Entretien n° 28 avec Famille BOUCARD

Le 3 avril 1998

E Le terme, apprentissage de la lecture, qu’est-ce que cela évoque pour vous ?

M Pour moi, c’est la lecture, comme par exemple... Blanche Neige, des choses comme ça... ça peut être en même temps mimer, ça peut être aussi...

P La question posée, c’était quoi ?

E Quand on dit « apprentissage de la lecture », qu’est-ce que cela évoque pour vous ?

P La correspondance.

E Qu’est-ce que vous entendez par « correspondance » ?

P La communication.

E Tout ce qui tourne ...

P Tout ce qui tourne autour de la personne, de ce qu’elle peut découvrir en quelque sorte... au sein de la lecture... commentaire, histoire, géographie... sur la connaissance.

E C’est tout ce qui est domaine de la connaissance. Et quand on parle plus de l’apprentissage, au niveau des enfants, qu’est-ce que vous avez envie d’évoquer ?

P L’apprentissage de la lecture ? C’est d’abord d’avoir bien interpréter les mots, bien les connaître. La langue française est assez dure à ce niveau là, y’a beaucoup de choses... qui font que pour un enfant c’est pas facile de faire la différence entre É, AI ou savoir dire É quand il y a ER à la fin ou des choses comme ça... Pour moi c’est ça le hic de la langue française.

E Vous pensez que c’est un problème ?

P Pour les enfants, c’est un problème. Je ne sais pas parce qu’on est pas dans leur peau pour le sentir mais on... on peut éventuellement imaginer que ça peut être un problème pour eux.

E Parce qu’il y a cette difficulté de rentrer dans...

P Le langage français quoi.

E Vous pensez la même chose madame ?

M Oui, c’est vrai... Nous pour Claire, on a remarqué qu'elle avait des difficultés, des confusions entre certains mots, les P, les B...

P Elle les mélangeait.

E Vous voulez dire des confusions qui se manifestent par la vision même des lettres, ou simplement au niveau du son ?

P M Les deux.

M Aussi bien à l’écoute du son qu’à l’écrit.

P Tous les lundis soirs, elle va chez un orthophoniste.

E Y’a des inversions qui se font...

M Oui, par exemple je vais lui dire d’écrire « prier », elle va écrire « pirer »... « trier », « tirer »...

E C’est-à-dire qu’elle n’a pas bien la succession des sons...

M Oui.

E Ça va mieux maintenant ?

P Oui, ça va mieux, y’a des progrès.

M Elle a été assez rapide en plus.

E Quand est-ce qu’elle a commencé l’apprentissage de la lecture ?

P Y’a un an à peu près. à 6 ans. L’apprentissage, c’est...

M Elle a commencé avant mais bon...

E Dites ce que vous voulez, c’est important... Vous dites qu’elle a commencé avant ?

M Bien sûr, quand on fait de la lecture, quand je faisais de la lecture avec elle...

E C’est-à-dire ?

M Comment elle s'appelait cette petite lecture. Y’avait une lecture avec des petits chats, elle me demandait, qu’est-ce que c’était ce son là, reconnaître un A, telle lettre...

E Elle avait quel âge à ce moment là ?

M Cinq ans.

E Oui, quand elle était en grande section. Et vous disiez, vous, l’apprentissage de la lecture, plus au niveau du cours préparatoire ?

P Oui, au niveau parce que elle peut prendre une boite par exemple et arriver à déchiffrer ce qu’il y a marqué dessus. En gros, ça fait à peine un an, ça fait...

M . C'est vraiment récent .. qu'elle cherche.

P Maintenant, c’est une curiosité. Quand on va se promener, de voir une signe ou quoique ce soit, elle essaye de déchiffrer, elle se le fait elle même en quelque sorte... C’est une sorte de curiosité.

E Elle ne le faisait pas automatiquement avant.

P M Non.

P Depuis qu’elle va chez l’orthophoniste, elle progresse en cherchant, en essayant de lire...

