?

P Vers 3, 4 ans.

E Vous lui avez montré ?

P Oui

E Vous décomposiez ?

P Non pas jusque là.

M Dès fois, quand je lui lisais, je mettais mon doigt. On disait, tu vois ça, ça veut dire [a]

P On épelait quand même les syllabes.

M Et par le son aussi.

E Pourquoi vous faisiez cela ?

P Pour qu’il puisse repérer plus facilement, c'est ça..

E C’est contradictoire par rapport à ce que vous disiez tout à l’heure, parce que vous disiez que ça avançait un peu trop ?

M Oui, ça avance de trop, dans le sens...

E Ça avance trop vite.

M Oui! c’est peut-être nous aussi qu’avons tort. Je trouve qu'on apprend la lecture différemment... qu’entre lire et faire entrer des règles... La lecture c’est pour une découverte du monde extérieur, du monde qui nous entoure, du monde précédent. L’école... c’est contradictoire ce que j’ai dit, peut-être, mais pour moi, c’est plus forcé à l’école, c’est plus poussé. Que là on faisait en s’amusant. C’est vrai que c’est contradictoire avec ce que j’ai dit, c’était plus par un goût de la lecture qu'on le faisait. C’était pas pour apprendre, c’était pour apprendre aussi mais...

E Je comprends ce que vous voulez dire. Ça va bien pour Jérôme parce que Jérôme, il savait. Mais pour les autres qui ne savaient pas, les autres étaient défavorisés.

M C’est ce que je voulais dire. Un enfant dans la classe, y’a des enfants qui suivent moins bien et des parents sans pour cela les incriminer, mais qui n’ont pas le temps ou qui ne consacre peut-être pas le temps ou qui ne voient pas les choses de la même manière. Nous, le milieu sociologique... Moi, j’ai des tantes qui étaient religieuses, directrices d’école, j’étais bercée là-dedans, ma soeur est prof, c’est vrai que le milieu enseignant c’est un milieu que je connais bien si on veut aller par là. La lecture, le fait d’apprendre à lire, sans pour cela tomber dans l’excès, ma soeur, qui est prof, elle disait bien, pour ses filles qui sont plus grandes que les miens, elle trouvait que ça allait assez vite et elle, elle était pourtant prof. Elle dit « faut laisser aussi la part du jeu, du rêve, la part... ». Nous c’est pour ça qu’on lui laissait la part du rêve. Je pense qu’un gamin qui est bercé dans le milieu enseignant, il aura plus de chance car il sera aidé plus facilement. On a beau dire, les études, les études, moi encore, ça m’a choquée d’entendre une maman me dire, c’est pas de sa faute, elle n’est pas allée loin en études, elle m’a dit, sa fille est en quatrième : « je suis incapable d’aider ma fille ». Ça m’a choquée, et je me suis dit je vois le temps que je passe derrière le grand qui dès fois n’a pas envie de bosser, je suis à lui dire « va bosser, va bosser », sinon il ferait rien. Il a des possibilités, il a une mémoire... tous les profs me disent ils pourraient mieux faire, ça me mine de voir qu’il peut mieux faire mais qu’il a pas envie de bosser. Mais, je me dis, sa gamine elle ira pas loin, elle sera pas secondée par sa mère. Heureusement, elle a son père qui peut l’aider. Je me dis que cette gamine là n’aurait pas la même chance que mes gamins ont...

E Dans le sens que la famille , pour vous, est un relais important...

M Oui, je pense.

P Pendant les vacances, je les fais travailler, quand ils étaient petits je leur faisais des dictées à faire, le mercredi quand j’avais le temps, des dictées, des problèmes. On leur donne des cours pendant les vacances...

M Pas systématiquement...

P Mais si ils ont un problème ils auront des cours toute l’année, ou le samedi une heure de cours...

E Tout à l’heure, vous m’avez dit « Jérôme va chez l’orthophoniste » ...

