2. Les critiques issues de l’analyse de la participation politique

La théorie classique de la citoyenneté ne semble pas plus résister aux analyses portant sur la structuration du champ politique. Au mythe d’une démocratie de participation dont la théorie classique se fait le héraut, peuvent en effet être opposées les analyses développées par les tenants de la sociologie critique. Ces dernières tendent à mettre en cause un certain nombre de postulats fondant souvent implicitement le discours sur la participation des citoyens. Ce sont ces analyses qu’il nous faut maintenant considérer128.

La critique du modèle classique de la citoyenneté s’appuie d’abord sur l’affirmation de l’autonomie d’un champ politique professionnel. Nombreux sont aujourd’hui les travaux portant sur la professionnalisation tendancielle du champ politique129. Or, reconnaître cette professionnalisation implique de penser un champ politique relativement autonome. Cette reconnaissance conduit d’abord à penser une rupture entre professionnels de la politique et profanes - et ce, contre “l’idéologie de la “participation politique” qui, décrivant la hiérarchie des formes d’intervention politique, pose l’existence d’un continuum allant du vote à l’exercice du pouvoir d’Etat”130 - ; elle conduit également à reconnaître la possibilité d’une distance entre structure sociale et structure politique - contre l’idée d’une représentation politique comme décalque et relais des demandes de la structure sociale.

Notes
128.

Si l’on a pu noter la distance qui animait les analyses de la citoyenneté des analyses de la participation politique, il convient toutefois de préciser que la sociologie “bourdieusienne, dans son travail de critique, entretient des liens implicites avec la théorie démocratique. Elle ne s’élève donc pas seulement contre mais se situe tout contre cette théorie. C’est dans cette mesure que l’on se permet d’intégrer, dans une analyse portant avant tout sur la citoyenneté, les apports de cette sociologie.

129.

Daniel Gaxie retrace les analyses, depuis Marx jusqu’à Schumpeter, qui ont jalonné la réflexion concernant la professionnalisation du champ politique, Les professionnels de la politique, Paris, PUF, 1973, “Dossiers Thémis”, 96 p.

130.

Daniel Gaxie, Le cens caché , Paris, Seuil, 1978, p. 42.