Entretien n° 18 avec Famille LAURENT

Le 16 mars 1998

E Apprentissage de la lecture, qu’est-ce que cela évoque pour vous ?

M C’est essayer de mettre les lettres les unes au bout des autres, de les assembler, de décrypter des sons, des syllabes aussi, des sons surtout, c’est ça un petit peu l’apprentissage. Oui, c'est ça en fait, non, c'est ça.

E C’est-à-dire c’est l’assemblage qui permettra la lecture ?

M C’est ce que je pense, je sais pas... Assembler, c’est ça, quand on lit un mot, y’a plusieurs syllabes donc, si on arrive à l’associer, l’enfant arrivera à lire, ça se décompose un petit peu comme ça, dans les livres qu’ils ont, ils apprennent lettre par lettre et en associant 1 lettre, 2 lettres, 3 lettres les unes avec les autres pour essayer effectivement de faire un mot, d'arriver à lire un mot.

E Kévin a commencé l’apprentissage quand ?

M Quand il est entré en CP. On leur apprend un petit peu en grande section maternelle mais bon ça ne s’est vraiment pas avéré positif, disons, il n’arrivait pas en fin de maternelle à lire ou à décrypter quoi que ce soit... Donc , ça a vraiment commencé dès qu’il est rentré en CP en fait... Je trouve que ça va très vite. On leur apprend des mots déjà entiers qu’ils mémorisent, et puis les lettres à mon avis, ça va très vite.

E Trop vite ?

M Au départ, ça m’a un petit peu effrayée oui. Je trouvais que ça allait très vite pour les enfants. On avait un peu de mal, on passait énormément de temps et je me suis dit mon Dieu et puis, il n'arrivait pas forcément... et puis tous les jours une nouvelle lettre à apprendre... alors il l'assimile. Moi je trouvais que ça allait vite mais maintenant arriver au mois de mars, c’est peut-être pas si mal que ça parce que le résultat est quand même assez positif.

E Vous passiez beaucoup de temps avec Kévin ?

M De la rentrée jusqu’à Noël, le minimum ¾ d’heure, ça pouvait aller jusqu’à 1 heure, 1 heure 30, le soir quand il en avait marre, on reprenait le lendemain matin avant qu’il ne parte à l’école, ce que l’on ne fait plus du tout maintenant. Ça me semblait impératif qu’il assimile au fur et à mesure. Je me dis si il est largué dès le départ, ça va être un petit peu difficile, comme tous les jours, y’avait quelque chose de nouveau, je me disais s’il n’assimile pas ce qu’il y a apprendre aujourd’hui pour le lendemain ça va être dur.. est-ce qu’il va prendre du retard. J’ai fait en sorte qu’il apprenne au fur et à mesure et cela ne s’est pas passé si mal que ça, maintenant le résultat est quand même positif, il arrive quand même à dire pas trop mal. Je n’ai pas de repère par rapport à d’autres enfants.

E Il a commencé son apprentissage au niveau du CP...

M Oh ! Oui ! Oui ! Oui ! En grande section maternelle, ils commencent quand même à leur montrer des mots ; c’est plus méthode globale, il repère au niveau des mots. Lui, ça n’a pas trop, il savait écrire son prénom, cela s'arrêtait là. Lire, il se lisait pas, c’est sûr. il ne lisait pas. Il avait des repères sur des enseignes, parce qu'on leur a appris tous les mots des supermarchés, donc ils se repéraient à la couleur, à la façon dont c’était écrit, ils avaient mémorisés ça...

E Quand vous dites « on » c’est l’école ?

M Oui, à l’école. Il savait que « Auchan » c’était comme ça, « Leclerc », c’est comme ça, Il les avait mémorisé dans la totalité du mots, mais ce n’est pas savoir lire. Il ne savait pas que A et U ça faisait AU.

E Il a appris à lire à l’école?

M Oui. c'est vrai qu'ici, il n’a pas appris avec nous à dire B et A cela fait BA ah ! Non !.

E Il ne s’est pas intéressé aux livres ?

M Il s’est intéressé aux livres, mais fallait que je lui lise alors il n’essayait de lire ou de dire ce que ça fait ça et ça... Je lui lisais mais ..;.

E Il fallait que vous lui lisiez des livres, souvent ?

M Oui, pratiquement tous les soirs jusque en CP, après ça c’est tassé. Fallait lire une histoire, c’était quelquefois la même, une page, il aimait bien ça et maintenant, c'est vrai, c'est peut-être du fait qu’il lit plus à l’école, il lit un petit moins, non, il en a un petit peu marre...