M de trouver toute seule.

E Trouver toute seule ! Tu aimes bien Claire de trouver toute seule ?

Claire Oui.

P Dès fois, elle s’amuse aussi... elle prend un livre... Elle va épeler les lettres et elle va nous demander de deviner qu’est-ce que c’est ce mot ...

E Donc sous forme de jeux.

P Ca c’est naturel, ce n'est pas nous qui l'avons...

M On l’a pas imposé, non. Ça s’est mis en place tout seul.

E Ça c’est fait quand ça ?

P Y’a trois quatre mois.

E Avant elle s’intéressait aux livres ?

P Non.

M Elle s’est toujours intéressée aux livres, elle aime beaucoup les lire mais elle ne cherchait pas d'elle même par contre.....

P Elle regardait les images. Elle aurait tendance à laisser tomber.... ne pas persister pour bien apprendre les mots, même les mots difficiles, elle va déconnecter.

M Elle décroche très vite. Elle arrive pas à tenir. longtemps sir quelque chose,.. à se concentrer.

E Vous racontez beaucoup d’histoires ?

M Oui, pratiquement tous les soirs. Si elle est trop longue, on l’a fait en plusieurs fois.

E C’est quel style d’histoires ?

M Les trois petits cochons, Blanche Neige, Cendrillon, la Belle et le Clochard...

P La série des Walt Disney.

E Elle a beaucoup de livres ?

M Oui. Qu’est-ce que tu as comme livres Claire ? C’est à toi de dire ? Plus ce qu’elle emprunte à la bibliothèque de l’école... elle lit pas mal.

E C’est-à-dire, elle en a 20, 50, 100, 200...

M Non, une cinquantaine, oui. Et puis les Caroline, le trucs comme ça, les Tintin, les bandes dessinées c’est plus difficile, c’est encore un peu trop trop.

E Et vous lui racontez des histoires ?

M Oui, et elle-même elle raconte des histoires à ses poupées, ses nounous. Elle met en scène.

E Ça fait longtemps que vous lui lisez des histoires ?

M Depuis toute petite, je ne sais pas depuis 2-3 ans.

E Et vous pensez que c’est important pour l’apprentissage de la lecture ?

P On ne pensait pas... C’est plus pour un plaisir pour elle en quelque sorte, le soir... ça leur donne le sommeil quoi.

M C’est le moment de tranquillité, où je me rapproche de maman aussi, si maman peut pas, c’est papa.

E Tous les deux vous faites la lecture...

P Oui, et pour les leçons.

M C’est le soir, au moment du coucher, le plus souvent. C’est le moment de détente...

E C’est régulier.

M Tous les soirs.

E Depuis qu’elle est ...

P en CP.

M Même quand elle était à l'école en maternelle, depuis l’âge de 3 ans.

P Non, je parle de ses devoirs. La lecture par loisir c’est autre chose. Je pense qu’elle fait la différence entre les loisirs et la lecture qui lui est imposée.

M Elle aime bien les deux.

E Y’a une différence entre la lecture imposée et la lecture loisir ?

P Oui, disons qu’elle arrivera plus à lui prendre un livre qui lui est propre qu’un livre de l’école. Le système des devoirs, ça accroche.

M Elle a du mal.

P Ça, ça tient de moi à ce niveau là. Quand j’étais petit... J'étais un dur à ce niveau là

M hum hum ! Pas réceptif à l'école.

E Vous n’étiez pas réceptif par rapport à l’école ?

P Non, j’ai jamais été trop lecture. Je ne suis pas le genre de personnage à prendre un livre systématiquement. Je suis plus visuel, écoute, musique ou cinéma, c’est vrai que lecture, écriture, ça n’a jamais été mon fort.

E Vous pensez que vous avez transmis cela à votre enfant.

P Je le pense, je ne sais pas, mais ça ne m’étonne pas si elle n'a pas... Elle nous voit pas lire souvent, si elle nous voyait lire plus souvent, elle ferait peut-être plus, je pense que ça décalque pas mal, un père ou une mère qui est très littéraire, l’enfant va automatiquement le voir, le sentir...

