Entretien n° 10. Pré-enquête famille CHAVARD

Fait le 16 juin 1997

E La première question, qui est une question j’allais dire générique, puisqu’elle embrase pas mal de chose, quand je vous dis le terme apprentissage de la lecture, qu’est-ce que cela évoque pour vous ?

M Qu’est-ce que ...

E Apprentissage de la lecture, qu’est-ce que ça sous-entend pour vous ?

M Moi, moi au départ apprentissage c’est apprendre vraiment la base, lier les lettres entre elles, ce qui n’est plus le cas maintenant, mais moi au début c’était ça. Où on commence à apprendre chaque partie, bon les lettres, les syllabes, les mots. Je suis encore restée à cette méthode là.

E Oui.

M Je trouvais que c’était plus facile. Pour moi c’était ça l’apprentissage de la lecture. Je trouve que c’est plus compliqué maintenant pour un enfant... moi je prends par rapport à Miguel qui est resté bébé. Ben ça lui a fait beaucoup de choses d’un seul coup. Ça ne l’intéressait pas parce qu’au départ il ne devait pas comprendre donc, il essayait de suivre mais il n’était pas attiré. Mais bon en apprenant les syllabes, je sais pas, il aurait appris le E et le A, LA, dès le départ il l’aurait reconnu, plus facilement je pense. Donc ça l’aurait plus attiré. Voilà ce que je pense.

E Et vous l’avez trouvé en difficulté Miguel ?

M Oh Miguel oui, parce qu’il est très bébé. Alors il a eu le déclic comme ils disent les professeurs et l’orthophoniste au mois de mai. Donc il va passer en CE1 mais de justesse. Donc là il a fait de gros progrès mais pour lui ça été très dur. C’était trop gros pour lui, je crois, il était pas prêt. Non.

(silence)

E Oui.

M Il a mis très longtemps à reconnaître les mots. Pour lui, ça été très dur de reconnaître les mots, parce qu’il n’avait pas de mémoire visuelle, je sais pas. Parce qu’il y a des moments qu’il a bien commencé... pour apprendre l’alphabet déjà, il le savait à peine en CP. En arrivant en CP il le savait à peine donc il a été un peu, je crois, handicapé avec ça, il ne connaissait pas ses lettres, donc il n’arrivait pas à les associer. Donc, ce qui a fait, pour connaître les mots, il n’avait aucune idée de la première lettre comment c’était donc... soit c’était du par coeur ou alors c’était rien du tout.

E hm hm.

M Moi j’ai vu ça comme ça.

E Et il a commencé, disons à décoller, dans le courant du mois de mai !

M Oui. Au mois de mai il a eu, je sais pas, un déclic, en peu de temps il a réussi, pas à récupérer ce qu’il a perdu, parce qu’il peut pas, mais il arrive quand même maintenant à se débrouiller, il hésite, y’a des mots qu’il ne trouve pas mais bon il arrive à lire.

E Et vous attribuer à quoi ce déclic ?

M Je sais pas. Il a décidé de grandir je crois.

E Il a décidé de grandir, j’allais dire, d’un seul coup.

M Voilà. C’est un enfant, c’est le dernier, alors il boit encore son biberon. La maîtresse me dispute. Il a dit à la maîtresse qu’il avait arrêté, ce qui est faux, il en boit moins, mais dans sa tête il avait grandi. Il a dit bon je veux bien grandir, qu’il m’a dit un jour et petit à petit après il s’est débloqué et maintenant il arrive, pas à lire couramment parce qu’il va faire un CP, un CE1 aménagé avec un peu de CP. Mais il a fait... il se débrouille quoi.

E Il reste à Chauvé l’année prochaine.

M Il reste à Chauvé oui bien sûr. C’est peut-être aussi le fait qu’il soit bébé. Un enfant qui est moins, lui c’est le bébé...

E Et vous attribuez ça à quoi ?

M Ben à nous.

E A vous ?

M Oh oui, sûrement. C’est le bébé, on veut pas qu’il grandit. On l’a trop couvé et puis bon, le biberon, tout ça, toujours le bébé, quoi. On l’habille, on... Je crois que c’est nous qui les couvons de trop, on les laisse pas...

E C’est quelque chose qu’on vous a dit ou c’est vous qui en prenez conscience.

M Je le sais. On me l’a dit à tous mes enfants donc je suppose que cela doit être vrai... (rire).

E Oui. D’accord.

M Je crois que je suis un peu fautive. On me l’a dit à mon aîné en sixième, on me l’a dit à mon second en sixième, bon Jean-Mickaël un peu moins. J’avais moins le temps de m’en occuper puisque j’avais le bébé derrière donc... lui a moins souffert de ça. Pour Miguel c’est le même problème.

E Hm. Et l’apprentissage de la lecture, quand est-ce qu’il a commencé à apprendre à lire ? Pour vous.

M Pour nous ? Pour moi, .... il avait aucune notion de lecture avant le CP. Je vois des enfants des fois, je vois la petite voisine par exemple qui est plus jeune, y’a des mots qu’elle écrit déjà. Lui il n’écrivait rien du tout.

E Quel âge a-t-elle ?

M Elle est en grande section. Bon papa, maman, tout ça elle sait écrire, sans problème. Lui il n’avait aucune notion, aucune. Il est rentré en CP sans aucune notion de rien.

E Et à quoi attribuez vous ce décalage ?

M Je sais pas. Moi je crois que ça vient de lui. Il voulait rester. Je crois pas... je crois que c’est un problème personnel à Miguel. C’est pas un problème d’école. Ils sont tous allés à la même école. Elle, elle est toute seule. Non Miguel était bébé, et il voulait rester bébé, il voulait pas grandir. Il écoutait pas. Je crois qu’il était à l’école ... pour jouer. Malheureusement pour lui, il aurait fallu qu’il rentre en CP que maintenant, moi je crois. Parce que là il est prêt à apprendre mais avant il était pas prêt. Il était à l’école pour jouer mais pas pour apprendre et par rapport à ses copains c’est embêtant, je trouve.

E Oui, par rapport à ses copains, c’est embêtant ?