E Quand vous lui lisiez des livres, c’était le soir ?

M Le soir avant qu’il se couche, quand il était dans son lit, je lui lisais une page...

E En grande section.

M Oui ! oui ! Ca a même commencé avant la grande section.

E Sur sa demande ?

M Oui, sur sa demande. C'était on lit une histoire, tous les soirs, il fallait qu'on lise une histoire.

E Quel genre d’histoires ?

M Des petits livres qu’on trouve, les lapinos, oursons, des choses comme ça, un petit bouquin sur des fables de la Fontaine, et puis Poncahontas, le Roi Lion...

E Des petites histoires ou des gros livres ?

M Non, des petits livres, des petites histoires parce que je pense que sur un gros livre il oublie, on va lire une page ce soir, une page le lendemain et puis il sait plus, il va plus trop savoir de quoi... et c’est un peu long... C'est bien de lire des histoires et ils aiment bien les enfants qu’il y ait un début, une fin, je préfère lire des choses un peu plus courtes.

E Des livres que vous avez achetés ?

M Ca a été souvent des cadeaux, à Noël...

E Il a beaucoup de livres...

M Une vingtaine de livres, peut-être plus.

E Ça vous arrive d’aller à la bibliothèque ?

M Non jamais. Je pense par manque de temps aussi. Je travaille, le mercredi il est chez une nourrice, c’est arrivé qu’elle les a emmenés à la médiathèque, c’est un peu compliqué parce qu’elle en a trois parce que amener les trois à la médiathèque, ce n'est pas évident. Si j’étais plus disponible, je le ferais sans doute plus mais...

E Les frères et soeurs lisent des livres à Kévin ?

M Kévin est tout seul. Il a un grand frère qui est à la fac, qui n'habite plus là, qui ne lui lit pas de livres.

E Votre mari le faisait aussi ?

M Pas trop souvent, c'est beaucoup plus moi. C’est arrivé quelquefois mais en règle générale mais c’est plus moi.

E Vous lisiez pendant comment de temps ?

M Cinq à dix minutes tous les soirs.

E A raison de 2 à 3 fois pas semaine ?

M Non, c'était tous les soirs.

E Depuis longtemps ?

M Vers 4 ans, en moyenne section, en moyenne section, on a dû commencé. C'était tous les soirs. Ça c’est calmé depuis l’entrée en CP. Y’a moins ce besoin de lire tous les soirs. Disons, qu'avant c'était tous les soirs. Là ça va être une fois de temps en temps.

E Ça vous arrivait d’oublier ?

M Je n’oubliais pas parce qu’il me le rappelait systématiquement.

E Concernant la leçon du soir, comment cela se passe ?

M Il est à côté de moi, je lui demande de lire. Si il ne sait pas un mot, je ne vais pas lui dire tout de suite, je lui dis, on cherche, essaye de trouver, maintenant il connaît un maximum de lettres, c’est plus facile. Si il n’avait pas vu une lettre, je lui disais la première partie du mot et puis si il savait la deuxième il cherchait la deuxième. Je ne lui donnais pas forcément la réponse, je pense que c’est pas mal parce que cela le fait chercher, et si il se trouve sur un mot, je lui dis non, Kévin, c’est pas ça. Tu relis, tu connais, je ne te le dis pas et effectivement il va arriver à le lire...

E Il est assez conciliant pour le travail...

M Ça va, ça va. De toute façon, c’est un rythme à lui donner car le soir il a tendance à poser le cartable et à aller jouer. Donc quand il arrive, c’est la lecture. Il a pris le rythme, et on prend le livre ou le classeur et on lit et après il est débarrassé.

E Quelle méthode ?

M C’est le livre de Gafi.

E Que pensez-vous de la méthode ?

M Je la trouve pas mal. J’avais un petit peu peur au départ parce qu’on lui a donné des mots et des phrases entières donc forcément ils les lisent par coeur sans savoir comment ça s’associe, je ne trouvais pas ça génial. Après le livre, il est relativement bien fait. Il décrypte bien (l'enfant est allé chercher le livre )... C’est vrai que ce système là est pas mal. En fait, à l’école ils voient surtout la partie texte qu’ils relisent donc en général ça allait toujours assez bien et la partie ici, ça été beaucoup plus dur. Maintenant, ça va... Il arrive à bien lire. Y’a toujours les « on dit », les collègues, moi il savait lire à Noël, moi au mois de février, donc on se dit, on espère qu’il reste toujours dans la moyenne...