M Pourtant, je lis.

P Mais tu lis pas spécialement dans la journée, mais tu vas lire un livre le soir avant de te coucher, elle est déjà couchée. Elle ne le voit pas spécialement.

M Hum !

E Il y a peut-être d’autres attitudes de lecture et d’écriture, je vois dans votre cuisine, il y’a un tableau avec des post-it, vous utilisez quand même l’écriture.

P Oui.

E Quand vous faites vos courses, est-ce que vous faire une liste ?

P Oui.

M D'ailleurs, elle fait dès fois avec nous.

E Vous avez un répertoire téléphonique, on a quand même des éléments d’écriture. Quand vous partez en vacances, faites-vous une liste... ?

M Oui.

P Oui, et puis on en oublie tout le temps.

M Oui, mais on écrit quand même. J’écris, j’envoie des cartes, des lettres...

P C’est toi, d’ailleurs qui écrit.

E (au père)Vous n’êtes pas quelqu’un qui écrit beaucoup.

P J’écris très rarement, quand c’est obligatoire. Dans mon travail, j’écris tous les jours. On a des comptes à rendre. C’est mathématique.

E Quand vous faites des photos, vous les rangez, vous les classez ?

P Certaines sont classées, d’autres pas.

M C’est par période. Quand on s’y met, c’est par série, parce que autrement... y’a une période où ça reste entassé, et puis on sélectionne.

P Quand j’en faisais, à l’époque où je développais, je faisais des tirages. Je ne classais pas. Juste mes classeurs pour mes négatifs. Les photos que je tirais, c’était dans les pochons noirs et ça y restait. Je notais l’année (...)

E Dans la vie familiale, utilisez-vous l’agenda ?

M Oui.

E C’est peut-être dû à vos professions ?

M Oui aussi.

E Qu’est-ce que vous faites comme profession ?

M Je suis agent de service dans deux foyers pour handicapés et également dans un bureau, je fais de la couture pour les handicapés et l’entretien pour leur linge. Ça fait un mi-temps au total. A côté de cela j’anime des ateliers, le mercredi soir avec des handicapés. Je ne le fais plus à l’école, parce que ça faisait trop lourd.

E C’était trop lourd.

M J’avais plus assez de temps pour peintre moi-même.

E Vous ?

P D’origine, j’ai une formation de cuisinier. Là, je suis rentré à la mairie. J’étais au développement culturel pendant 6 ans et j’ai passé un concours. Je fais maintenant du portage à domicile pour les personnes âgées, au centre d’action social, depuis l’année dernière.

E Avez-vous une idée claire de la méthode de lecture de Claire, comment elle fonctionne?

M Elle se rapproche de la semi-globale. Je préfère cette méthode qu'elle a cette année la que la méthode globale de l’année dernière. Claire ne s’en sortait pas.

P Elle a changé d’école. Avant elle était à la Moricière, pas très loin non plus. On n’a pas été satisfait de la rentrée avec la nouvelle maîtresse, alors on l’a changée. Ça va beaucoup mieux. J’étais contre le privé, je ne sais pas pourquoi, et je m’aperçois qu’en fin de compte, c’est très bien pour elle. Je suis content, j'en suis satisfait.

E Et vous aviez eu un mauvais contact avec la Moricière.

P Avec la nouvelle maîtresse, oui. Je ne sais pas ce qu’elle faisait dans cette école à faire des cours à des enfants. Claire avait des difficultés, elle s’en foutait, elle veut pas travailler, elle ne travaille pas. Ca reste comme ça.

E Elle ne s’interrogeait pas sur les difficultés...

P Oui, Et puis c'est aussi dû aux enfants. Y’avait pas trop d’enfants dans cette classe.

M Non ! Non ! Y’avait plusieurs classes de CP, ce qui avait permis de diminuer, de donner des classes de 23-24, voire 21.