M Surtout à Chauvé, les écoles sont séparées donc si cette année on lui faisait redoubler carrément son CP, ça faisait vraiment une coupure avec ceux qu’il avait avant. Il y aurait eu deux classes côte à côte, ça se saurait moins vu parce que Miguel est petit de taille. Alors là y’en a qui arrive en CP, ils sont beaucoup plus grand que lui déjà. Donc être plus âgé et le plus petit, pour lui, je crois que cela aurait fait beaucoup étant donné qu’il a commencé, j’en avais parlé avec Madame Le..... parce qu’il avait fait beaucoup de progrès depuis qu’il se débloquait. Je préférais qu’il passe en CE1, qu’il l’aide et puis qu’il refasse un CE1 à l’occasion, mais il serait là il vous le dirait : « Je passe en CE1 mais je refais mon CP ». Dans sa tête... c’est un enfant qui sait qu’il n’arrive pas à suivre, ça ne l’embête pas spécialement. Il essaye de faire, il peut pas mais il va en CE1 en pensant qu’il refera son CP en même temps. Parce qu’il dit « je peux pas ». Il voit bien que bon il suit pas...

E D’après vous, il a commencé l’apprentissage vraiment depuis le mois de mai alors...

M Ben oui, moi je crois que c’est là qu’il s’est dit... avant il comprenait pas, il comprenait pas, il avait pas compris le système.

E C’est-à-dire, avant, quand ?

M Ben le système qu’il fallait associer les lettres pour faire un mot. Ça il avait pas compris, je crois pas que... (soupir) moi je trouve que c’est un handicap son alphabet qu’il ne savait pas, qu’il ne savait pas bien ses lettres quand il est rentré en CP..., qu’il ne comprenait pas. Je crois que c’est ça.

E hm hm.

M Et maintenant ça y’est, il sait bien ses lettres et tout, bon ça vient plus intéressant. Maintenant il veut lire partout, il veut tout dévorer.

E Il veut tout dévorer partout maintenant.

M Oui. Là on voit il veut apprendre.

E Et est-ce qu’avant il s’intéressait aux livres ?

M Non. Ben les images, il les racontait mais c’est pas pour lire, ça ne l’intéressait pas de lire. Maintenant il essaye de lire.

E C’est-à-dire que vous racontiez les images ?

M Oui.

E Quand est-ce que vous faisiez ça ?

M Oh bah quelquefois, le soir, quand il ne voulait pas dormir. C’est lui qui prenait un livre et qui me le racontait. Mais essayer de lire en dessous, non ça ne l’intéressait pas. Maintenant ça y est il essaye.

E Et vous avez commencé quand à raconter des histoires ?

M Oh bah souvent on en racontait. Pas tous les soirs, faut pas exagérer, mais de temps en temps. On prend un livre et puis on raconte une histoire. Ils ont des livres mais ce ne sont pas des enfants spécialement livres. Miguel peut-être plus maintenant, je vois que son frère........................................ un livre, oui j’arrive à lire dedans, mais c’est pas vrai, c’était tout petit et il était loin mais on voit qu’il veut, il veut découvrir, c’est vraiment...

E Il a commencé..., Miguel a commencé à découvrir le livre vers quel âge ?

M Il a toujours eu des livres entre les mains parce que moi j’adore les livres, mais... (soupir) le livre, les images, il aimait ça tout petit mais le texte, là, maintenant qu’il sait lire ça l’intéresse, avant ça ne l’intéressait pas.

E Vous, vous aimez lire vous ?

M Oui, je suis la seule de la famille.

E Vous êtes la seule de la famille à aimer lire !

M Oui, mes enfants n’aiment pas lire.

E C’est-à-dire ?

M Oh bah ils ne prendront jamais un livre... bon BD ils aiment... moi j’ai Tout l’Univers, ils les ouvriront jamais. Surtout ça, ça ne les intéresse pas du tout. Celui qui est en cinquième il était en train de lire un livre pour l’école, c’est la première fois que je le voyais lire, il me dit : « a y’est ça commence à m’intéresser ». Je dis : « il va être temps ». Est-ce qu’ils ont pas pris le temps de lire, je sais pas. J’ai pas beaucoup le temps de lire maintenant, j’ai lu beaucoup avant, mais maintenant devant eux je lis... pratiquement jamais, parce que j’ai pas le temps, c’est peut-être ça aussi, je sais pas.

E Vous êtes sur un roman actuellement ?

M Non, non j’ai rien. J’ai pas le temps, je travaille, les cinq enfants. J’ai plus le temps de lire.

E Vous n’avez plus le temps de lire.

M Mais je relirais, ça c’est sûr mais bon... plus tard.

E Et qu’est-ce que vous aimiez lire ?

M Oh, n’importe quoi. J’avais Tout l’Univers, quand j’étais petit je les ai lus du premier volume au dernier volume. J’adorais n’importe quoi, les romans, les livres autrement, j’aimais tout lire mais bon...

E Alors Miguel a découvert le livre vers quel âge, c’est-à-dire les images que vous lui montriez vers quel âge ?

M Je sais pas, un an et demi, deux ans. Les livres qu’il avait de ses frères, oh oui, je pense.

E Une fois de temps en temps.

M Oui, voilà. Bon ils en ont dans leur chambre, ils en ont partout, je crois qu’il a pu toujours en regarder... je sais pas. Il était pas tenté par la lecture, il était pas curieux, je sais pas.

E Et pourtant c’est un enfant dynamique ?

M Oui, oui.

E Oui.

M Oui.

E Est-ce qu’il est abonné à une revue enfantine ?

M Je l’ai abonné mais comme ça ne l’intéressait pas, j’ai arrêté.

E Quand vous dites que ça ne l’intéressait pas, ça veut dire... ?

M Il ne la regardait pas.

E Il ne la regardait pas.

M Bah il regardait les images et puis c’était tout. Non ça ne l’intéressait pas du tout. Je ne sais plus ce que c’était. Je ne m’en rappelle plus. Un, c’était Hibou, mais lui je sais plus.

E Et pour les autres garçons, c’était pareil ?

