0.2.2. Définition des concepts-clés

Nous présentons ici quelques concepts essentiels, dont les définitions seront développées dans la partie 1 de notre thèse.

La veille stratégique

D’après Humbert Lesca (1994) : ‘“ La veille stratégique est le processus informationnel par lequel l’entreprise se met à l’écoute anticipative des signaux faibles de son environnement dans le but créatif de découvrir des opportunités et de réduire son incertitude ”’ . Notre position est assez proche de cette définition bien que nous pensons qu’il n’est pas uniquement question de signaux faibles. En effet, nous préférons nous attacher à une recherche d’information plus générale, faible ou non, et donc nous rapprocher de la définition d’Emmanuel Pateyron (1997) : ‘“ La veille stratégique désigne la recherche de l’information grâce à une vigilance constante et une surveillance permanente de l’environnement pour des visées stratégiques ”.’ Nous nous contenterons simplement de la compléter par la définition de la vigilance que nous apportent Henri Savall et Véronique Zardet (1995) : ‘“ Surveillance aiguë, particulièrement active et efficace de l’environnement interne et externe de l’organisation pour en extraire des informations utiles au pilotage stratégique et opérationnel de l’organisation. Ce terme plus actif est préféré par la théorie socio-économique des entreprises et des organisations à celui de veille ”’ .

Nous ne souhaitons pas ici débattre des notions d’environnements interne et externe que nous trouvons dans cette définition, d’autres l’ayant fait avant nous 5 . Nous nous contenterons d’aborder la veille externe et les systèmes d’information internes qui seront développés comme les bases du dispositif de veille dans les entreprises et les organisations.

Nous allons approfondir les différences entre la veille et la vigilance au travers de leur définition classique :

  • D’abord la veille : du latin vigila, d’après l’encyclopédie Larousse et selon la définition qui nous intéresse : “ exercer une garde, une surveillance. Porter son attention ; prendre garde à quelque chose, surveiller ” ;
  • Ensuite, la vigilance : du latin vigilancia, d’après l’encyclopédie Larousse : “ surveillance soutenue et attentive ” et vigilant : “ attentif, qui veille avec beaucoup de soin ”.

Au regard de ces définitions, la distinction n’est pas évidente, d’autant plus que de nombreux auteurs les emploient indistinctement. Prenons l’exemple de ces deux définitions de la vigilance :

  • C’est la fonction de l’organisation qui gère le système d’information pour le management stratégique de l’entreprise.
  • C’est la fonction d’observation de l’environnement dans une optique stratégique et prospective (Antoine, 1992).

Bien que la différence soit infime, nous constatons qu’effectivement nous trouvons davantage d’actions et de mobilisation dans la définition du terme vigilance. Nous conviendrons que la veille est une base pour assurer les réflexes de vigilance, dont les concepts sont interdépendants et contiennent des principes d’action.

Nous pouvons reprendre ici l’analogie veille / vigie / bateau, développée par l’ARIST Rhône-Alpes dans son fascicule : “ La veille en PMI : méthodes et exemples ” en 1995 :

‘“ Un navire peut partir à la découverte, il s’avance alors dans un univers inconnu, sa destination est floue. Pour piloter, le capitaine a besoin d’une vigie qui lui indique les obstacles à l’avance, et qui détecte les terres de destinations possibles.
A la guerre une flotte de bateaux lutte pour détruire l’ennemi. Pour vaincre, le commandant doit connaître en permanence les déplacements des différents bâtiments, il doit surveiller le ciel, la surface de l’océan et les fonds. Les vigies à disposition des navires s’appellent radars, sonars, satellites, services de renseignements… ”’

Le navire a besoin d’une vigie qui lui permette d’éclairer sa route et de préciser ses objectifs. Dans sa démarche compétitive avec les concurrents, l’entreprise doit détecter les menaces et les opportunités. La vigie est un élément-clé du système de pilotage de l’entreprise.

L’ensemble des fonctions de l’entreprise participe au système de veille. Ce système détecte, exploite et transmet les informations qui peuvent permettre à l’entreprise de faire des choix judicieux et de prendre les bonnes décisions.

Notre tentation est grande de nous reporter à un exemple “ historique ” très à la mode : en effet, nous pensons que la veille n’est pas uniquement l’affaire de la vigie mais dépend aussi d’autres facteurs. Notre exemple sera celui du Titanic, sur lequel la vigie a, certes, joué son rôle d’alerte, mais trop tard pour qu’un bateau de cette envergure puisse se détourner de son obstacle. Pourtant l’obstacle aurait pu être évité car il avait été signalé auparavant par un télégramme. L’information n’est peut-être pas arrivée au commandant ou celui-ci n’a pas voulu en tenir compte. La vigilance est donc aussi affaire de communication et de volonté des dirigeants.

Notes
5.

Isabelle BARTH, “ Proposition pour un marketing interne et externe innovant - Eléments théoriques et de mise en œuvre ”, Thèse de Doctorat de Sciences de Gestion, Université Lumière Lyon 2, sous la direction de Henri SAVALL, 1994, 796 pages, et

Olivier VOYANT, “ Système de veille stratégique ”, Thèse de Doctorat de Sciences de Gestion , Université Lumière Lyon 2, sous la direction de Henri SAVALL, 1997, 350 pages