E L’année dernière, elle était également en CP ?

M Oui, c’était un CP d’adaptation.

P En gros, on ne peut pas appeler ça du retard, elle a six mois de décalage par rapport aux autres enfants....

E Au niveau de la méthode de lecture proposée, qu’est-ce que vous en pensez ?

M Je la trouve mieux. Moi, je m’y retrouve mieux pour pouvoir aider Claire. On retrouve un petit peu la méthode de lecture qu’on a connu.

P Y’a un petit peu le côté rétro... De la façon dont elle prépare les enfants à la lecture. C’est pas mal du côté du jeu aussi. je trouve ça bien.

M Oui, c'est vrai.

E Vous trouvez ça bien, c’est quoi la méthode de lecture ?

M C’est le semi-global, elle arrive déjà, je ne sais même pas maintenant... faudrait que je repose la question... C'est vrai que je n'y ai pas repensé à ça. Elle dit qu’elle allait de plus en plus arriver à la fin de l'année, elle aurait lâcher la méthode globale totalement.

E Quelle différence faites vous entre la globale et la semi-globale ?

M La globale c’est, il faut visualiser le mot pour pouvoir le lire. Là, la méthode qu’elle emploie c’est par syllabe. C'est syllabaire, c'est ça , en fait.

E Actuellement, c’est plus syllabique et ça correspond mieux à ce que vous attendez ?

M Moi, je m’y retrouve mieux et je trouve qu’elle comprend...

P Elle comprend mieux... à enregistrer. Il lui faut un certain temps...

m Elle est un peu lente.

E Elle est un peu longue à la compréhension ?

M Oui. Elle est lente à se mettre au travail, c’est vrai qu’elle... Mais, qu'est ce qu'il a ton doudou? (s'adressant à l'enfant )

E Un peu lente dans son travail.

M Elle est lente à se mettre à son travail et c'est le reproche que fait la maîtresse à Claire. Elle est toujours un petit peu en retard. Je suis sûre que dans ses notes du trimestre elle aurait pu avoir deux points de plus, parce que y’a des devoirs qui ne sont pas tout à fait finis.

P Elle est très lente, étourdie. Et elle s’occupe de ce qu’il ne faut pas aussi...

M Elle papillonne.

E Et l’année dernière, elle était dans une école qui ne correspondait pas...

P Ça allait, l'année dernière mais c’est à la rentrée de septembre de cette année....

E C’est à la rentrée que vous l’avez changée d’école ?

M Oui, elle est rentrée au mois de septembre à la Moricière et fin octobre... elle a fait deux mois...

P Elle pleurait...

M Elle ne jouait plus, elle était dépressive. Elle ne s’intéressait plus à rien, elle rentrait avec le mal de tête et le mal de ventre tous les soirs. Elle n’était vraiment pas bien.

E Vous pensez que cela venait du rapport de non confiance qu’il y avait avec l’institutrice ? Alors que l’année dernière ça c’était bien passé.

M Oui, elle était en CP d’adaptation. Parce que, déjà, la dernière année de maternelle, c’était limite. On avait préféré...

P Prendre le temps.

E Prendre du temps.

P Avec la maîtresse d’adaptation, ils étaient dix ou douze. Pour elle c’était...

E Plus cool.

M Oui .. et Mme M. était extrêmement attentive.

E Vous en avez parlé avec le directeur de ce problème en CP ?

M Non, J’en ai parlé à la fin, au moment où j’avais pris la décision.

E Parce que vous sentiez même en discutant, c’était pas...

P Cela n’aurait pas changé grand chose.

M Même en cour de récréation, ça n'allait pas, elle n’était pas bien, des enfants se moquaient d’elle, qui lui baissait la culotte, elle se sentait humiliée. Pour moi, c'était fini.

E Vous sentiez que l’enfant n’était pas respecté et que la maîtresse n’arrivait pas...