M Y’a que Jean-Mickaël qui aime lire, il va entrer en CM1, lui un livre il va le lire. Il est plus intéressé par la lecture, de toute façon il aime plus l’école. Moi ça c’est autre chose, c’est pas du tout pareil que les autres. Moi, je crois que si on aime l’école, si on aime le système d’apprendre, on aime la lecture. C’est un peu... Si on a envie de découvrir, un enfant qui n’aime pas la lecture n’a pas envie d’apprendre à l’école. Pour moi c’est ça.

E C’est-à-dire que pour aimer lire, il faut aimer l’école !

M Oui, moi, aimer l’école peut-être pas, mais il faut aimer apprendre, aimer découvrir quelque chose, la lecture c’est ça, ça apprend toujours quelque chose dans un livre quel qu’il soit, quand tu lis pas, tu n’apprends pas de chose. Moi c’est ça. La lecture c’est la base de tout. Même quand tu apprends pas à l’école, si tu lis tu peux apprendre quelque chose.

E C’est comme ça que vous voyez la chose !

M Moi c’est comme ça.

E Et l’apprentissage de la lecture, c’est la responsabilité de l’école ?

M La lecture, non je crois pas que c’est l’école. C’est l’enfant, je crois que c’est l’enfant qui veut ou qui veut pas. C’est ça. Un enfant qui a envie d’apprendre il apprendra assez vite. Jean-Mickaël, il a eu du mal à apprendre, du jour où il m’a dit : « tu veux que j’apprends », deux mois après il savait. Je crois que c’est eux qui décident d’apprendre on peut pas les... quelle que soit la méthode, si ils ont pas envie, on n’y arrivera pas. Faut qu’ils soient prêts à lire, comme ils disent « le déclic », le fameux déclic, je ne sais pas à quoi ça correspond mais y’a un moment où ils ont envie et ça y’est ça rentre. Vraiment je le vois comme ça. L’école je crois pas, je crois que... non c’est possible avec la méthode qu’ils ont c’est sûrement possible, mais il faut que l’enfant le veuille dès le départ. Faut qu’ils soient prêts à apprendre quand on leur propose. Je ne crois pas que ce soit ni les professeurs, ni... moi chez moi, je les ai fait lire, ils ont pas envie, ils ont pas envie ! On voit bien quand ça veut pas rentrer, ça veut pas rentrer ! Non je crois que c’est pas l’école.

E hm hm. Vous parliez tout à l’heure qu’ils avaient des livres. Ce sont des livres qui leur ont été acheté ou...?

M C’est moi qui les ai abonnés souvent, le club des petits lapins, y’a souvent des livres qui traînent partout dans la maison. D’ailleurs la bibliothèque est dans un état épouvantable. Ils en ont partout dans leur chambre aussi, mais ils ne les ouvrent pas spécialement, non. Oh Miguel, ça y’est, le club des petits lapins, il commence à lire, on voit que bon il a envie.

E Ce sont des livres qui ont été achetés ?

M Des tout petits livres que j’ai abonné... .... des tout petits livres pour eux de 4 - 5 ans. .............. dans leur classe, il retrouve tous ces livres là.

E Oui, mais ça lui plaît !

M Maintenant ça lui plaît. Il a envie de découvrir.

E Oui. Il y a une bibliothèque à Chauvé ?

M Oui.

E Ça vous arrive d’y aller ?

M Très rarement.

E D’ailleurs Miguel me dispute. Demain je vais à l’orthophoniste, tu m’emmènes après à la bibliothèque. Donc je crois que je vais commencer à y aller parce que bon... Je vois que Miguel a envie de lire donc c’est pas le moment de l’arrêter. C’est vrai que j’y suis allée quelques fois, pas souvent. Mais bon, il va falloir reprendre. Les enfants demandent. Il va surtout, je crois, les grands, parce qu’il y a un club vidéo plutôt que pour la lecture... je vais voir mais (rire) j’ai un doute.

E Oui, il y a un club vidéo et vous pensez que...

M Oui, un moment à la bibliothèque, on pourrait peut-être prendre des...

E des cassettes vidéo.

M Voilà, mais le petit, c’est pour la lecture. Il m’a dit : « On va chez l’orthophoniste... », parce qu’il est vraiment enchanté d’aller chez l’orthophoniste, c’est le plaisir de sa semaine « ...et après on va à la bibliothèque ».

E Pour quelle raison va-t-il à l’orthophoniste ?

M Bah euh... pourquoi il va à l’orthophoniste, parce que... il arrivait pas du tout à gérer cette lecture, il était complètement perdu. Il a commencé je crois au mois de janvier, parce que au mois de novembre, ....... déjà quand il a commencé son CP j’ai été trouvé la maîtresse en disant : « comment vous trouvez Miguel, est-ce qu’il va suivre ? » Parce que je lui dis que pour moi il arrivera jamais son CP. Elle me dit : « non, pour l’instant ça va ». Et au mois de novembre, elle m’a appelé, et m’a dit : « non, c’est une catastrophe, il n’y arrive pas ». Moi je ne le voyais pas du tout ....... son CP, donc ça m’a pas surpris. Donc on a décidé de faire de l’orthophoniste, et on a commencé mi-janvier je crois. Et ça lui a tout de suite plu et je crois que ça l’a beaucoup aidé. Je sais pas comment, comment ça l’a aidé, mais l’orthophoniste pour lui, ça a été un bien aussitôt. Le mardi soir il se couche, vite, vite, demain c’est l’orthophoniste. C’est la joie de sa semaine. On voit que... ah il faudrait pas rater l’orthophoniste pour rien.

E Et vous attribuez ça à quel élément ?

M Je crois que c’est la personne, je crois qu’elle l’a bien pris dès le départ et... je crois que c’est par rapport à la personne. Il a peut-être trouvé aussi que ça l’aidait, il me l’a jamais dit mais je crois que c’est la personne, il aime bien la personne, elle a bien su le prendre et ... Il a vu peut-être aussi qu’il faisait des progrès pas longtemps après, ça l’a encouragé, je ne sais pas pourquoi... mais il adore aller à l’orthophoniste.