E Ça génère une inquiétude ?

M Un petit peu oui. Au début, je trouvais que c’était dur, mais finalement j’ai l’impression que ça s’est décanté d’un coup, après Noël, j’ai l’impression que ça s’est lâché d’un coup... parce qu’il lisait le mot très PI... RA...TE. Il accentuait assez fort sur la fin des mots que maintenant il arrive à lire les mots normalement. C’est quand même pas mal.

E C’est important.

M Oui, de ne pas lire comme un bébé /ME/ /ThO/ /DE/ mais plutôt /METHODE/ . Il sait qu'il faut lire comme ça.

E Quand vous lui racontiez une histoire, comment est-ce que vous faisiez, vous lui montriez les mots ?...

M Non ! Du tout ! Je luis lisais l'histoire. Ce qui l’intéressait c’était l’histoire et les images. Savoir comment cela s’écrivait, c’est vrai que il ne se posait pas la question parce qu’il n’avait pas appris à lire et puis moi non plus et je me disais que cela viendrait plus tard, chaque chose en son temps. Je lui lisais l’histoire. Ce qui le plus important, c’était qu’il comprenne ce que je lui lisais, ce qui n’était pas toujours évident, parce que quand je lui posais la question après, i l disait je ne sais pas ou il n’avait retenu qu’une chose et, sur l’écriture par elle-même, non... Je n'essayais pas de lui montrer. je ne voyais pas l’intérêt par ce que de toute façon... il ne savait pas quoi... Je ne sais pas si il aurait retenu quelque chose en faisant comme ça...

E Est-ce que vous lui donnez un autre travail à faire ?

M Non, par lui-même, il va essayer sur la table par exemple s’il y a des bouteilles, par exemple, il va chercher à les lire.

E Depuis longtemps il fait ça ?

M Depuis qu'il connaît .... Depuis le début de l’année, avant un petit peu moins. Même si on est en voiture, quand il voit des pancartes, des choses comme ça, il essaye de les lire...

E Depuis cette année ?

M Oui, avant non ! non !.

E Vous ne vous en souciez pas non plus, vous voyez ça un peu prématuré...

M Oui, un peu prématuré quand même, parce que c’est vrai que Kévin est de la fin de l’année et je trouvais déjà qu'en maternelle il y avait une différence avec les enfants, il était encore très bébé... Même quand il est rentré en CP... Je me disais qu'il fallait quand même le laisser vivre avec l’âge qu’il avait. Il n’est pas plus idiot qu’un autre, il va apprendre à lire, je n’ai pas essayé de le faire avant l’heure.

E Est-ce qu’il avait un abonnement ?

M Non. Et là non plus. C'est vrai, qu'on aurait pu le faire. On ne l'a pas fait.

E Vous n’y avez pas pensé ?

M Non, c’est vrai ( (FFFFFF...) qu’il y a beaucoup de petits magazines pour les enfants. Ça a été très ponctuel, Ca été une fois comme ça, mais je n’ai pas pris d’abonnement...

E Vous pensiez que ce n’était pas nécessaire pour l’enfant ?

M Non, de toute façon il ne l’aurait pas fait seul, donc j’aurais été obligé d’être avec lui pour le faire et c’est peut être aussi pour ça que je ne l’ai pas fait. Je verrais plus l’intérêt maintenant ou à la rentrée en CE1. Il pourra vraiment s’y pencher dans son livre tout seul.

E Maintenant lire un conte etc. c’est un peu dépassé, du moment où il sait lire ?

M Non ! Par contre, non ! Je veux bien encore si il me demande, je veux bien encore le faire parce que ça je crois qu’encore il n’est pas encore capable de le faire, prendre le livre et lire... même si c’est court, je crois pas qu'il arrivera à le faire... non si il le demande, je le ferais....

E Vous n’avez pas trop de temps...

M C’est vrai, c'est vrai que c'est un petit peu le manque de temps. Ca fait le soir quand je vais le coucher. C'est vrai que ça arrive encore. Là c’était plus les questions, sur les vacances je lui avais acheté un livre aussi bien sur la lecture que sur le calcul..

Kévin Il fallait répondre aux questions... par exemple qui mettait la tête dans le sable et tout ?...