P Moi, étant petit j’ai connu des problèmes comme ça, j’avais pas envie qu’elle connaisse...

E Vous avez eu des problèmes vous aussi ?

M D’intégration.

P Oui.

E Vous en avez souffert de ça ?

P Non, faut pas dire qu’après... J'en ai souffert qu'en j'étais enfant

M Tu en as souffert quand tu étais enfant.

P Oui, mais après ça m’a pas percuté dans l’adolescence. Je me suis fais mes copains. C’est du passé, y’a pas de traumatisme à ce niveau là. Je n’ai pas envie qu’elle subisse ce que j’ai subi. C’était quand même très dur.

E Vous avez redoublé des classes en primaire ?

M Moi, CM2.

P En CM2, j’avais deux années de retard, je suis passé directement en 5ème pratique, de transition. Après apprentissage. J’avais passé un concours pour rentrer à l’école hôtelière mais j’ai pas eu assez de points j'ai quitté l'école à 14 ans... J’ai fait pas mal de boîtes d’apprentissage, je ne tenais pas trop en place, ça ne m’a pas empêché d’avoir mon CAP, c’était peut-être mieux car si j’étais resté dans la première maison, j’aurai rien appris, c’était de l’exploitation, aucune base.

E Votre dernier diplôme c’était un CAP ?

P CAP de cuisine.

E Vous avez évolué en restauration en portage à domicile.

P Là, je vais passé un concours, pour agent qualifié.

E Vous êtes toujours dans la restauration quelque part.

P Oui, je fais du portage trois jours par semaine et les deux autres jours, je vais en renfort dans les restaurants club pour personnes âgées.

E A plein temps ?

P Oui, depuis 1991.

E Et vous, vos diplômes.

M J’ai pas de diplôme. Je me suis arrêtée dans ma 16ème année, j’étais en préparation en CAP couture. J’ai pas pu continué, mon père était décédé, j’étais l’aînée des enfants, une maman malade donc mon oncle qui avait été nommé tuteur avait décidé que j’entretienne la maison et que je m’occupe des plus jeunes car la dernière avait 3 ans et ½. Donc je n’ai pas de diplôme. J’ai évolué dans la restauration et en colonie de vacances.

E Vous avez passé le BAFA je suppose ?

M Même pas. C’était pas obligatoire. Maintenant les foyers pour handicapés.

E Vous, vous êtes plus sur une lecture comptable ?

P Oui, je suis plus arithmétique.

E Et vous, la lecture ?

M Oui.

E Vous êtes sur un livre actuellement ?

M Oui, je suis en train de terminer « la prophétie des hommes ». C’est un roman.

E Vous lisez un livre par mois.

M A peu près, parfois j’ai plusieurs livres en même temps... C’est une curiosité et en même temps c’est un travail personnel...

E C’est-à-dire ?

M De recherche.

E C'est à dire que la lecture vous permet d'apprendre un certains nombres de choses sur vous même et sur le monde.

M Oui, c'est tout à fait cela.

E Vous rencontrez la maîtresse quelquefois ?

M Oui, Presque toutes les semaines. Une fois par semaine, c’est de courte durée, c'est quand j'amène Claire le jeudi.. il me semble que c’est très important, aussi bien que quand je l’emmène chez l’orthophoniste. C’est un travail qu’on fait tous ensemble quoi.

E Vous pensez que c’est important ?

M C’est important pour Claire, et Claire le souhaite. N'est ce pas Claire, C'est toi qui a chois Hein ?

Claire Oui

E Au niveau de ses jeux, à la poupée et puis à quoi ?

M Elle va peut-être répondre.

P A quoi tu joues ? tu peux répondre

E A la maîtresse ?

C Oui. (signe de la tête)

E Avec papa et maman ?

M Au nintendo, tu joues avec papa.

E Est-ce que vous jouez à des jeux de société ?

M Un petit peu, on a commencé, il faudrait qu’on continue.

P C’est un peu tôt...

M Le jeu d'Excellence.