E Et vous savez ce qu’elle fait pendant l’orthophonie ?

M Non. J’ai été la première fois quand elle a fait les tests. Là j’ai appris qu’il était gaucher et droitier. Des trucs que nous on voit pas. Pour nous il était carrément gaucher, c’est pas vrai il est gaucher et droitier. C’est tout ce que j’ai vu des tests puis bon... Ce que je trouve dommage, c’est qu’elles ont pas le droit de rentrer en rapport par écrit avec l’école apparemment. Parce que moi je pensais qu’elles allaient pouvoir correspondre...

E C’est-à-dire ?

M Moi apparemment, moi je pensais, à l’orthophoniste : « Vous pouvez peut-être écrire un mot à la maîtresse, ce que vous pensez de Miguel...... où vous voyez Miguel, où il en est. Et elle m’a dit : « On n’a pas le droit d’écrire aux écoles. On peut téléphoner mais on n’a pas le droit de laisser de trace de notre travail ». C’est dommage, parce qu’ils travaillent ensemble pour le même but.

E Elles peuvent se rencontrer normalement.

M Oui, ou se rencontrer, je sais pas, ou par téléphone, je sais pas si elles l’ont fait. Enfin bon... ça a marché. Y’a pas que les professeurs qui sont en jeu. Je crois que c’est les enfants d’abord, si l’enfant ne veut pas apprendre, on a beau... le professeur a beau être génial et tout ça, ça veut pas, ça veut pas.

E Alors vous disiez tout à l’heure que les enfants aimaient beaucoup la vidéo, ça leur arrive de regarder la télévision ?

M Oui, Miguel est très cassette vidéo. La télé ça ne l’intéresse pas.

E Et que regarde-t-il en cassette vidéo, qu’est-ce qu’il aime ?

M Les films d’aventure, les dessins animés, quand il y a un peu de bagarres, karaté, à part ça... la télé, les dessins animés ça ne l’intéresse pas, si c’est un dessin animé sur une cassette, ça l’intéresse. Après je sais pas, plus les cassettes ça l’intéresse.

E Il regarde souvent la télévision.

M Lui, oh oui, c’est son... il resterait des après-midi devant sa télé. Bon, maintenant, il fait plus beau, il a plus tendance à sortir, mais l’hiver il resterait toute la journée devant sa télé.

E C’est une moyenne de combien dans la semaine, 1 heure, 2 heures par jour ?

M Oh, une bonne heure par jour.

E Une bonne heure par jour.

M Là, moins maintenant, parce que j’ai changé mes horaires. Avant j’arrivais à 19 heures le soir, ils étaient tout seuls, donc il suffit que le papa travaillait aussi, donc ils regardaient la télé, y’avait que ça. Bon maintenant j’arrive à cinq heures et demie donc maintenant ça change, on bouge plus, on peut sortir, on fait d’autres choses, dont tout change, mais y’a pas beaucoup temps, comme je viens de changer d’horaires, on a pas eu trop le temps d’apercevoir par rapport aux enfants. Pour cette année, l’année scolaire, ça a rien changé.

E Et le travail le soir, je suppose que la maîtresse donne du travail le soir. Comment se débrouille-t-il pour faire son travail le soir ?

M Bien c’est moi. Tout le monde m’attend.

E Tout le monde vous attend.

M Même mes grands parce que si je viens pas, si je ne dis pas mon mot, ils vont surtout pas les faire. Donc... Jean-Mickaël et Miguel, je les prends chacun leur tour. Donc quand je finissais à 19 heures c’était très rapide parce que j’avais pas le temps ; ça c’est sur, ça c’est flagrant. Si on a pas le temps de s’en occuper, ils en prennent partie. Donc Lucas, c’est un petit gars qu’on a en tutelle, il est en sixième, donc lui, je n’ai pas eu le temps de m’en occuper comme il fallait. Il ruse à chaque fois pour faire le minimum de leçons. Donc je surveille ses devoirs, je regarde par rapport au cahier de texte mais je contrôle pas. Pas toujours. Quand je contrôle c’est pas triste d’ailleurs. Mais les petits je les prends chacun leur tour, pour la lecture et pour les leçons, les deux petits.

E Et Miguel, vous pouvez me décrire un petit peu son travail du soir ?

M Miguel il a souvent de la lecture. Ben c’est la joie, Miguel il est enchanté de faire ses leçons, les deux petits. Il sort toutes ses leçons sans problème...

E Sur la table.

M Ah oui, oui. Il étale tout. Il sait très bien ce qu’il a à faire et c’est une joie de le faire. Même quand il n’arrivait pas à lire sa feuille, parce que la maîtresse m’avait dit : « Même si il lit que deux lignes c’est pas grave », comme il arrive pas. Non c’est la joie, il allait jusqu’au bout, enfin il répétait, je l’aidais. Non non, c’est la joie pour faire ses leçons.

E Il fait son travail tout seul ?

M Tout seul ?

E C’est-à-dire il a sa feuille devant lui, il fait son travail tout seul ?

M Non, je suis toujours avec lui.

E Vous êtes toujours avec lui.

M Oh, oui, autrement il ne sait pas. Sans maman il sait pas (rire). Ça c’est... bon... Jean-Mickaël se débrouille tout seul. Hier soir il a fait ses leçons tout seul, il les fait. Mais lui non.

E Jean-Mickaël est peut-être plus âgé ?

M Oui, il a deux ans de plus. Oui, et puis lui il aime ça l’école, il fait ses devoirs avec plaisir. Mais Miguel, non il faut que je sois avec lui, parce d’abord si il sait pas lire, il va lire... il va se tromper si je suis pas avec lui. Je suis bien obligée d’être avec lui. Non non, il est... non ses leçons il aime bien.

E Et qu’est-ce qu’il a de spécifique à faire ? Si vous pouviez être précise !

M Il a une page de lecture, pratiquement tous les soirs, une fiche et quelquefois des numéros sur son ................ de maths qu’il a, comme lui il est en retard sur les autres. Quelquefois il en a pas mal à faire, et puis c’est tout ce qu’il fait. Il n’a pas d’autres choses à faire. Mais même quand il y en a beaucoup, ça ne le dérange pas du tout.

