Entretien n° 41 avec Famille BARDIN

Le 14 avril 1998

M Je pense que le rapport amical, ou même sans être très amical, avec l’instituteur ou l’institutrice peut permettre à l’enfant de se sentir bien. Si il n’y a pas une sorte de connivence entre les parents et ce qui représente après les parents quelqu’un d’essentiel dans la vie de l’enfant, qui est quand même l’instituteur, en CP, c’est quand même très important. Si cette relation n’existe pas c’est certainement préjudiciable à l’enfant parce que c’est un climat de confiance qui peut justement engager l’enfant à faire des efforts et à progresser.

E Quand je vous dis le terme apprentissage de la lecture, qu’est-ce que cela évoque pour vous ?

M Personnellement, j’ai des souvenirs avec des tableaux B, BA, des répétitions comme moi j’ai appris à lire. Je pense que maintenant c’est sous forme ludique que c'est apporté et ce n’est pas plus mal. On a connu l’époque. Dans l’apprentissage de la lecture, c’est ce qui me revient. Les sonorités, les syllabes les décorticages du mot. Quand ça c’est bien acquis, on a fait des progrès...

E Le reste suit.

M Oui, je pense. Plus tard, quand on voit les enfants grandir et dans leurs problèmes qu’ils ont en français. Ce découpage des mots, des syllabes, quand y’a des lacunes, ça ressort automatiquement.

E C’est ce que vous ressentez pour vos enfants.

M Oui.

E Au niveau de votre enfant, comment vous voyez l’apprentissage de la lecture, de la même façon ou différemment...

M Par rapport à ce qu’il me rapporte de l’école ?

E Oui.

M Ecoutez, ça c’est passé tellement facilement que je suis un peu ébahie, c’est-à-dire qu’Hélène n’a pas fait de grande section . Elle a vraiment une soif d’apprendre des choses nouvelles et bon pour elle ça a été très facile, donc je n’ai pas ressenti pour elle précisément de problème..

E Elle a sauté une classe.

M Oui, de moyenne section en CP. Et ça c’est très bien déroulé. Elle lit parfaitement sans accrocher et elle comprend bien ce qu’elle lit.

E C’est important qu’elle comprenne bien ce qu’elle lit.

M Oui, de toute façon parce si elle ne comprend pas... c’est alors une mécanique après il faut un minimum de compréhension pour pouvoir...

E Elle aimait bien lire avant, elle aimait bien regardé les livres ,

M On a toujours été assez enclin à privilégier un moment, souvent le soir de toute façon, où mon mari et moi on passait systématiquement dans les chambres, mon aînée a maintenant 16 ans donc cela n’est plus tellement d’actualité mais, on ménage un temps précis pour être seul avec l’enfant, ce qui fait qu’on lit une histoire, on dit une charade ou on raconte une histoire drôle ou... cinq enfants, on ne peut pas passer une ½ heure mais ça nous a souvent servi à dénouer un problème tout à fait autre ou s’apercevoir que l’enfant n’était pas réceptif qu'est ce qui se passe, ça va pas... L’enfant étant seul, cela nous permet d’avoir une approche plus directe. C’est vrai que les histoires, la lecture. Alors, on ne lit pas le livre entier, parce qu’on a pas forcément le temps mais on lit deux pages, donc le lendemain on dit « est-ce que tu te rappelles où on était rendu ». C’est des petites choses de mémoire qui font que je pense que ça aide, pour comprendre à quoi ça sert la lecture. Racontez une histoire pour raconter aussi une histoire, je crois qu’il faut une compréhension et une sorte de mémorisation pour que ça progresse.

E Et pourquoi avez-vous fait ça, pour le plaisir de le faire ou parce que vous saviez qu’il y avait des incidences plus tard ?

M Ah non, tout à fait un plaisir, les incidences, quand les enfants sont petits, on ne se les imagine pas, pour les aînés du moins.

E Pour le plaisir de raconter des histoires que vous faisiez...