E Tu aimais ça ? Tu as joué avec maman et papa aussi ?

Kévin Oui. Moyen

M Oui, un petit peu les tests, tu as fait avec lui, et puis c’était resté en suspend et puis il a ressorti cela et ...

E C’est les incollables ?

M Oui, il a ressorti ça, ces jours-ci, il me dit on fait les questions, alors pas de problèmes, on fait les questions, c’est plus l’histoire mais ça va revenir parce qu’il aime bien changer, il aime pas faire systématiquement les mêmes choses... ça se situe plus le soir au coucher, le reste du temps, je ne fais pas, je ne peux pas. Le soir, on arrive il est 18 heures, la lecture de l’école, et après tout s’enchaîne, on n'a pas trop le temps et sur le week-end, c’est un peu relâche, parce que même quand ils ont école le samedi matin, on ne leur donne pas de lecture le week-end, je trouve cela pas mal d'ailleurs, parce que ça relâche l’enfant mais aussi les parents et...

E Ça vous prend du temps ?..

M Oui, moins maintenant parce qu'il s'y met mieux et puis il a acquis maintenant des connaissances au niveau de la lecture, mais au départ c’était un peu contraignant ?

E Tu joues à quoi ?

Kévin J'ai une manette de jeu, Des jeux.

E Avec la télévision, sur l’ordinateur ?

M Sur l’ordinateur, un petit peu. Dès qu’il fait beau, il est plus à l’extérieur qu’à l’intérieur. Il aime bien jouer mais il faut souvent s’occuper de lui. Je vois le Scrabble junior à Noël, c’est sympa pour les enfants, mais il ne va pas le faire tout seul, il faut être là avec la grille et puis lui dire et bien , tu cherches, alors là, il va le faire, ça va l’intéresser, si on n’est pas avec lui, il va tout replier et ne pas le faire....

E Ça vous arrive de jouer avec lui ?

M Non ! Ça arrive, mais pas aussi souvent qu’il le souhaiterait, (rire) parce que ce serait très souvent qu'on serait sollicité, pour les jeux, ou des choses comme ça . Quelquefois, on joue aux dominos.

Kévin C’est plus souvent qu’on joue aux dominos.

E Tu joues aux voitures ?

Kévin Oui.

M Oui !Voitures, Playmobil, légos. La une période où il jouait beaucoup avec les légos à créer des choses assez rigolotes d'ailleurs.

E La télévision, la regarde-t-il, beaucoup ?

M Oui !. Oui !. Oui !. Oui !. Oui !. Là, il regarde.

Kévin Tous les soirs.

M Le matin, les dessins animés en déjeunant et puis le soir, on limite. Quand on a fini la lecture. L'impératif, c'est les devoirs, la lecture après je ne mets pas d’interdit, si il veut regarder la télé, il regarde la télé, si il veut jouer dans sa chambre, il joue dans sa chambre. Quand il va faire meilleur, il ira dehors systématiquement, donc la télé beaucoup moins. l'hiver, je ne l'empêche pas de regarder la télé. Il est assez cassettes, dessins animés...

E Vous préférez la cassette vidéo ou le dessin animé de la télévision ?

M J’aime plus les cassettes, ses dessins animés qu’il va se repasser plusieurs fois.

E Il regarde longtemps ? 1 heure, 2 heures ?

M Non pas 2 heures. Une heure. pas trop le matin, parce qu'on n'a pas trop le temps. On déjeune et il se met son dessin animé c'est fini. Ca dure

Kévin Je joue avec mes jeux autrement...

E Tu aimes jouer avec tes jeux.

M Et puis sur le week-end pas trop. On limite beaucoup aussi parce que on ne souhaite pas trop qu'il reste (rire) en permanence devant la télé. C'est vrai que les enfants sont très accros. Pour les sortir de la T.V., ce n'est pas évident.

E Vous lisez ?

M Pas trop non. Pas trop. Plus, pendant les vacances. Je vais m’acheter un bouquin. Le reste de l’année non, si ce n’est que des magazines je veux dire mais les livres ... non

E Régulièrement.

M Oui.

....................................................arrivée du père...............................................................