E Pendant combien de temps travaille-t-il à peu près ?

M Un quart d’heure. Un quart d’heure, parce la fiche de maths, si il en a plusieurs à faire, ça va être sur plusieurs jours, donc on va étaler donc un quart d’heure vingt minutes, pas plus.

E Juste après l’école !

M Je débauche... à 18 heures à peu près. Je débauche à 17h30 donc après je les fais toute suite en arrivant.

E C’est-à-dire que les enfants arrivent ici vers 17 heures sans doute ?

M Oui, exactement.

E D’accord.

M Donc ils attendent que je débauche et puis bon on fait les leçons pas longtemps après.

E D’accord. Vous disiez tout à l’heure que vous lisiez autrefois pas mal, un peu de tout, mais maintenant au niveau des supports écrits que vous avez dans la maison ; est-ce que par exemple vous utilisez un agenda de façon quotidienne ?

M Ah non. Je n’écris pas. J’ai un calendrier où je mets tout ce que... tous les rendez-vous si vous voulez, mais c’est tout. C’est tout ce que je fais.

E Hm hm. Au niveau du téléphone, est-ce que vous avez un répertoire téléphonique dont vous vous servez ?

M Non, j’ai mon annuaire, non...

E Vous n’avez pas de répertoire téléphonique !

M Non.

E Maintenant au niveau de, je suppose que vous faites des photos ou des films de vacances ou autres, est-ce que vous ordonnez, est-ce que vous classez ces photos ?

M Je ne suis pas photos du tout.

E Vous n’êtes pas photos du tout.

M Le minimum et je n’ai aucun plaisir à ...

E Non, c’est pas votre truc.

M Non non c’est pas mon truc.

E Oui d’accord. Et au niveau des comptes de la maison maintenant est-ce que vous notez vos comptes... ?

M Oh, en gros. Je ne suis pas à noter tout ce que je dépense. On fait les factures qu’on gagnent et on sait à peu près ce qu’on dépense par semaine, mais c’est tout. On note pas tout tout.

E Donc, y’a pas de suivi ...

M Non.

E ... au niveau du carnet de chèque. Vous faites ça comme ça. Oui, oui.

M Oui.

E Et au niveau de vos papiers administratifs, est-ce que vous les ranger, ou est-ce ...

M Oh oui, là on les classe.

E Oui d’accord. Et entre les différents membres de la famille est-ce que vous vous faites des petits mots comme ça se fait des fois...

M Oh ben oui souvent. Moi, mon mari... c’est... on part chacun notre tour en fait. Les enfants aussi. Mon fils aîné a pris l’habitude, maintenant quand il fait quelque chose... le jour où....... n’est pas là c’est écrit. Oui. Oh les autres on est plus souvent là donc... on sait toujours où ils sont, ils improvisent pas encore. En général on ne préfère pas mais l’aîné a pris l’habitude... je suis là... je reviens vers telle heure où ...

E De façon à ce que les autres membres de la famille ne s’inquiètent pas.

M Oui, voilà.

E Je vois que vous avez de belles coupes là...

M Oh la la.

E Vous faites partie d’association ?

M Non, coupe de boules, coupe de judo, c’est tout... coupe de pêche au fond.

E Alors c’est des coupes qui sont gagnées par quelqu’un de la famille ?

M Oui.

E Vous-même peut-être ?

M Non. (rire). Non le mari et les enfants. Concours de boules, concours de pêche, coupe de judo je crois, un peu de tout.

E C’est-à-dire que votre mari fait partie des associations peut-être ?

M Non, il a eu des coupes avec les concours de pêches je et puis concours de boules. J’ai un fils qui a dû en avoir au judo et les médailles c’est le judo surtout.

E C’est pas mal ça. C’est impressionnant.

M Oui, mais ils sont pas tous grands. Ils sont pas tous grands.On va les mettre où ?

(rire)

M Arrêtez !

E Vous ne faites pas partie d’association ?

M Je ne fais rien du tout. Trop de boulot. Non.

E Vous dites cela avec un ton de déception !

M Oh oui. Ben c’est sûr. J’ai pas le temps.

E Vous n’avez pas le temps.

M On dit toujours quand on veut, on peut. C’est vrai. Mais arrêter de travailler, faire à manger, et aller recourir non. Non. Je n’ai pas le courage.

E Vous n’avez pas le courage. Vous travaillez à temps plein ?

M Trois-quart de temps.

E Trois-quart de temps.

M Je ne travaille pas le mercredi, mais je travaille quelques week-ends, donc...

E Vous êtes administratives dans une usine... ?

M Non non, cuisinière... à côté, une maison pour malades mentaux.

E Ah oui. D’accord, très bien. Oui, je suis passé devant.

M Oui. Donc, non, non...

E Vous faites la cuisine, donc vous êtes d’astreinte au moment des repas.

M Voilà, moi je fais toujours maintenant 9h30 - 17h30. Avant je faisais 11h - 19h. Ce qui expliquais que je n’avais pas toujours le temps......C’était la course, faire les leçons, faire à manger, donc j’ai réussi à gagner un peu de temps, donc c’est très bien.

E Et votre mari, lui travaille dans... ?

M Donc..... lui il fait une semaine du matin, une semaine du soir. Alors lui, il ne fait pas les leçons.

E Il ne fait pas les leçons ?

M Jamais. Ou alors c’est des comédies épouvantables, donc les enfants ne veulent pas... (rire)

E C’est-à-dire ?

M Il est très très exigeant, beaucoup plus exigeant que moi. Moi dès le moment qu’ils ont compris, ça me suffit, je ne fais pas trop attention à l’écriture. Mon mari faut que ce soit parfait. Donc les enfants... ben... non, il préfère que ce soit moi. Non, puis ça l’intéresse pas trop. Vous lui avez demandé aujourd’hui pour faire à ma place ?

E Oui, pourquoi pas, oui.

M Bon il en est pas question.

E Même il aurait pu venir. Il aurait son avis à donner.

M Il aurait dit : « je ne m’en occupe pas ».