M Justement ça créait un moment privilégié, d’intimité, si on peut dire. Parce que bon on est pris par la vie trépidante. J’ai un mari qui ne rentre pas toujours très tôt, mais il a fait de façon, il s’est rendu compte que c’était important. Il essaye, même s’il y arrive qu’à 8H30 - 9 moins le 1/4, son premier travail avant de manger, c’est de faire le tour des chambres.

E Pour Hélène, c’est régulier ?

M C’est systématique, tous les soirs.

E Depuis qu’elle est toute petite.

M Ah oui depuis tout le temps.

E Bien avant l’entrée en maternelle.

M Ah ! Oui !.

E Vous lui lisiez des livres mais quel genre de livres ?

M Hélène a profité des aînés. Aux aînés on avait donc pris des petites séries "Perlin Pinpin", "les belles histoires"...

E Vous étiez abonnés.

M Voilà, ce genre de livres qui font une histoire facile à comprendre, facile à lire aussi quand il commence la lecture et qu’on prend... étant donné que ce sont des mots qui sont repris plusieurs fois, surtout dans « les belles histoires », au cours de l’histoire, ça permettait de saucissonner un petit peu l’histoire et aussi pour que l’enfant puisse savoir aussi attendre.

E laisser le suspens ,..

M Oui! bah ! oui !

E Vous avez beaucoup de livres ?

M Pas énormément, ils ont beaucoup servis, ce sont presque des reliques. Ce sont toujours les mêmes.

E Les histoires que vous racontez à Hélène sont des histoires que vous puisez dans les magazines ou dans d’autres livres ?

M Ça peut être des histoires qu’on nous a racontées quand on était enfant... je sais pas... "le Chat botté"," les petits cochons"...

E Ce sont des livres que vous avez...

M Oui, ce sont les bases ... inter générations.

E ... qui vous semble important.

M Oui, oui.

E Combien Hélène a de livres grosso modo ?

M Je pense que ça serait plutôt, par rapport à l’âge d’Hélène, entre 30 et 50. Une année de Perlin et une année de "Belles Histoires" sans compter les livres des plus grands qui lui servent.

E Ça vous arrive d’acheter des livres autrement ?

M Pour l’âge d’Hélène ? Très rarement. Que pour son anniversaire ou des choses comme ça. On serait plutôt petite encyclopédie. Là dernièrement je lui ai pris un livre de Youpi car cela parlait des volcans, je me suis dit « tiens c’est intéressant ».

E Vous l’avez pris en librairie ?

M Oui, dans le commerce.

E Ça vous arrive d’aller en bibliothèque ?

M Ah ! oui ! Très régulièrement.

E Elle ramène des livres, vous allez avec elle ou avec eux ?

M Oui, mais je les laisse tout à fait libre du choix. Entendons-nous, si elle va me prendre un roman, je vais lui dire « faut peut-être pas exagérer », quand c’est dans le cadre du coin des livres pour enfant, ça ne pose aucun problème.

E Vous y allez toutes les semaines ?

M Pas autant que cela, car d’abord ils vont à la bibliothèque à l’école et puis pour une gestion de tous les livres qui peuvent être apportés par tout le monde, on va plutôt au moment des vacances. On est habitué à une bibliothèque donc on va surtout au moment des vacances.

E Vous êtes une maison où vos livres tournent.

M Beaucoup oui !.

E Le livre n’est pas forcément acheté, mais il est emprunté...

M Plutôt emprunté, parce qu'autrement...

E Quel genre de livre pour Hélène, ça se résume aux petites histoires ou est-ce qu’il y a autre chose ?

M Pour le moment c’est encore au stade des petites histoires.

E Parce que vous parliez d’encyclopédie tout à l’heure...

M Oui, parce que c’est arrivé qu’elle en est une d’adapté aux 3-4 ans, quelque chose... mais elle a beaucoup de plaisir à la regarder, car c’est très imagé, y’a un côté attractif par les images, donc je trouve c’est bien adapté parce que ça permet aussi de ne pas être là en tant que pédagogue, « tiens regarde ça », faut aussi qu’on mette la pédale douce par moments, je pense en tant que parents. Il ne faut pas non plus enfoncer le clou.