P C’est un Trivial mais plus facile. Autrement...

Claire au UNO.

E Au UNO, c’est cette année ou avant ?

M Cette année qu'on a démarré ça..

E Elle ne joue pas spontanément aux jeux de société...

P Non ! C’est une petite fille qui est toute seule, elle est habituée à se créer... elle se crée son univers... on l’entend parler, chanter...

M Elle chante toute seule, elle invente des textes. Elle a toujours des mots d’amour dans ses chansons. C’est vrai que, je reviens à l’école, parce que elle aime bien cette école, c’était un choix d’elle, parce qu’elle voulait absolument faire du catéchisme, et ça c’est très important pour elle.

E Oui ...

M On est croyant mais on est pas pratiquant. C’était très important.

E Y’a peut-être une certaine recherche de votre part.

M C’est-à-dire que très jeune, le soir, quand je la couche, on faisait comme un examen de conscience, on voyait les choses qui n’étaient pas bien dans la journée pour voir comment on pouvait y remédier, mais s’en s’adresser spécialement à Dieu. Ça c’est passé comme ça en fait.

E Et là, tu es toute contente de faire du catéchisme ?

M Et en ce moment ils n’en font pas assez. C'est ce qu'elle dit.

E Elle regarde la télévision autrement.

P Oui.

M Oui, pas mal, un peu trop

E C’est-à-dire ?

M Tous les matins.

E Avant de partir à l’école ?

M Non, jamais. Quand elle est en vacances.

P Une heure par jour minimum. En moyenne. Si tu comptes le midi... le soir Lagaffe, y’a bien une ½ heure, donc ça fait une heure. Et quand elle peut ne pas les louper, elle ne les loupe pas. Entre les jeux, les films d’une heure et demie. Elle regarde aussi les infos. Elle connaît les politiciens.

E D’après vous quel est le meilleur moyen pour qu’un enfant apprenne bien ?

M Pour moi, c’est sous forme ludique.

P Le meilleur moyen, c’est qu’elle voit les grandes personnes s’intéresser. Pour moi, au niveau de la lecture, il faut que son entourage il aime ça. Quand on est petit, on s'habitue. dans pas mal de métier, le fils va reprendre parce qu’il a baigné dedans. En règle générale... une personne qui lit pas mal, l’enfant décalque... Je pense que c’est la règle générale, je pense que si un enfant voit son entourage lire pas mal, l’enfant lira pas mal. Il ne lira pas les mêmes choses, mais il aura le nez dans...

E Quand est-ce qu’on peut dire que Claire a commencé à apprendre à lire ?

M La dernière année de maternelle.

P L’alphabet, elle a réussi assez vite à l’enregistrer sans trop se tromper.

E Pour vous, la connaissance de l’alphabet est importante pour apprendre à lire ?

P Pas spécialement. Je pense qu’on arrive à apprendre... faut faire la différence... non pas à cet âge là... je voyais les syllabes, ça peut encore attendre... je ne sais pas... je pense que là où on apprend mieux à lire c’est à force de lire, c’est pas en apprenant l’alphabet qu’on apprend à lire, un A c’est un A, un B, un B, ça fait pas tout, faut apprendre à les additionner ensemble, les conjuguer ensemble... le vocabulaire... la conjugaison, c’est énorme. On n’y est pas encore. Quand on va attaquer ça.

M Elle a commencé, le présent.

E Quand elle regarde la télévision, elle est toute seule ou accompagnée ?

M On est toujours présent. De temps en temps, quand c’est les vacances, on se fait une soirée film. On va choisir un film approprié pour Claire, elle aime bien ça.

P C’est des soirées cinéma. Si je propose à Claire regarder un film ou lire un livre, c’est le film qui va l’emporter.

E Ça vous déçoit ?

P Un peu. J’aurai voulu qu’elle fasse des choses que moi j’ai pas pu faire mais que j’ai voulu faire. Mais je n’ai pas été motivé quand j'étais petit. J’étais le 8ème des enfants, mes parents ne m’ont pas surveillé pour les devoirs. Ils regardaient si je les avais fait ou pas, mais ils n’étaient pas à côté de moi pour m’aider.