M Oui, mais c’est par rapport à ses oreilles.

P Ils ont des problèmes d’oreilles. Y’en a un qui une greffe du tympan...

M Et le dernier, il bavait beaucoup, il ne mettait pas sa langue comme il fallait. L’oto-rhino nous a dit qu’il faudrait des cours d’orthophonistes. Il lui avait donné 30 séances, l’orthophoniste a dit : « j’ai fini les 30 séances mais il y a belle lurette que j’aurais dû arrêter ». L’orthophoniste voulait absolument que ça soit bien acquis dans sa tête et il l’a très bien pris d’ailleurs. A partir de ce moment là, il a pris conscience... C’était pas pour un problème de parler, c’est par rapport qu’il ne savait pas placer sa langue et qu’il bavait beaucoup. Donc il avait des problèmes... il avait pas compris le système de sa langue, mais il a compris très vite.

E C’est vous qui vous en occuper davantage ?

P Oui, c’est moi le mercredi.

E Dans votre famille, vous avez réparti les tâches ?

M Oui, c’est suivant les horaires, c’est suivant... c’est pas attitré... c’est un complément.

E Y’a pas de chef de famille ou un chef ...

M Si on a quelque chose à dire à nos enfants, moi je le dis...

E Vous êtes interchangeable.

M Oui.

P Le ménage, c’est plus moi qui le fait parce que je suis là le mercredi, le samedi. Y’a que le repassage que tu fais. La lessive, j’étends...la cuisine, le ménage, c’est souvent moi qui fait la cuisine. Les devoirs c’est un peu moi, plus le mercredi et les vacances. J’ai les vacances scolaires, je suis plus disponible en temps mais moins le soir.

M Mon grand m’a dit : « je préfère que ce soit toi qui fasses les devoirs parce que papa est trop perfectionniste, il est trop pointilleux ».

P C’est vrai, si il y a une faute, je fais copier dix fois, un verbe irrégulier en anglais, il copie 20 fois, jusqu’à temps de le savoir. La semaine d’après, tout ce qu’il ne sait pas il le recopie encore 20 fois, après je double parce qu’il a eu le temps de... je ne fais pas de cadeau là-dessus... c’est trop important de savoir écrire... comme ils écrivent, les fautes qu’ils font à leur âge, qu’est-ce qui va leur rester à notre âge, c’est dommage. Après la quarantaine, on commence à perdre un petit peu, c’est vrai, on écrit moins... sauf la dernière fois, j’ai écrit un texte parce qu’on a sorti un bouquin, alors j’ai fait ma page d’écriture, à certains mots, je me demandais comment entourer les phrases parce qu’il y avait longtemps que j’avais pas écrit. Je sens qu’on perd quand même alors je me dis qu’est-ce qu’il va leur rester à notre âge, rien. Nous, on apprenait tout par coeur, et on avait à coeur.... maintenant c’est l’ordinateur qui travaille pour eux, ils ont la calculette à l’école, ils ne comptent pas. Nous on compte tous les jours. Par exemple de tête ça va très vite, quand je vais à l’épicerie, je fais ... j’ai déjà fait l’addition dans ma tête avant... Eux ne seront pas capables de faire cela car ils ont toujours leur calculette. Quand on passait le concours à la poste, on avait dans notre programme en maths une division à 8 chiffres, monter les tableaux et tout, et interdiction de calculette... On demanderait ça, ils seraient incapables, ils passeraient trois fois trop de temps...

M Une chose qui avait choqué mon grand. Ludovic était chez mes parents. Mon père s’est mis à réciter ses tables d’addition comme ça. Il voyait que j’étais à lui faire réciter... Il lui a dit « tu sais encore, toi ».

P Les fables de la Fontaine, il en sait par coeur, certaines...

M A Ludovic, la fois que tu as récité la poésie qu’il ne voulait pas apprendre, et que tu l’as apprise en même temps que lui et que tu as été plus rapide que lui à l’apprendre.