E « C’est pas mon truc ».

M Voilà. Non... Dommage... parce bon... j’aurais bien aimé.

E Hm hm. Il pense que c’est peut-être à la femme de faire ce travail là.

M Il croit que... il est pas capable.

E Ah oui ?

M Le sentiment d’infériorité... bon, je crois pas que c’est très très vrai, mais il s’est mis ça dans sa tête et bon il s’en sent pas capable et donc il baisse les bras au départ.

E Donc il ne prend pas part... ça lui arrive de temps en temps de prendre un livre avec les enfants ?

M Non. Très très rarement.

E hm.

M Il va lire. Si, Miguel lui a ramené le livre « des trois brigands » qu’il a lu. Là il va le lire dans son lit le matin tout seul. Il va le relire. Bon, il regarde c’qui font les enfants mais il prend pas le temps, comme il dit : « j’ai pas le temps ». Un peu comme moi, c’est une excuse. Mais non je crois qu’il a pas... D’abord pour lui il lit pas assez vite... donc... je suis sûr qu’il a un problème d’infériorité par rapport à ses enfants parce qu’il lit très doucement et il dit les enfants vont lire... il lit mal, ils lui feront pas de cadeau, alors je crois que c’est pour il préfère ne pas affronter, ne pas essayer, comme ça il est sûr que personne ne dit rien.

E Ça lui fait peur un petit peu.

M Oui, c’est ça, je pense. Vous regardez la pendule, mais elle est arrêtée.

E Non non je ne regarde pas la pendule, je sais à peu près quelle heure il est... je ne veux pas trop vous gêner, c’est pour ça. Vous connaissez un petit peu la méthode de lecture qui est utilisée actuellement. Vous m’avez parlé tout à l’heure de méthode globale...

M Bah pour moi, c’est une méthode de mémoire. A force de voir des mots, il s’en rappelle, c’est ça. Une méthode de mémoire... oui c’est ça. Il voit tous les jours les mêmes mots donc... c’est vrai que ça rentre à force.

E Y’a un titre, y’a un livre que les enfants ont. Vous savez autrefois, y’avait un livre. Est-ce que là y’a un livre ?

M Non, non. C’est plusieurs petits livres qu’ils ont dans l’année. Ils ont feuillet par feuillet et voilà. Donc, je suppose que c’est un problème de coût. Comme ça ils ont qu’un livre les professeurs, ils font les photocopies et... Enfin je crois que c’est ça.

E Oui, un problème de coût...

M Euh... mais c’est bien aussi cette............. là parce que l’enfant découvre sa fiche tous les jours. Je pense que c’est bien pour eux. Et, quand l’année est finie, il agrafe, c’est finit. Ils ont leur petit truc...

E Ils sont rendus à combien de livres là ?

M Je crois que c’est le troisième cette année qu’ils ont fini.

E Le troisième.

M Alors, soit qu’ils vont pouvoir en recommencer un autre mais bon... Si c’est très intéressant, comment il faut que l’enfant faut qu’il pige dès le départ qu’il faut retenir les mots. Un enfant qui ne sait pas dès le départ photographier les mots ne peut pas apprendre à lire. S’il regarde les mots sans essayer de se les rappeler... il les voit, mais il ne les retient pas. Je crois qu’faut l’enfant comprend dès le départ qu’il faut retenir, photographier ces mots là et je crois que mes gars n’avaient pas fait attention. Je crois que c’est ça, parce qu’elle me disait que même les prénoms de ses copains, lui, ne les reconnaissait pas, alors qu’il y en a qui les reconnaisse dès le départ. Lui ne faisait pas attention.

E Il ne faisait pas attention.

M Non.

E Il ne les reconnaissait pas même quand il était beaucoup plus petit.

M Oui, voilà. En milieu de CP, il ne reconnaissait pas le prénom de ses copains, ça c’est sûr.

E hm hm.

M Là, maintenant ça y est. Il les lit.

E Tous.

M Pratiquement.

E Bon d’accord. Est-ce que ça vous arrive de donner des exercices supplémentaires à votre enfant après...?

M Non.

E Non ?

M Non. Bon j’ai pris des cahiers de vacances, comme tout le monde. Une catastrophe ! parce que tous les jours il faut se battre pour les faire faire, donc non. L’année dernière, la maîtresse m’avait fait un.... La maîtresse à Miguel m’avait fait plusieurs fiches à faire faire à Miguel, parce qu’il avait des problèmes. Il les a fait. Mais hormis ça.

E Ça ne l’occupait pas en fin de compte.

M Ben là, ce que la maîtresse lui a donné à faire, je lui en donnerai plus, il les ferait peut-être, ça c’est pas évident qu’il ne les ferait pas. Ah non, parce que là ce matin on a trouvé un exercice, des jeux sur un livre, il a dit : « oh ben ça on l’emmènera ça en vacances », parce que ça lui a plu. Oh si, il ferait plus si je lui demanderai, il ferait.

E Il aime bien jouer autrement ?

M Jouer oui, il joue tout seul.

E A quoi il joue tout seul ?

M Ses Actions Man là.

E Oui.

M Les jeux de société, mais ses frères ne veulent pas toujours jouer avec, donc... y’a un gros problème. Puis aux voitures, comme tous les petits garçons.

E Il aimerait jouer aux jeux de société ?

M Oui. Si au nain jaune, il aime bien jouer, aux petits chevaux...

E Ça lui arrive souvent de jouer... ?

M On joue l’hiver... ben quand il y a les concours de cartes, nous on joue au nain jaune, donc...

E Parce que papa aime bien jouer au cartes !

M Voilà. Il fait les concours de cartes, bon ben nous on s’occupe un petit peu dans la soirée. Alors eux il regarde la télé, parce que souvent j’ai pas le temps de jouer avec eux. Les soirs d’hiver, souvent on fait des jeux de société.

E Quand vous dites on fait des jeux de société, ça veut dire que vous jouez avec eux ?

M Ah oui.

E Et ça vous arrive souvent ?