P Je ne vois pas en quoi les parents peuvent influencer la méthode employée par l’éducation nationale pour former des enfants à l’apprentissage de la lecture. On n’est pas pédagogue pour pouvoir porter jugement, c’est bien, c’est pas bien, c’est trop complexe, c’est trop dilettante... ça me paraît..... Ce que nous pouvons faire, c’est simplement aider en parallèle l’éducation nationale, qui a adopté une méthode pour que notre enfant assimile du mieux qu’il peut en lui faisant faire ses travaux extra-scolaires, donc le faire lire, lui expliquer la signification de tel mot s’il n’a pas compris, le conforter dans ce qu’il fait à l’école, mais la méthode par elle-même, je ne vois pas si on peut faire évoluer ou changer la méthode. Sur d’autres sujets, on pourrait peut-être dire. Mais, sur la lecture... surtout, pour mon cas, je pense aussi pour celui de Valérie ( la mère) on n’a pas été habitué à la méthode globale.

M Là, c'est quand même semi-globale. C’est la semi-globale. C’est ce que je disais, au début du CP, ça m’a un petit peu affolée, parce c’était très globale. Il avait des phrases, bon il commençait. On lui donnait des phrases entières à lire qu’il lisait par coeur sans savoir que le P et A ça fait PA. Je me suis dit si c’est comme ça tout au long de la méthode, qu’est-ce qu’ils retiennent de la lecture. Mais non, au fur et à mesure, Ils ont appris des phrases entières, y’a des mots au début qu’ils connaissaient par coeur mais ils ne savaient pas du tout comment ça s’écrivait... en fait en parallèle, quand même, y’avait des associations de lettres. Je crois que maintenant ça marche bien quand même parce qu’il arrive à lire des mots justement en associant les lettres.

P J’ai tendance à penser que c’est au contraire, une très très bonne approche de la lecture. D’abord, je pense qu’il suit à peu près correctement, ça assimile bien. Il fait ses devoirs, juste ce qu’il y a à faire, ce qui est convenu avec la maîtresse et puis on ne l’enquiquine pas pour forcer la mesure... On laisse faire les choses à leur rythme parce qu’on pense que la pédagogie, c’est aussi bien structuré les connaissances et progressif et ça sert à rien d’en mettre plus que ce que le vase peut contenir, je trouve que cette méthode est très adaptée à un enfant de cet âge là. Même si parfois il rechigne, quand il arrive de l’école, il a assez de sa journée, il faut remettre de la lecture, c’est pas toujours évident, et monsieur n’est pas toujours très content, parce qu'il a plus l’intention d’aller jouer ou d’aller regarder la télé que de faire des leçons. Mais globalement c’est bien.

M Le support de lecture est intéressant. Des histoires assez sympas.

P Et qui vont bien avec des gamins de cet âge là. Gaffi, le fantôme c'est sympa...

K C’est bien à lire.

M C’est vrai que ça les intéresse assez. Il est assez bien fait ce livre.

P Ce qui est négatif, les gamins, je l'ai remarqué 2 ou 3 fois, quand j'ai fait les leçons avec lui, arrivent bien à lire, à peu près correctement le texte, par contre arrivent difficilement à mémoriser l’histoire ou des fractions de l’histoire car quand on revient aux questions, si on va un petit peu plus loin, même si ce n'est pas demandé... je vais les questions avec lui... dans la compréhension et la mémorisation du texte, là on s’aperçoit que... où alors il n’a pas l’attention assez portée sur le sujet parce qu’il a autre chose à faire derrière, à penser, et quand on pose la question « qu’est ce que Gaffi a donné à tel ou tel personnage ? », il ne sait plus répondre. Il faut vraiment l’aider... quand on le remet sur la voie, ça va mieux, y'a donc ça...

M C’était du fait qu’il lisait très lentement. Il se penchait plus sur la façon de décrypter le mot que de mémoriser vraiment ce qu’il lisait. Maintenant, ça commence, ça commence à associer les deux. Maintenant je commence à lui poser les questions qu’il y a dans le livre, comme il lit plus vite aussi, donc il comprend mieux. Donc, je pense que ça va aller mieux.

E Est-ce que vous lisez ?

P Je ne lis plus. J’ai lu assez longtemps. Maintenant, de par mon travail, je n’ai plus le temps, ou je ne prends plus le temps de lire.

E professionnellement parlant, vous êtes un lecteur?

P Oui., je lis des piles et des piles et souvent en diagonale, des données professionnelles, des marchés, etc. je suis obligé de lire de par ma profession..

M Tu as fait la méthode de lecture rapide.