E Vous voulez dire que ça se fait d’une façon naturelle...

M Oh oui parce que, toute façon, vous ne ferez pas avancer un âne qui ne veut pas avancer.

E Et pour vous en même temps ça vous paraît important. Est-ce qu’il y a une relation pour vous entre le fait d’avoir cette expérience familiale de la lecture et le fait qu’elle a sauté sa classe pour vous ?

M Euh... c’est possible. De toute façon elle a l’expérience de ses frères et soeurs, malgré elle, je pense quelque part, nous aussi mais c’est quand même en elle... Même avant d’aller à l’école elle était toujours très... c’est une gamine très observatrice, très méticuleuse, qui fait toujours le rapprochement entre ce qu’elle a vu déjà et ce qu’elle vient de voir et elle est très, au niveau... dans le temps autant que dans les directions géographiques, elle se repère très vite. Ça a toujours été, on ne lui a pas inculqué l’heure, elle ne connaît l’heure. Elle a très vite compris jeudi, après demain, avant jeudi y’a... et je pense que c’est en elle.

E C’est en elle et y’a la fratrie. Vous avez 5 enfants.

M Oui, certainement, ça a dû jouer.

E Les âges de vos enfants.

M 16 ans, 15 ans, 13 ans, 9 ans et demi et 6 ans.

E Elle est la dernière.

M Elle est de février.

E Que pensez-vous de la méthode de lecture ?

M Je pense qu’il faut beaucoup insister sur cette histoire de syllabes. Mais, c’est vrai que de partir de mots entiers pour que les enfants fassent travailler leur mémoire visuelle et puis décortiquer après, moi, je n’y vois aucun inconvénient, plutôt que de faire l’inverse comme nous. On a appris à mettre des lettres ensemble et après former des mots, je pense que les enfants... on a plus maintenant, enfin, une vie avec du visuel, il faut des choses qui accrochent, donc je pense que c’est une technique plus adaptée par rapport à la vie qu’on mène maintenant par rapport à ce que nous on avait à l’époque. Oui, parce que les enfants il faut les capter. C’est l’ère du zapping, donc ils sont assez papillons.

E Donc il faut leur donner tout de suite des éléments pour qu’ils puissent se repérer facilement.

M Oui, je pense.

E Ça vous semble important.

M Oui, parce qu’on vit une époque où il faut absolument aller vite.

E Quelle est la méthode de lecture ?

M Je ne sais pas, je ne sais même pas si elle a son livre de lecture. Avec 3 - 4...

E Je ne connais... Gaffi ? Ratus ? ..... Abracadalire ?...

M Abracadalire, c’est ça. Avec 3 ou 4 histoires indépendantes dans le livre.

E Et vous pensez que c’est intéressant pour elle d’apprendre avec cette méthode ?

M Oui, parce que les histoires sont complètement indépendantes. Même si une histoire n’intéresse pas forcément l’enfant pour une raison x ou y, l’histoire d’après peu le remotiver.

E Quand Hélène a commencé à apprendre à lire ?

M Je pense qu’une partie du travail se fait en maternelle. Hélène en moyenne section elle avait déjà certaines bases certainement mais pas du tout de notre fait à nous, parce qu’on ne lui a pas donné de cours particuliers pour la stimuler dans son travail...

E Le temps de travail de lecture ?

M Alors là, c’est fait en 10 mn et je compte large.

E Et vous êtes avec elle pour faire ce travail ?

M Ah oui. On peut quand même trouver 10 mm. Je pense qu'on peut trouver 1à minutes.

E Vous êtes avec elle ou vous lui dites "fais ton travail " et vous faites autre chose...

M Ah non non.

E Vous êtes exclusivement avec elle.

M Oui. Je pense que c’est quand même une année importante. Même pour le calcul, c’est important, je pense qu’il faut se ménager du temps.

E Avec vos 5 enfants vous arrivez à organiser du temps...