M Quand on a le temps. Quand on est tous à la maison et que... quand papa est là c’est différent parce qu’il y a toujours des choses à faire. Mais quand on est que nous, oui, on joue plus souvent, oui. Mais quand on peut on joue. Bon pas l’après-midi mais le soir.

E C’est-à-dire deux ou trois fois par semaine ?

M Oh non. Surtout l’hiver. L’hiver ça doit être toutes les semaines parce que le papa fait des concours de cartes toutes les semaines, donc on peut jouer 5 - 6 fois en peu de temps et puis être un moment sans jouer. Mes enfants aiment bien, ils réclament à jouer aux jeux de société.

E Quand vous appelez jeux de société, qu’est-ce que vous appelez... ?

M Nain jaune, petits chevaux... qu’est-ce qu’ils ont encore... surtout le nain jaune. Ils aiment bien l’argent. Le Monopoly. Ils ont le Monopoly junior, ils ont bien aimé aussi, ils ont le Labyrinthe aussi, bon ça on a joué aussi. Un peu tous les jeux de société.

E Ils aiment bien...

M C’est le fait que je joue avec eux, je pense. Parce tous les deux, ils se battent au bout de... donc...

E ...c’est pas possible.

M Non.

E Et les grands...

M Ben les grands, oh bah non, celui de 13 ans et de 15 ans jouent avec nous. On est tous les cinq souvent à jouer. Ils ne sortent pas le soir encore donc... si on joue, eux ils jouent. Ou alors ils regardent un film à côté, autrement ils jouent avec nous aussi.

E Et Miguel est-ce qu’il aime bien dessiner, écrire ? On n’a pas soulevé ça en entretien.

M Il dessine oui, il se fait des petites histoires sur ses papiers. Il commence à dessiner, mais bon il dessine pas très bien donc ça l’encourage pas non plus. Avec sa main gauche c’est pas très facile apparemment mais il essaye, il essaye...

E Il essaye depuis peu en fin de compte.

M Oui voilà, comme la lecture, moi je crois tout ça, ça c’est... un déblocage... je sais pas.

E Quand il était en petite section, il n’avait pas trop envie de dessiner !

M Non. Non il n’y arrivait pas. Il dit : « je dessine mal ». Donc ça ne l’encourageait pas de ne pas réussir. De toute façon, il tentait une fois ou deux mais après ça ne l’intéressait pas, il n’y arrivait pas. Moins bien que d’autres sans doute, bon ben...

E Il a commencé à vouloir dessiner, à avoir une conscience pour pouvoir écrire et avoir un petit peu une connaissance de l’alphabet ces derniers temps en fin de compte !

M Oui. Au bon moitié de son CP. La première moitié, il était complètement perdu. De toute façon au mois de novembre, il était complètement perdu. Après les vacances de la Toussaint... avant on avait cru un moment que ça allait.... y’a eu les vacances alors... tout... on aurait dit qu’il avait tout perdu ce qu’il avait appris. C’était une catastrophe. Il a fallu redémarrer. Au mois d’avril il a recommencé un petit peu...

E Est-ce qu’il a compris qu’il fallait mettre des lettres ensemble pour que ça fasse des sons ?

M Moi j’ai commencé à lui mettre, j’ai commencé à lui mettre le L et A. Quand il commençait à connaître les lettres je lui disais L et A, LA, je me suis retournée comme ça. Je ne sais pas si c’est ça, mais ça aide quand même.

E Vous avez fait ça quand ?

M Bien quand il a commencé à faire ses lettres.

.......

M Avant on lui disait : « qu’est-ce que tu vois comme lettres ? » mais il ne les savait pas donc on peut rien faire.

E Hm. Hm.

M Moi je crois que c’est le problème de pas savoir ses lettres alors ça l’a... il ne voulait pas apprendre, de toute façon, ça ne l’intéressait pas du tout.

E Ça ne l’intéressait pas.

M Non.

E D’après vous qu’est-ce qu’il faut faire un petit peu pour qu’un enfant... ait davantage de communication avec les autres ?

M Qu’est-ce qui faut faire ? Qu’est-ce que vous appelez « communication » ?

E Communication, expression, puisse aller vers les autres et tout ça.

M Miguel il va très bien avec les autres, il a aucun problème de communication, aucun problème... ni renfermé, ni... C’est un problème... il se sentait bébé je crois. Lui a aucun problème de société, si on peut dire société.

E Oui.

M Mais non sa maîtresse dit le contraire. Avec tous ses problèmes qu’il a, comme il est des fois loin derrière les autres, il devrait discuter... non c’est pas du tout son problème, il accepte son handicap, non, mais son retard, il fait avec, non il ... apparemment ça lui cause pas de problème. Il se fait accepter par les autres. Les autres pourraient dire : « t’arrives pas, tu restes derrière », elle disait que non ça se passait très très bien. Comme il a bon caractère, bon il arrive à passer.

E Ça vous arrive de rencontrer les enseignants de temps en temps ?

M Ben quand je vois qu’il y’a des problèmes. Au mois de novembre quand j’ai vu que ça n’allait plus du tout j’ai dit bon... et puis autrement j’ai été la voir y’a un mois a peu près pour savoir ce qu’il pensait faire de Miguel, avant les décisions de classe. Je voulais leur dire que je ne voulais pas qu’il redouble son CP, pas parce qu’il n’était pas capable, pas parce qu’il avait réussi son CP parce que je voulais qu’il passe avec les autres c’est tout. Je savais bien qu’il n’avait pas réussi son CP mais je ne voulais pas non plus l’interrompre dans son...

E ... dans son élan ?

M Voilà. Parce que j’avais peur que ça allait casser. Bon ils ont respecté à peu près ce que j’ai demandé puisqu’il passe en CE1 aménagé en CP. Bon avec un bilan au début de l’année scolaire, pour voir comment ils vont faire, eux, pour aménager un temps... ce qu’il faut retrouver en CP, comment ils vont faire parce que c’est vrai que ça pose des problèmes dans les écoles, surtout à Chauvé, l’école séparée c’est pas évident. Mais je suis bien contente qu’ils ont accepté qu’il passe en CE1 parce que... lui est heureux.

E Il est heureux !