P Oui, c’était justement pour aller plus vite, synthétiser plus facilement et puis on a un tas d’informations à ingurgiter mais lire plaisir, je n’ai plus le temps. J’ai pris d’autres médias pour prendre l’information, je suis beaucoup Internet, la télé, la radio, comme je vais beaucoup de voitures, je prends l’information par l'auditif que le visuel... D'ailleurs, je suis plus auditif que visuel... Ce sont des déformations professionnelles...

E Qu’est-ce qui vous fait dire que vous plus auditif que visuel ?

P J’ai déjà fait des tests là-dessus. Je mémorise beaucoup mieux par l’audition que par la vue. Même si le visuel est important pour moi, je suis très tableau, graphique mais l’audition... Dans le métier que je fais, je fais beaucoup de voitures et l'Info je la prends par radio. Je suis sur France Info. La lecture, très peu maintenant, les magazines, je suis féru d’informatique. Plutôt que de prendre de la lecture plaisir, littérature, roman, je vais plus me faire plaisir dans l’information spécialisée.

E Vous, vous avez une lecture professionnelle aussi ?

M Non, mise à part le journal.

E Vos habitudes, vous utilisez un agenda ?

M Oui.

P Pour le travail et pour la famille. Obligé parce qu’il y a différents événements qu’on doit planifier, collationner des éléments professionnels et familiaux...

E Répertoire téléphonique ?

M Oui.

P Un agenda électronique que je traîne toujours avec moi. Et je remarque que Valérie va chercher pas mal d’information à l’intérieur.

E Les comptes ?

P On a un journal de banque informatique. C’est pas par rapport à la banque, c’est par rapport à nous, par rapport à nos obligations auxquelles on doit faire face. On essaye de planifier les événements.

E Liste pour le départ en vacances ?

M Oui, complètement. A chaque fois.

E Films, photos, vous classez ?

M Oui, ça traîne un peu plus mais...

P On fait un album pour avoir une mémorisation du temps passé. C’est classé mais pas de façon très pragmatique.

E Course, liste ?

M Ça m’arrive pour les choses que je ne veux vraiment pas oublier sinon non.

E Papiers administratifs, vous les rangez ?

M C’est rangé, classé... ordonné.

E Entre vous il y a-t-il un échange de petits mots ?

M Ça arrive, mais en fait maintenant on le fait par téléphone.

P C’est tu penses à ramener Kévin de chez la nourrice, ou tu vas chercher du pain...

E Itinéris, c’est un médiateur.

P C’est extraordinaire. Ce qui devient gênant c’est que tout le monde en a et.... il faut se discipliner, il faut le couper. Si on va au restaurant, on le coupe. Dans le train, ça n’arrête pas, on est agressé...

E Vous êtes très branché sur la communication, l’information. Vous êtes dans l’informatique.

P Commercial dans l'électroménager. Cadre.

M Moi, je suis secrétaire médico-social à la DISS.

E Diplôme ?

M Bac G1.

P G3 avec une formation de comptabilité derrière.

E Revenu ?

P 20-25.

E Année de naissance ?

M 1964.

P 1952.

E Avez-vous des règles d’éducation ?

P Oui, la scolarité, c’est la seule chose où je suis plus strict. Il m’arrive parfois avoir à donner un avis final pour des candidats, et je m’aperçois le diplôme devient fondamental de nos jours. Moi j’ai eu la chance, sans niveau universitaire, de m’imposer, je suis au première loge pour m’apercevoir. J’ai un fils qui est en 2ème année de sciences éco, il a 21 ans, il ne perçoit pas encore qu’il est essentiel d’avoir un diplôme quel qu’il soit pour pouvoir postuler et entrer dans la vie active et faire son trou. Avant il suffisait d’avoir un niveau de culture normal, d’avoir une capacité d’adaptation, avoir un peu d’ambition, avoir une qualité professionnelle et on arrivait à avoir des évolutions de carrière dans la normale. Pas être directeur général, mais on arrivait... c’est plus possible de nos jours.. diplôme tant c’est tel salaire, et les passerelles sont pratiquement impossible. Les grandes passerelles, c’est très difficile.

E Pour vous c’est la scolarité.

P Non, c’est pas que scolarité, il ne faut pas axer l’éducation des enfants que sur la scolarité mais c’est quelque chose que je suis plus intransigeant que sur le reste.

E Et vous madame ?

M Moins que lui sur la scolarité, c’est vrai que ça fait toujours plaisir un enfant qui réussit. C’est la politesse, c’est lui apprendre à vivre en communauté, les choses comme ça.. en espérant que ça marche.

