Une contestation juridique et politique

L’“Association pour la protection des habitants du 8ème arrondissement (Lyon), des quartiers Rockefeller-Montchat (3ème) et Pinel-Les Essarts (Bron)”650 sera parmi les plus actives dans la lutte contre le projet de construction de mosquée. Ses statuts stipulent dans l’article 2 que cette association a pour objet de “défendre les intérêts des citoyens du 8ème arrondissement de Lyon, des quartiers Rockefeller-Montchat (Lyon 3ème), Pinel-Les Essarts (Bron) contre les décisions prises par leurs élus, dans des actions ponctuelles proposées par un ou plusieurs membres, lorsque ces décisions sont prises :

Le Mouvement Apolitique d’Intérêt National (MAIN), “formellement opposée à la construction d’un centre islamique sur notre bonne ville de Lyon et sur toute l’étendue de notre territoire national” intervient essentiellement pour le projet de la rue de Surville. Ce mouvement, proche du Front National, oriente ses griefs autour de l’absence de concertation : “on parle toujours de la démocratie. Or, jusqu’à présent, jamais nous n’avons été consultés. On nous a mis devant le fait accompli. Ce que nous souhaitons c’est qu’un référendum populaire soit organisé sur le sujet”652.

La procédure privilégiée par les opposants contre le projet mais aussi l’ACLIF qui en a la charge est juridique. La première intervention de l’Association de protection des habitants du 8ème, avant que d’être présente dans le débat public, est de déposer dès juin 1984 un recours devant le tribunal administratif de Lyon contre le permis de construire obtenu par l’ACLIF en février de la même année.

Après le gain du procès contre l’ACLIF, l’association de protection des habitants croit en être quitte avec le projet de mosquée sur Lyon et en particulier dans le 8ème arrondissement. A partir du moment où elle sera démentie par le dépôt d’un deuxième permis tenant compte des remarques du tribunal, l’association entreprend un travail plus politique, orienté de façon beaucoup plus caractéristique vers la municipalité lyonnaise.

Ces mouvements mènent alors des campagnes de pétition destinées à compter, à défaut des adhérents, les personnes se prononçant contre la mosquée653. La distribution de tracts ou la tenue de réunions publiques leur permettent également de se faire les porte-parole des contestataires auprès de la municipalité.

Les multiples actions qui suivront viseront, pour la plupart, la mairie de Lyon : Occupation de la mairie du 8ème arrondissement par les adhérents du MAIN début 1987, interventions dans la presse654.

Notes
650.

Cette association est crée, par le pus grand des hasards, le 14 février 1984, jour de l’entrée en vigueur du premier permis de construire déposé par l’ACLIF pour le terrain du Boulevard Pinel. Elle est dès l’origine, malgré son objet très vaste, mobilisée contre le projet de mosquée. Elle est présidée par Raymonde Girod, Pied Noir née à Aumale en Algérie - qui se défendra de parler en tant que telle et fera toujours attention à ce que son discours ne soit pas interprété comme une conséquence de son origine. Cf. Lyon-Libération 25 septembre 1989 -, alors que la vice-présidente ainsi que la trésorière son nées à Lyon. Elles ont toutes trois entre 50 et 60 ans en 1983 et sont sans professions.

651.

Statuts de l’Association déclarée sous le régime de la Loi du 1er juillet 1901 et du décret du 16 août 1901, déposés auprès de la Préfecture.

652.

Pour cette citation et les suivantes cf. Le Progrès 26 novembre 1986.

653.

Deux campagnes de pétitions seront organisées par l’association. La première, en 1984, recueille quelques XXX signatures alors que la deuxième, menée en 1989 recueille près de 2800 signatures.

654.

Ces interventions sont pour la plupart sollicitées par les journalistes notamment à l’occasion des manifestations publiques de l’association : dépôt de plainte au tribunal, organisation de manifestations... L’association aura également recours à des communiqués de presse, instrumentalisant ainsi les médias. L’un d’eux, mentionnant l’assurance qu’ils avaient pu officieusement obtenir de la part de M. Battailly, maire du 8ème, que la mosquée ne serait pas construite Bd Pinel apparaît très tactique. En effet, en faisant publier le 6 mars 1986 par la presse locale que l’association “a obtenu toutes les assurances nécessaires pour pouvoir affirmer que la construction de la mosquée n’aura pas lieu Bd Pinel”, elle contraint ce dernier à prendre une position claire et publique.