M Je passe un bon petit moment le soir c’est sûr mais j’essaye quand même de les lancer en autonomie assez rapidement.

E Vous ne travaillez pas ?

M Je suis mère active au foyer. (rires)

E Vous n’avez pas de profession à l’extérieur.

M Non, sinon je suis laborantine de formation.

E Pour revenir aux jeux de Hélène, elle aime jouer à quoi ?...

M Elle aime surtout dessiner.

E Depuis longtemps.

M Elle a toujours fait ça. C’est-à-dire comme je m’occupais des plus grands, sa soeur a 4 ans de plus qu’elle, ce qui fait qu’elle était donc bébé quand Clémence s’est trouvée à avoir un petit peu de travail à faire le soir en CP et dès, elle avait à peine deux ans, je la mettais dans sa chaise, un papier, un crayon et le temps que je m’occupais de sa soeur, elle griffonnait sur son papier donc, je pense que c’est une habitude quoi, c’est venu comme ça.

E Elle dessinait naturellement, elle écrivait aussi...

M Non. Je n’ai jamais cherché à lui faire écrire...

E Oui, mais elle, d’elle-même ?

M Ah oui, faire des séries d’écriture à elle. Une sorte de mimétisme quand même.

E Ensuite elle vous montrait, comment vous réagissiez à ses dessins...

M Ecoutez on ne peut pas réagir autrement que en disant que c’est bien. Ou ça arrive quelquefois que je lui ai dit « écoute, franchement, tu as tout fait au crayon de bois, mets dont un peu de couleurs, quand même, tu ne crois pas que cela serait plus beau en couleur ». Alors elle se met à sortir ses crayons de couleur et elle fait couleur. Et... ou ça peut-être, "Tu m'as fait quoi ? C’est un chat, tu trouves que ça ressemble à un chat ? tu ne crois pas qu’il y a deux oreilles pointues un chat ». Donc je lui fais, la fois d’après elle ne va pas forcément me faire un chat avec deux oreilles pointues, mais il y aura au moins des oreilles.

E Tout ça naturellement.

M Oui.

E Avec les 4 autres enfants pareil ?

M Je dirais que ce serait l’aîné qui est quand même très individualiste de tempérament, je crois que ça joue pour beaucoup, qui par rapport à la lecture à... elle a appris à lire tout à fait normalement, on s’est rendu compte avec mon mari qu’il aimait bien qu’on lui lise des histoires mais qu’on lui lise. Donc, plus ça allait on s’est rendu compte qu’il prenait des livres avec peu de textes en bibliothèque par exemple. Et bon, il n’est pas mauvais en français mais ce n’est pas sa tasse de thé, il aime pas trop.

E C’est pas son truc.

M Là, il passe son bac de français...

E Pas trop convaincu.

M Pas vraiment. Mais, peut-être il finira par y trouver goût, il se rend compte quand même par rapport aux dossiers qu’il a à préparer dans son année scolaire, il faut quand même lire au minimum.

E Les autres suivent bien.

M Les autres y’a pas de problèmes.

E Hélène aime-t-elle jouer aux jeux éducatifs, de société ?

M Les puzzles énormément. Les jeux de cartes, elle aime bien aussi.

E Avec qui ?

M Avec sa soeur, surtout avec sa soeur. Pendant les vacances, ça a été le 1000 bornes, l’apprentissage du jeu du 1000 bornes. Je ne sais pas ce que ça a donné, je ne m’en suis pas inquiétée.

E Elle joue avec vous aussi ? ou avec son papa ?

M Non pas vraiment. A des jeux de société, oui c’est arrivé, mais pas d’une façon habituelle.

E C’est pas une habitude chez elle ?

M Les jeux de société avec ses frères et soeurs oui. Moi, je suis souvent occupée à faire autre chose, c’est vrai que je ne prends pas le temps de passer du temps avec eux pour les jeux.

E Et avec son papa ?