P Plus vous avez des enfants qui poursuivent des études, plus ils sont en contact des autres tous les jours, ça aussi ça permet à des enfants d’acquérir le sens de la collectivité ou de l’individualisme... ça permet d’avoir également une vue globale, moins étriquée, quelles que soit les études. Quand je dis ça m’intéresse d’essayer de contenir ou de pousser un gamin à un développement maximum, c’est pas par ambition personnelle, tiens il sera mieux que moi, où il aura un super métier, c’est parce que ça donne une culture générale importante, ça lui donnera des assurances dans la vie, ça lui donnera des contacts sociaux qu’il ne pourrait pas avoir si il n’avait pas des camarades d’école ou de faculté ou... ça donne des points de repère, beaucoup d’assurance et d’avoir un travail plus facilement et également un équilibre... y’a pas que ça mais je crois que ça fait partie de notre mission de parents, essayer de mettre le pied à l’étrier le plus loin possible et puis après les enfants ils deviennent grands, ils décident eux-mêmes...

E Rencontrez-vous la maîtresse ?

M Oui, mais moi je le récupère à la garderie. Le samedi matin, je lui demande... mais on a toujours peur de déranger. Je pense que s’il y avait un gros problème elle l’avertirait. Depuis le début de l’année, je ne lui ai pas reparlé.

P Il y a une correspondance avec les parents, des documents à signer, pour être certain que j’ai bien regardé, analysé, et il y a toutes les remarques sur le travail de l’enfant et on est un peu informé de l’évolution. Y’avait une petite réunion...

E Vous êtes très pris professionnellement.

P On planifie pas mal de choses mais c’est dur dans la vie actuelle de concilier, c’est difficile.

E Avez-vous redoublé une classe primaire ?

M Oui, mon CM2, c’était particulier parce que j’ai fait tout mon primaire dans une école de campagne, j’ai été élevée par ma grand-mère et quand je suis entrée en CM2, je suis revenue avec eux, je me suis sentie perdue à tout niveau, sur le plan scolaire que de me retrouver toute seule, mes parents travaillaient tous les deux. Ça a été l’échec scolaire. Je pense que si j’avais continué dans l’école, je n’aurais pas...

E Fallait retrouver des repères.

M Oui..., c’était plus sur le plan personnel, il fallait une réadaptation importante.

E Avez-vous autre chose à rajouter ?

P Y’a des compléments qu’on essaye de donner à Kévin, par le biais de l’informatique...

M C’est très récent.

P Un petit personnage qui se balade dans des rochers... Lui va faire attention d’emmener son petit personnage en fonction des nombres qu’on lui donne, c’est pour la fonction calcul et mémorisation des nombres et puis il y la même version sur des mots avec des sons...

E C’est Rayman...

K C’est un petit bonhomme et des petites bêtes bleues.

P Ça lui plaît car c’est éducatif et c’est ludique. Ça mémorise bien. Dans les technologies modernes qui se développent actuellement, dans les écoles, il devrait avoir ce genre de matériel, ça rentre beaucoup mieux que... Les livres sont bien mais c’est plus moderne, y’a le son, y’a le jeu, les images, la couleur, une histoire aussi.

K Un labyrinthe.

P Et puis un matériel facile à développer. Si parallèlement à ça, quelle est l’évolution à lire dans deux langues simultanément, ça serait très intéressant avec l’école...

M Ils font de l’anglais.

P A ce stade d’ébauche de l’écriture et la lecture, les sons, les mots dans une langue à une autre, c’est pas idiot de faire les deux en parallèle sachant qu’il y a pas mal d’occasion, sur les jeux, sur les boites, il y a des mots en plusieurs langues. Il le lit en français. Il y a peut-être des ponts à faire, je suis très content quand j’entends qu’en maternelle on essaye d’inculquer une deuxième langue au gamin car ils ont une capacité de mémorisation énorme...

M Une maman faisait une initiative à l’allemand en maternelle, le problème il faut que ça continue après.

E Je vous remercie de ce temps passé pour l'entretien.

* * *

Avis de l'enseignante sur l'enfant et la famille

Entretien N° 18 enfant LAURENT Kévin

E Kévin

N Très immature, je dirais le bébé. Vraiment, le garçon qui ... pas sot du tout, je pense qu’il a d’énormes possibilités intellectuelles mais qui ne s’investit pas du tout dans le scolaire parce qu’il n’en a pas du tout envie. Pour lui l’important, dans l’immédiat, c’est de jouer, de s’amuser, c’est... très aduler par papa, maman. Je pense que c’est un remariage d’ailleurs.

