Environnement pertinent

Henri Savall et Véronique Zardet (1995) nous expliquent que dans la théorie socio-économique, l’entreprise est un acteur stratège qui évolue dans un “ environnement pertinent ”, c'est-à-dire dont il construit les contours de façon interactive avec sa propre stratégie. La stratégie se co-détermine avec le périmètre de l’environnement pertinent.

Leur analyse de l’environnement se fait à deux niveaux : ils distinguent l’environnement externe qui est l’ensemble des acteurs économiques hors de l’organisation, dont les impacts ont des effets directs, indirects, diffus ou induits sur l’organisation, et l’environnement interne qui est l’ensemble des ressources actives de l’organisation, c'est-à-dire le potentiel humain, les acteurs producteurs d’activité et de valeur ajoutée internes. La relation d’échange entre l’organisation et son environnement interne se concrétise par des entrées (les compétences des acteurs internes, leurs objectifs individuels et l’ensemble du “ bagage ” de leur vie hors du travail) et des sorties : notamment la contribution individuelle et collective à la finalité de l’organisation.

Pour Humbert Lesca (1994), l’environnement de l’entreprise doit être pris dans un sens très général, englobant le marché (les clients et les concurrents, actuels et potentiels), mais aussi les produits, les procédés et les technologies, les pouvoirs publics et les divers groupes de pressions…

Les acteurs vivent et travaillent dans un environnement. Le fruit de leur veille stratégique sera soit le hasard, soit leurs centres d’intérêt et d’activité, soit des cibles stratégiques précises. L’environnement dans lequel ils évoluent est sans cesse en transformation et par conséquence, il n’est pas fini.

Ce sont les acteurs qui en quelque sorte vont créer leur propre environnement et se concevoir des chemins d’accès à la connaissance de manière personnalisée et en rapport avec les capacités de leur entreprise.

Certains distinguent plusieurs types d’environnements :

  • L’environnement des partenaires défini comme celui qui est en relation avec l’entreprise et qui a des flux d’échanges physique et financier.
  • L’environnement des non-partenaires défini comme celui qui est en relation avec l’entreprise sans flux d’échanges physique et financier.
  • L’environnement des A-partenaires défini comme celui qui n’a pas de relation ou d’influence sur l’entreprise.

L’environnement imprévisible et mouvant est bien souvent perçu comme la cause des problèmes de l’entreprise, comme par exemple :

  • Les difficultés économiques et les prévisions difficiles.
  • La concurrence est accrue et l’émergence d’entreprises nouvelles vient perturber les grandes organisations que l’on croyait immuables.
  • Le marché du travail change : les personnes sont de plus en plus “ éduquées ”, elles apprennent à se prendre en main, sont informées, critiques. Elles conduisent elles-mêmes leur vie professionnelle.
  • Les clients sont de plus en plus “ connaisseurs ”, compétents ; ils se sentent tous uniques : les stratégies de niches s’imposent dans tous les domaines.
  • Les technologies évoluent rapidement et notamment en matière d’information, on assiste à de véritables révolutions technologiques.
  • Tout cet environnement entraîne un renforcement des réglementations et des législations (contraintes externes) et l’émergence d’un nouveau concept : l’entreprise citoyenne (contraintes internes).

Ainsi, pour l’entreprise, les nouvelles donnes sont les suivantes :

  • Interdépendance entre les entreprises et entre l’entreprise et son environnement.
  • Les clients sont de plus en plus exigeants à tous les points de vue : ils veulent obtenir les produits et les services dont ils ont réellement besoin, en temps voulu et au moindre coût.
  • Le personnel monte en compétences (potentiellement), mais est de plus en plus critique et avide de communication, et de moins en moins motivé par le travail parcellaire, planifié, déjà organisé…
  • Le fonctionnement de l’entreprise s’alourdit, car elle doit s’adapter en permanence à des évolutions non prévisibles et dans tous les domaines : procédures, contrôles…
  • Et, chose paradoxale, le tout dans une atmosphère “ frileuse ” : on craint de bouger, de se remettre en question…Chacun cherche avant tout la sécurité.

Ainsi apparaissent une multitude d’outils, d’idées…qui permettent d’améliorer si ce n’est les résultats, au moins la réflexion.

L’environnement a une importance croissante dans la gestion de l’organisation (Lebraty et Teller, 1994). On distingue trois phases historiques : après la seconde guerre mondiale, jusqu’aux années 60 et jusqu’au milieu des années 70. Mais c’est surtout depuis les événements d’Iran et les deux chocs pétroliers que nous avons redécouvert que l’économie est politique 37 .

Nous savons que des paramètres économiques et financiers très importants tels que le taux de change peuvent être liés à la stabilité ou à l’instabilité des pays correspondants. Les investisseurs et les banquiers ont donc développé des tableaux de bord et des indicateurs concernant les risques de pays incluant des aspects sociaux, culturels et politiques.

Trois notions nous apparaissent devoir intervenir dans un essai de conceptualisation des rapports de l’entreprise avec son environnement : la notion de frontière, la notion d’échange et la notion de champ de perception.

De façon générale, il s’agit de savoir si la transformation des flux, via l’interface, remplit une double fonction : celle de fournir au système des inputs lui permettant de réaliser ses objectifs, et celle d’apporter au système de contrôle les entrées indispensables à la vérification des écarts entre prévisions et réalisations.

La surveillance de l’environnement est un élément essentiel du management stratégique (Pateyron, 1997). Il est possible de distinguer plusieurs stades ou degrés dans un processus d’information externe. En premier lieu, doit exister à travers l’organisation, une attitude généralisée d’éveil qui permette à ceux qui la récoltent d’arriver au contact d’un maximum d’informations pertinentes. Un deuxième stade est celui d’une attention plus dirigée, issue de l’identification plus ou moins précise de certains problèmes ou questions qui se posent à l’organisation. A ce stade, sans aller jusqu’à une recherche active, on est exposé à réagir à toute information qui rentre dans le champ des questions préalablement définies. L’étape suivante consiste à passer à une recherche active d’informations relatives à certains domaines sans que cette recherche soit pour autant formellement organisée. Le stade ultime consiste évidemment à passer d’une recherche informelle à une recherche formelle, c’est-à-dire guidée par un plan ou une procédure préalablement définie. Plus la recherche est formalisée, plus elle correspond à des zones de problèmes connus et déjà analysés avec précision. On se rend immédiatement compte que la capacité d’innovation et de changement d’une organisation sera beaucoup plus nettement et spécifiquement conditionnée par la qualité des activités les plus informelles, c’est-à-dire celles qui ont été décrites en premier et en deuxième lieu.

Voilà pourquoi nous avons réuni environnement et système d’information. L’environnement est une donnée pour l’entreprise, mais si celle-ci ne sait pas toujours en extraire la substantifique moelle… elle n’en retirera rien en terme de performance et risque de mettre sa survie en danger. Pour analyser l’environnement, l’entreprise a besoin d’un système d’information adapté et pertinent qui permet d’informer la décision stratégique. En effet, polyvalente et globale, la veille stratégique a pour vocation de prévoir ce qui concerne l’environnement proche et lointain de l’entreprise. Cycle de l’information, elle établit des liens et des “ intelligences ” entre des informations éclatées dans le temps et dans l’espace (Besson et Possin, 1996).

Notes
37.

Les exemples suivants sont cités par Jacques ANTOINE dans Humanisme et Entreprise, Juin 86.