M Mon mari, lui, il est vraiment très très pris par son travail, donc il fait l’effort... il s’est rendu compte que cette présence ponctuelle était très importante. Lui ce serait plutôt les jeux extérieurs. Il va plutôt les emmener faire un tour de vélo, du ballon, des choses comme ça.

E La place de la télévision ?

M Alors la place de la télévision. C’est très peu. Comment vous expliquez. Ça représente peut-être quand même une ½ heure par jour, souvent le soir entre 5 H moins le ¼ et 6 H moins le 1/4. Pour faire un peu un break... le soir pendant les vacances, peut-être un peu plus. Si par exemple un mercredi il pleut, on a enregistré quelques films, ils vont regarder un film mais pas forcément le programme de la T.V.

E Vous privilégiez davantage la vidéo, ou les films enregistrés ou achetés, ou le programme de T.V. ?

M Y’a des programmes qui sont très instructifs mais là aussi il faut savoir faire des choix, il faut trier aussi parce que, ça beau être marqué des dessins animés parfois...

E Vous avez des surprises...

M Oui, en ce moment il passe, dans la série des Mini keums sur la 3 ème, une série concernant, c’est un petit peu romancé sur l’histoire de France, sur Marie-Antoinette... c’est fait dans un style un peu japonais ce qui fait c’est... y’a quand même de la violence, des images qui sont très fortes... Je ne vois pas l’intérêt, malgré que c’est bien enrobé dans un truc français on pourrait dire, tiens après tout ils en garderont toujours quelque chose. Je ne trouve pas ça...

E pas ça génial...

M Oui, y’a quand même cette violence qui n'a rien à voir...

E Vous avez un contrôle sur la T.V. ou ...

M Oui, quand même. Oui. On essaye de.... quand on a 1 ou 2 enfants, c’est peut-être à peu près gérable mais quand on en a 5... On les croit sur les 3, ils sont rendus sur la 2 à autre chose. Je dis « ça ne vous intéresse pas la 3, alors faut éteindre », c’est tout. Au départ c’était prévu la 3, y’a pas de raison, donc faut éteindre. Ça finit par faire son chemin...

E Vous régentez l'usage de la T.V....

M Oui, on est obligé parce qu’il y a plein de choses qu’ils n’ont pas besoin de voir où ils passeraient des heures de l’après-midi. Si on veut. Un enfant malade peut voir des séries américaines dans l’après-midi...

E Est-ce que vous êtes lectrice ?

M Oui, je suis très lectrice.

E Vous êtes sur un roman actuellement.

M Non, depuis que j’ai mes enfants, je lis très peu de romans car cela m’emmène trop... je passe à proximité de mon livre, je me remets dans mon livre et le reste je ne le fais pas. Non, je regarde plutôt des revues, Géo,... historia...

E Vous êtes abonnée ?

M Non à la bibliothèque.

E Vous allez autant pour les enfants que pour vous à la bibliothèque.

M Ah bah tout le temps, oui. Et puis de toute façon j’aime bien lire le quotidien Ouest France. Je prendrais 20 mn 30 mn par jour pour lire le journal.

E Pour vous tenir informée du...

M de tout

E Et votre mari ?

M Mon mari il compte sur moi pour lui dire les nouvelles parce qu’il n’a pas le temps de lire. Il lit toutes ses revues, je ne sais pas quoi... la revue fiduciaire, des choses comme ça, le droit civil, le droit des affaires, enfin... il lit son comptant en travaillant.

E Il n’a pas forcément une lecture plaisir...

M Il ne prend pas le temps et c’est bien dommage. Ah oui, car il ne s’évade pas assez de son contexte, il a de la peine à faire le break.

E Habitudes d’écriture. Vous écrivez beaucoup ? Votre mari ?

M Mon mari écrit beaucoup dans son travail.

E Ici ?

M Continuellement parce qu’il travaille autant ici qu’à l’extérieur. Il a toujours une bricole à écrire.

E Et vous vous écrivez ?

M Non.

E Du courrier ?

M Oui, du courrier mais sans plus.

E Liste de course ?

M Jamais je m’abstiens.

E Pour conserver une mémoire ?