E Oui, c’est un remariage.

N Ça c’est curieux, ce sont des enfants qui viennent du public donc des parents qui n’ont pas senti une certaine écoute à l’école publique et qui sont venus chez nous justement pour ca.

E D’accord, tu l’interprètes comme ça.

N Oui.

E Ils te l’ont formalisé aussi comme ça.

N Un peu.

E Changer un peu, pour avoir une plus grande écoute de la part du monde enseignant, ou de l’école.

N Oui. Et très curieusement, la maman de Kévin est venue me trouver vers la Toussaint en me disant que Kévin avait peur de venir à l’école, surtout quand c’était moi, parce que j’étais trop exigeante. J’exigeais trop. C’est vrai que c’est un enfant qui doit faire un peu ce qu’il veut chez lui. Des parents un peu démissionnaires. Le papa, parce qu’il a d’autres chats à fouetter, la maman, parce que c’est son petit trésor, et l’enfant pas habitué à avoir des exigences a mal réagi. J’ai été obligé de remettre les pendules à l’heure avec elle.

E Il me semble que c’est le seul enfant de cette femme là, me semble-t-il, il y a une différence d’âge entre la maman et le papa assez important, j’étais assez surpris, je pensais que c’était le grand-père qui arrivait.

N Un papa comprenant très bien nos difficultés, une maman plus à l’écoute de son petit, et ne voulant pas qu’il souffre, ne voulant pas qu’il soit malheureux.

E On évite la contrainte, un peu l’enfant-roi.

N Tout à fait, c’est tout-à-fait ce que j’ai ressenti par rapport à la maman.

E Un milieu pourtant privilégié ?

N Je pense oui. Un enfant pourri-gâté. Un enfant qui a de grandes qualités artistiques, qui adore chanter, qui chante très bien. Quand on faisait l’éveil musical, là premier participant, génial.

E Au niveau apprentissage de la lecture, il n’a pas démarré, ou qu’est-ce qui s’est passé ?

N Si, j’étais très surprise de voir qu’il était parmi les plus faibles, parce que l’apprentissage de la lecture ne s’est pas fait avec des difficultés majeures, non, il n’a pas eu de difficultés majeures pour apprendre à lire, je pense que c’était plus un manque de motivation et...

E Ça servait à rien.

N Ça servait à rien. Il n’en avait pas besoin dans l’immédiat car en fin d’année ça c’est très bien passé. Il était parmi les...

E C’est un enfant qui est dans la moyenne ?

N Oui, mais avec une petite note en français. C’est curieux, je ne pense pas qu’il aura des faiblesses en français, enfin en lecture, je ne pense pas. Je pense que son manque de motivation... il aura peut-être plus un profil de matheux, de scientifique, plus dans ces matières là que la lecture, que du français parce qu’il réagit bien en mathématiques.

E Rapport avec la famille ?

N Aucun rapport. Aucun. Des rapports très superficiels. Le papa venant le conduire le matin l’enfant, l’amenant en haut, normalement les enfants montent tout seul, en disant je vous souhaite une bonne journée. On ne me posait jamais la question « comment va Kévin, comment ça se passe ? » non, des rapports très extérieurs.

E Comme si l’école c’était l’école, la famille c’était la famille et qu’il n’y avait pas de pont entre les deux.

N Voilà c’est un peu ça. La seule fois où j’ai rencontré la maman, c’était en début d’année, elle était inquiète de voir que Kévin venait à l’école à reculons quand c’était moi, parce que j’étais un peu trop exigeante. C’est vrai que c’est un gamin dont il faut beaucoup exiger pour obtenir un peu, parce que, à la maison si il n’a pas envie, il ne fait pas.

E C’est un enfant qui va poursuivre sa scolarité en CE1...

N Je pense que c’est un enfant qui va trouver ses marques assez rapidement. Qui va voir qu’à l’école, y’a des exigences. Il a déjà remarqué d’ailleurs. Et ces exigences, il les retrouvera partout. Je crois que c’est un enfant qui a besoin d’avoir des interdits, d’accepter les interdits, d’accepter la contrainte.

E Les règles.

N Les règles, tout-à-fait.

E Qu’il n’a pas suffisamment acquises au sein d’un groupe classe, à l’école.

N Oui.