E Là, vous êtres près d’elle..

M Oui, que ce soit l’un ou l’autre.

E Vous passez du temps avec elle le soir.

P Oui. On s'en occupe de cette petite puce. On ne veut pas faire les mêmes erreurs... pas des erreurs...

M Ce sont les circonstances de la vie. Moi c’est pareil, j’étais d’une famille nombreuse, j’étais l’aînée, une maman qui était toujours malade, on ne venait pas vérifier si j’avais fait mes devoirs. Quand je rentrais de l’école, il fallait préparer à manger, y’avait du linge à laver, y’avait plein de chose comme ça... j’étais pas brillante à l’école, pourtant j’aimais beaucoup le français, l’histoire, la géographie, et la chance d’avoir des enseignantes qui comprenaient bien la situation et qui animaient bien leur. cours.. surtout l’histoire, j’aimais beaucoup, elle animait tellement bien... j’étais complètement transportée et je regrette justement de ne pas avoir pu... j’ai toujours regretté de ne pas avoir lu beaucoup de livres, c’était très très rare, j’ai eu 3-4 livres quand j’étais enfant. C'est pour ça que je suis maintenant boulimique des livres.

E Et Claire, elle a beaucoup de livres ?

M 30-40 livres Oui, elle a pas mal de livres.

E Avez-vous des règles familiales ?

P Oui. Plein de choses... au niveau de la lecture ...

E De tout.

P On n’est pas stricte, du genre les mains sur la table...

M A partir du moment où il y a le respect des autres.

P Respect de l’alimentation.

M Ne pas gâcher. Le gaspillage, voyez ça c’est des règles de vie au quotidien. En de hors de ça, les choses que je n'aime pas. Je n’aime pas la vulgarité.

P Oui, tout à fait. Malgré qu’on en dit s’en faire exprès. Même Claire, elle se reprend toute seule.

E Vous passez énormément de temps avec Claire pour son travail ?

P Une bonne demi-heure.

E Avec un contrôle de son travail.

M A oui, si on ne le faisait pas, elle serait très contente qu'on passe au travers de ça.

P Elle nous a fait une ou deux fois le coup d’oublier son livre à l’école. Je regarde de près? Il y a le contexte de dire, j'ai oublié donc, je ne ferai pas.

M Je note sur un autre cahier à la maison les choses qu’il y a à faire.

E Vous surveillez bien le travail de l’enfant.

M Oui.

E Depuis la grande section.

M Oui. Quand elle était en CP d’adaptation, c’était la méthode globale, et je ne comprenais rien du tout la première semaine quand ils avaient commencé... je suis allée voir la maîtresse lui dire que je ne comprends pas et elle m’avait expliqué. C’était ces mots qu’il fallait visualiser et pouvoir les lire sans connaître l’alphabet, c’était quelque chose qui me dépassait. Je n’arrivais pas trop à comprendre.

P Fallait pas lui dire le /Pé/ mais le /Pe/. Moi j’écris vite, elle voyait mon écriture, elle me disait c’est pas ça... On va t’apprendre parce que tu débutes, on va t’apprendre à bien. faire la boucle au niveau du "b".. quand on écrit normalement, on a pas la représentation... on dépasse

M Y’a eu un petit temps d’adaptation pour nous aussi en fait .

P On lui a acheté un grand tableau pour mettre tout l’alphabet et les chiffres aussi.... On a joué à la maîtresse, elle aime bien aussi.

E Elle est très entourée.

P Oui. Y’a des moments où elle est seule, on ne peut pas être constamment avec elle. On veut pas en faire une fifille fragile et la voir chialer dès qu'on la quitte. Je crois qu’elle sait prendre son indépendance...

M Elle est très sociable.

P Non, elle a fait quelques colonies, assez jeune.