M Ah oui, parce que je trouve ça d’un ridicule. Tant pis si on a oublié la savonnette, tant pis.

(Arrivée d’Hélène).

E Les comptes ?

M Oui, il faut parce que mon mari, c’est très structuré, il est comptable.

E C’est vous qui le faites ?

M C’est moi.

E Liste à emporter en vacances ?

M Non jamais.

E Cuisine, écrivez-vous des recettes ?

M Des recettes que je trouve, oh oui.

E Pense-bête, des post-it ?

M Non.

E Pour les rendez-vous.

M J’ai un petit agenda.

E Que vous consultez régulièrement.

M Une fois par semaine.

E Un répertoire téléphonique ?

M Non.

E Tout en tête.

M Non, quand j’ai besoin, j’ai l’annuaire.

E Donc pas de répertoire.

M Non.

E Petits mots quotidiens dans la famille ?

M Ça arrive. Par exemple, si mon fils vient déjeuner et je ne suis pas là de la journée, c’est « dans le frigo, y’a » ou « pense à étendre le linge ».

E Vous écrivez des éléments de la vie quotidienne...

M Oui, ça arrive.

E Règles d’éducation ?

M Oui, quand même. On essaye la politesse, bon, c’est pas toujours évident car ils passent par des périodes où ça passe bien et des périodes où c’est le rejet, enfin, faut faire avec... Je dirais aussi le goût de l’effort. Chez nous c’est important. Ça et le travail bien fait. Deux choses vitales pour moi. Je pense que ça les aidera plus tard, tôt ou tard. Je pense que c’est ça le plus important, le goût de l’effort, je pense qu’ils ont un ou deux jours dans la semaine où ils sont de corvées.

E C’est bien réglementé.

M Oui, il faut faire attention. Toi c’est 2 jours dans la semaine, lui il est en pension, il lui reste le samedi et le dimanche, toi tu le feras au moins le dimanche. C’est en fonction de leurs activités extra-scolaires aussi, quelquefois y’en a qui sont tard le soir. Pour mettre la table le soir, pour la débarrasser, c’est pas toujours évident. Donc on fait en fonction cela, chacun son jeu.

E Mais y’a des règles communautaires.

M Automatiquement. Faire son lit, laisser une salle de bain propre, c’est essentiel. Je ne suis pas là pour passer après tout le monde.

E Vos exigences par rapport à son travail scolaire d’Hélène ?

M Qu’elle me rende un travail correct. On ne peut pas obliger... y’a forcément des moments où ce travail scolaire n’est pas présent, et là faut s’expliquer, faut comprendre pourquoi.

E Vous me parliez du rapport de confiance avec l’institutrice. Ça vous arrive de rencontrer l’institutrice, souvent ?

M Pas très souvent. Par rapport à Hélène on avait prévu de se voir régulièrement car on ne voulait pas, par rapport à son image, qu’elle et l’attention que demande le CP, qu’elle soit trop fatiguée, ou qu’elle ait un ras le bol par rapport à des choses précises de travail par rapport à ce qu’on demande. Donc on avait donc prévu des petits entretiens Toussaint, Noël, les vacances de février... mais comme ça se passe bien.

E Age ?

M 1959, mon mari 1955.

E Vous êtes laborantine, vos diplômes ?

M J’ai le bac. J’avais 16 ans et demi quand j’avais mon bac, j’ai fait un an de fac de pharmacie, je pense que j’étais trop jeune pour supporter la fac, c’est spécial. Là j’ai eu un ras le bol, j’ai recherché du travail, et ça s’est arrêté là. Mais ça aurait pu continuer.

E Votre mari.

M Son bac en 73, il a commencé à travailler. Et il a eu tout ses diplômes d’expertise comptable en travaillant.

E Il a fait un DESS en 4, 5 ans.

M Non, il a fait tous ses U.V., en cours du soir, par correspondance.

E C’est bac + ou 5.

M + 5.

E DESS Comptabilité. Il est cadre ?

M Oui, il est expert comptable.

E Revenu familial.