P Moi, en la lisant 3 - 4 fois et je savais la poésie, elle n’était pas très longue. Il n’en revenait pas que j’arrive à l’apprendre avant lui. Je lui ai dit : « tu vois quand on veut apprendre, on a de la mémoire, faut la travailler la mémoire ».

M Une fois, on lui a fait apprendre des mots en anglais et il a eu une récitation. Il était tout content de nous dire qu’il avait eu 18.

P J’étais fort en anglais. En anglais, je connais plus de mots que lui pour l’instant. Il a fait trois ans, j’en ai fait huit. Donc c’est vrai... ça reste. Pendant que j’étais à l’armée j’ai revu tout mon vocabulaire d’anglais. Quand j’avais une minute, mon bouquin d’anglais sur le lit, je l’ouvrais pour ne pas perdre mon anglais. Quand on était allé en Espagne en deux ans... Tu vois « quand tu vas voyager... maintenant on parle de l’Europe... c’est important de connaître les langues, de savoir se diriger et tout ». Pour changer de l’argent, heureusement qu’on parlait la langue sinon on aurait jamais pu faire notre change, c’est dingue.

E Quand vous partez en vacances vous prenez des photos... des films...

P On visite toute les ruines, les abbayes, les châteaux. On fait des albums à chaque fois. Ce qu’on aime comme pays c’est l’Egypte, la Grèce, Rome...

E Vous partez avec les enfants ?

P Pas beaucoup. A cinq quand on part ça revient trop cher.. quand on reste en France, on part...

M Quand on était dans le Gers, on est allé visiter des ruines romaines et tout ça, on est tombé sur un guide qui a su intéresser les enfants sur... la vie romaine, la vie antique et tout ça. Ça fait deux ans, le petit avait 5 ans, le jeudi ou vendredi de la même semaine, on est allé à AUCH, dans la cathédrale, le coeur de la cathédrale est magnifique et il y avait une céramique, on admirait... et le petit nous dit « regarde c’est le même dessin que l’autre jour, dans les ruines qu’on est allé ». Y’avait ce dessin là et on avait pas fait attention et il nous citait les noms que le guide nous avait dit...

P La visite était longue... ils ont passé trois heures à l’écouter sans dire "on s’en va". Intéresser même les petits de cinq ans, chapeau.

M Ils n’ont pas rechigné...

P Il connaissait toute la partie historique. Il faisait une partie plus technique, il disait comment on faisait cuire les carreaux à l’époque, comment on les installait, tels matériaux c’était fait avec telle association plus telle autre et tout... quand ça devenait fastidieux, il donnait une petite anecdote pour détendre et il repartait... c’était bien...

E Ce qui veut dire qu’avec vos enfants vous entretenez le jeu de questions... Vous êtes là pour répondre...

M Oui, ils le savent.

P Ça ne leur déplaît pas. A chaque fois que l’on va aux Sables on va visiter le Château de TALMONT, pourtant ils connaissent mais il y a toujours quelque chose qui a changé...

M Le deuxième, il adore ça le Moyen-âge, il me dit : « maman je n’ai pas eu de difficulté, l’année dernière on a construit le château de TALMONT ». C’est vrai que dans la tour de TALMONT, ils ont reconstitué avec un puzzle et il donnait au gamin une partie du puzzle... Les guides arrivent maintenant à intéresser les enfants.

E Ils ont intérêt s’ils veulent avoir des jeunes dans leurs musées.

P Quand on va chez des amis à Tours, on fait les châteaux de la Loire, donc comme ça c’est intellectuel, c’est instructif, c’est la détente mais c’est aussi la culture. Quand on reçoit des gens, on les emmène au Château des Ducs, on les emmène au Puy du Fou, au Château de CLISSON, ou à Château de MACHECOUL..

E Et Jérôme suit ?

P Les spectacles de nuit, non... maintenant il va avoir sept ans, il pourra comprendre certaines choses. On va voir les vieux métiers.....