M Ça c’est toujours bien passé. Il n'y a jamais eu de problème.

E C’est important de vivre en communauté pour les enfants aussi.

M Elle est seule. Son frère est trop grand. Il est plus là. Il a 24 ans. Il est plus à la maison. Ça fait une petite fille toute seule, parfois elle s’ennuie. Ça commence, avant non. Elle a beaucoup de choses pour faire des travaux manuels, comme je suis manuelle. Elle fait avec moi, pas mal de petites choses... des pochoirs, de la pâte à sel, des tampons, elle a l’alphabet, des chiffres, des dessins, des fleurs...

E Talon sociologique, votre âge.

M 1954.

P 1959.

E Revenu familial.

P Entre 5 et 10.000 F

E Avez-vous autre chose à dire ?

P Le souhait, un petit plus d’entourage autour des enfants, il en manque. C'est un souhait global. Qu'il y ait plus de personnes et qu'on sache faire la différence entre une maîtresse et un éducateur par exemple. c'est à dire, Par rapport aux écoles de banlieue, on voit qu’il y a un manque de personnel énorme.

M D’encadrement oui.

P Le professeur, il va être obligé de jouer le rôle d’éducateur, de médiateur, de... pas de 36 métiers, il a un sacré boulot, quand on dit qu’il y a un surveillant pour 300 élèves c’est la folie. Y’a de la violence et tout ça et on dit qu'il y a un surveillant pour 300 élèves..

M Et je pense que l’instituteur aura plus de chance de déceler des anomalies s’il y en a, si il a un effectif minime que s’il est surchargé. Déjà, ils ont un cahier des charges à rendre énorme sur une année scolaire. C’est beaucoup. On demande beaucoup à l’enfant.

E Vous trouvez qu’on demande beaucoup à l’enfant.

M Oui.

P Ça va vite.

M Ça va très vite.

P Les enfants n’ont pas trop le temps de réagir. Tu suis ou tu ne suis pas, et puis on te remets à côté. C'est pour ça que je disais tout à l'heure qu'il manque d’encadrement pour faire... qu’ils prennent des enfants en charge pour les aider, ceux qui arrivent mieux, tant mieux et puis ceux qui n’arrivent pas, qu’on dise pas tant pis pour eux et qu’on dit on est avec eux...

M On peut toujours faire quelque chose.

P On peut s’entraider à ce niveau là.

M Il est important qu’on remette un peu d’éducation civique.

E Du côté de l’éthique, du civisme...

M C’est très important. Parce qu’à l’heure actuelle les jeunes ne savent plus ce que c’est. Les parents n’ont pas Malheureusement je ne sais pas... peut-être lâchent trop vite tout ça, parce qu’ils sont pris dans un engrenage de travail. C'est pour cette raison que je ne veux pas faire un temps plein je ne veux pas...

P Faire à manger correctement à un enfant, c’est important.

E C’est par choix votre mi-temps.

M Oui. Et je n'ai pas envie d'avoir plus.

P Peut-être plus tard, quand Claire sera plus grande.

M Oui, je pourrai prendre plus mais pour l'instant. Jusqu’à 14-15 ans, 16 ans, je trouve qu’il est indispensable d’être à leurs côtés.

P A notre niveau. Y’a des parents qu’ont plus de facilité à pouvoir aider leurs enfants par rapport à leur connaissance aussi. Si un enfant à des parents qui sont plus instruits, je ne dis pas intelligence, mais d'instruction, il aura plus de facilité. Claire a besoin de nous. Si Chantal avait un plein temps, on serait à jongler avec elle. Le mercredi après-midi elle est avec elle.

E Est-ce que vous allez à la bibliothèque ?

M A la bibliothèque de l’école.

E A la médiathèque ?

P Oui, quand j’y travaillais, à l’équipement. Régulièrement j’allais chercher Claire à la crèche et on empruntait des livres à cette époque, c'était intéressant.

E Je vous remercie de ce que vous avez pu me dire....