M Il est heureux en se disant : « je fais un CE1, mais je refais mon CP ». Je lui ai dit : « tu redoubleras sans doute ton CE1 ». « Oui, peut-être », l’air de dire on verra. Il va peut-être réussir en CE1 mais ça, ça m’étonnerait.

E Une question qui n’a rien à voir avec l’apprentissage de la lecture, c’est davantage par rapport à vous. Quel est votre dernier diplôme plus élevé que vous avez obtenu ?

M Moi c’est mon BEPC.

E Votre BEPC. Est-ce que vous avez fait une autre formation...

M Je n’ai rien fait du tout. Mes parents n’ont pas voulu me payer l’école. J’ai arrêté et après j’ai toujours travaillé.

E Bon d’accord, vous avez travaillé. Et votre mari ?

M Mon mari, il a son certificat d’études et il a dû rater son CAP de soudeur je crois.

E Il a le niveau de CAP Soudeur. D’accord. Et son activité professionnelle, il est dans les métaux en fin de compte ?

M Là il fait des armatures, il soude des tiges de fer mais c’est automatique, ça n’a rien à voir avec la soudure qu’il a appris donc...

E D’accord, il travaille à temps plein !

M Oui.

E Une question indiscrète toujours pour une femme, quelle est votre année de naissance?

M 1958.

E Et votre mari ?

M 1960.

E D’accord. Ce sont des questions qu’on pose régulièrement dans l’ordre. Je pense qu’on a fait le tour du problème, sauf une dernière question, je vois ça sur mes notes ; sans rentrer dans le détail de votre revenu familial, vous avez un revenu inférieur 6000, entre 6000 et 15000, entre 15000 et 25000, ou au-delà de 25000 ?

M A tous les deux ? Allocations comprises ?

E Comme vous voulez, c’est pas grave.

M Au environ de 15000.

E Au environ de 15000, d’accord. Voilà, est-ce que vous de votre côté vous auriez autre chose à dire ? ... Par rapport à l’apprentissage de la lecture, école, famille ?

M Non, je crois que la base pour qu’un enfant apprenne, c’est que l’enfant il veut. On a beau lui mettre tout ce qu’il veut entre les mains si il comprend pas qu’il faut apprendre, ben il ne travaille pas.

E Mais qu’est-ce qui peu faire qu’il puisse comprendre !

M (rires) Si vous pouviez me dire. J’ai des enfants qu’aiment pas l’école alors c’est ça qui m’énerve. Non je ne sais pas. Si vous pouviez me dire ce qu’il faut faire ce serait bien.

E Hm hm.

M J’ai rêvé d’avoir des enfants qui fassent des études parce que moi j’ai pas pu en faire, je crois que non.

E Et vous auriez aimé en faire ?

M Ah oui, moi j’aurais bien aimé continuer. C’est comme ça.

E Actuellement c’est pas possible mais peut-être que...

M J’ai mon métier maintenant... faire quoi ? Non je sais pas.

E Vous avez appris votre métier sur le tas...

M Non. Oui, oui sur le tas. J’étais femme de ménage puis un jour il manquait une cuisinière et puis voilà.

E Et vous avez bien réussi à faire la cuisine...

M Voilà. Et je suis restée. C’est plein de choses qui ont fait que j’ai eu un poste, donc la chance quoi.

E Oui, parce que... vous préparez combien de repas par jour ?

M Deux services de 50 à peu près.

E C’est pas rien.

M Oui, ça s’apprend. On est toutes un peu cuisinière un peu chez soi donc, c’est les quantités.

E Oui, mais c’est des règles hygiènes à respecter.

M Ah oui ça...

E La fameuse marche en avant qu’il faut respecter.

M Oui, voilà. tout ça. C’est venu après, c’est depuis que j’y suis. On apprend ça petit à petit, donc... on apprend. Quand on veut apprendre on apprend. C’est le problème, adulte ou jeune, je crois que c’est le même problème, soit qu’on veut apprendre... L’autre jour y’a des dames de.... qui sont venues, alors elles m’ont un peu vexée parce qu’elles m’ont demandé si j’étais capable de faire faire les leçons à mes enfants. Alors ça, ça m’a pas tellement plu, parce elles ont l’air de dire... puisqu’on est..., moi ça fait vingt ans que j’ai arrêté l’école, on suit plus. Quand on a des enfants on est bien obligé de suivre surtout quand, comme nous l’aîné a vingt ans et le dernier à six ans donc on a toujours été dans les livres depuis plusieurs années. On arrive à suivre, ça, ça m’a pas beaucoup plus.

E Ça vous avait vexé.

M Oui, l’air de dire, puisque vous allez plus à l’école, puisque vous avez plus le temps de rien faire, de rien faire autre que votre travail, bah, vous perdez ce que vous avez appris. Ce qui est entièrement faux. On peut toujours apprendre même moi avec les enfants maintenant, et d’ailleurs des fois ils sont étonnés qu’on arrive à se souvenir de ce que on a appris, nous, à l’école. Je dis une fois qu’on a appris, c’est pour la vie, donc on perd pas. Surtout qu’on a toujours un truc pour nous... les enfants, pour nous entretenir, donc on ne perd pas... bon, un petit peu mais... on peut toujours rester à suivre à un certain niveau.

E Hm hm, je partage tout à fait votre avis. Et je trouve scabreux qu’on vous ait dit ça.

M Ah oui, oui. Vous arrivez à faire vos leçons...

E Parce que tout simplement, ils avaient envie de vous vendre quelque chose.

M Oui, Tout l’Univers, ça lui a pas plu, ils étaient en haut. C’est vrai qu’ils sont en haut pour les protéger... mais je vais les descendre je crois, .... mais... les enfants, moi je dis si ils ont pas envie, on peut pas les faire apprendre, si ils sont pas motivés, si ils sont pas... C’est agréable d’avoir un enfant qui veut apprendre, j’ai des enfants qui peuvent apprendre mais ils ne veulent pas apprendre donc... le minimum... ça c’est largement suffisant. Et je ne sais pas quoi faire.

E Je vous remercie. Je pense qu’on a arrivé à circonscrire l’ensemble de votre avis.