M Au-delà de 25.000.

E L’un de vous a-t-il redoublé une classe primaire.

M Non, moi j’ai sauté des classes.

E Avez-vous autre chose à dire ?

M Pour notre cas personnel, nous avons des enfants qui ont toutes les facultés pour pouvoir progresser. Je ferais, j’aurais plutôt envie de parler des enfants qui ont de gros soucis de compréhension, de langage... et là moi, quelque part ça m’interpelle justement... on essaye d’avoir une vie calme autant que faire se peut, je veux dire structurée. Alors que plus ça va, plus les gens ont des problèmes de couples, de travail, ça une influence automatiquement sur l’attitude et la vie des enfants. On sait bien qu’à 6 ans les structures éducatives doivent être déjà mises en place donc un enfant qui se trouve avec des problèmes familiaux dans cette période de la vie, il faut l’aider donc, je pense il faudrait voir à être plus vigilant par rapport à ces problèmes là. Le groupe classe, l’instituteur il est bien obligé de faire avancer tout le monde, mais malheureusement pour beaucoup de raisons, y’a une partie des enfants qui ne peuvent pas donner plus que ce qu’ils peuvent , donc je pense que ce serait bien pour donner à ces enfants là d’avoir plus de présence pour qu’ils aient au moins un pilier sur lequel se reposer...

E Vous pensez que la famille joue un rôle très important pour l’enfant ?

M Ecoutez si elle n’est pas capable, par les tas de problèmes qu’elle peut avoir, quelqu’un au chômage peut avoir la tête prise par ça et ne pas... comment laisser de côté des choses importantes pour leurs enfants. J’imagine bien, quand on a de gros soucis, on ne peut pas être partout à la fois. Justement, au niveau de l’école, par rapport au côté catholique, il peut y avoir quelque chose de fait pour donner un coup de main aux enfants...

E à travers d’autres structures...

M Je ne sais pas? Une aide aux devoirs plus précise, essayer d’avoir un contact de confiance. Quand on entend autour de soi, il y a des personnes qui ont systématiquement un peu la critique. « Il n’arrive pas, c’est à cause de... ». On a tous une part de responsabilité quelque part. Ces gens là oublient qu’ils sont un petit peu responsables et rejettent sur l’interlocuteur d’en face donc automatiquement l’enfant ne retrouve plus cette ambivalence, il a ses parents qu’il aime et qui sont un modèle pour lui et l’instituteur qui tient pas un autre discours mais presque alors... Voilà je trouve ça tellement dommage que les jeunes, les enfants ont tous des possibilités. Je ne sais pas comment ça peut se traduire, peut-être par des différences de rythme encore plus accentuées. Mais certainement par plus de dialogues.

E La place du langage pour vous est importante.

M Oui, parfois, ça tient à très peu de choses, un petit grain de sable de rien, une incompréhension qui dépasse l’entendement des adultes. On a vécu ça pour Hélène, j’étais vraiment estomaquée par rapport à ça. Parce que je suis allée voir sa maîtresse en moyenne section, elle pensait que le ciel allait lui tomber sur la tête, ça l’a perturbée alors qu’on ne lui avait pas dit quoi que ce soit. C’est à force de se remémorer les choses, de la faire parler, qu’on a fini par comprendre qu’elle avait peur du contact qu’on pouvait avoir sa maîtresse parce qu’en fin de compte mon fils qui était plus grand avait des problèmes dans son lycée et on avait été obligé de remettre les points sur les i et elle s’est dit « il va m’arriver la même chose » et nous on a pas pensé qu’elle aurait pu faire sa petite histoire et ça doit certainement arriver...

E Le fait d’en parler avec elle...

M Ça l’a complètement, ça a été tout de suite... Un ouf quoi ! On l’a senti revenir comme elle était.

E Ecoutez, je crois qu'on a fait le tour des questions, il ne me reste plus qu'à vous remercier.

Avis de l'enseignante sur l'enfant et sa famille

Entretien N° 41 enfant BARDIN

non évoqué avec l'enseignante