E Les enfants sont baignés dans toute cette atmosphère historique...

P Si ils n’aiment pas ça, ils sont mal tombés...

E Est-ce que vous auriez des choses à rajouter plus particulièrement concernant l’apprentissage de la lecture ou tout ce qui concerne la lecture ? Avez-vous autre chose à rajouter ?

M Ce que je pourrais dire c’est que... apprendre par le son, c’est bien mais après pour les fautes d’orthographe, bonjour, parce qu’ils écrivent comme ils entendent. Pas forcément comme ils parlent, ils écrivent par le son et c’est peut-être un danger pour les fautes d’orthographe.

E Vous êtes donc scrupuleuse sur la technique...

M Oui, c’est un peu ça que je reprocherai cela, ce que j’ai peur, le grand il a appris par la méthode des sons... J’ai peur que les AI, E, ça se mélange un peu dans leur tête et c’est pas facile de...

P Quand on écrivait à notre époque, je ne veux pas comparer les deux... C’est différent et on n’est plus à la même époque, les méthodes ont changé et évolué. Nous, on écrivait beaucoup, on répétait sans arrêt dans notre tête, à haute voix, on écrivait des pages et des pages... mais on écrivait 20 ou 30 fois le même mot. Eux, une ligne, deux lignes maximum mais pas dans tout.

M Hier, il avait une phrase à apprendre en auto dictée. Il a très bien écrit mais je me dis que c’est bien et pas bien. Pour moi, les auto dictées, c’est bien mais, si l’enfant ne lit pas à côté, des livres et tout ça, j’ai peur qu’il ne sache pas écrire...

P La lecture ça va avec l’écriture, c’est obligé.

E Vous faites le lien entre l’école et la famille.

M Oui, voilà. Si l’enfant fait que les trucs de l’école. S'il n’est pas bercé dans le sens où il faut qu’il lise...

P Quand on part en vacances, on prend tous les prospectus sur la région et puis après on leur fait lire tous les prospectus et ils cherchent ce qui les intéressent, ce qu'on peut visiter.

E Vous faites ça tous les deux.

M Oui, oui ! Dans le Gers, c’était la propriétaire qui nous avait apporté tous les prospectus... elle se faisait sa petite bibliothèque et elle faisait connaître sa région comme ça.

E Elle arrivait à intéresser les gens à travers les prospectus.

P Elle nous emmenait aussi.

M Elle avait su intéresser les enfants... elle était sympa.

P .................

E Qu’est-ce que vous en diriez de la méthode de lecture qui se fait actuellement dans la classe ?

M C’est les sons ? non ?

E Je ne sais pas.

M Je ne sais plus, c’est... c’est les sons mais y’a le global aussi... y’a des mots...

E Est-ce qu’il y a un nom à cette méthode là ?

M Oui, elle l’a dit, mais je ne m’en rappelle plus. Vous demanderez à Chantal.

E Ce qui m’intéresse c’est ce que vous...

M Je sais que c’est par les sons, ça c'est vrai. Et puis y’a... par les sons, c’est ma crainte, parce que je m’en rends compte par rapport au grand. Et je me rends compte que Jérôme, il les perçoit bien mais quand c’est pour lire, il a encore pas fait... quand c’est AI il a pas encore compris, ou il a pas fait... c’est un petit peu juste. C’est vrai que dans son livre de lecture, je vois OI et j’entends A, c’est vrai que c’est pas évident. Ceux qui ont des problèmes d’oreilles comme lui, ça peut poser problèmes. Ça lui pose pas de problèmes parce qu’il suit bien mais des gamins qui ont des difficultés d’oreilles, ça peut être un handicap cette méthode par le son.

E Si on n’entend pas le son...

M Si on n’entend mal le son, automatiquement on risque de faire des erreurs et de mal lire.

E Et bien, je vous remercie de tout ce que vous m'avez apporté.