2-Une Résistance précocement organisée, active, diverse

Du fait des déterminants analysés ci-dessus mais surtout parce qu’il y eut alors des hommes et des femmes pour refuser les faits et abaissements de la défaite de juin 1940, une résistance multiforme prit rapidement corps dès 1940-1941. En septembre 1940 , les premiers réseaux se mettent en place. D’abord limité à l’organisation de filières d’évasion, le réseau belge Delbo-Phénix élargit rapidement son action au renseignement. Il trouve à Chalon-sur-Saône, ville située au carrefour de la ligne de démarcation et des grands axes Nord-Sud, un premier point d’appui avec le garagiste Camille CHEVALIER, passeur et organisateur infatigable jusqu’à son arrestation. Depuis Lyon, le réseau Marco-Polo étend son activité vers le nord, jusqu’à la région mâconnaise où il s’implante solidement. C’est l’un de ses membres, l’adjudant MEYER, ancien du 5e régiment de Dragons de Mâcon, qui participe à la fondation du premier maquis de Saône-et-Loire, à Beaubery en Charolais, dès le printemps 1943. En Zone Nord, le réseau Alliance, lié à l’IS, est implanté dans l’usine d’extraction et de raffinage de schistes bitumineux des Télots, près d’Autun. La diversité organisationnelle est renforcée par la perméabilité entre réseaux et mouvements. Un homme comme René FLECHARD, de Saint-Bonnet-de-Joux, en Charolais, membre de Combat, travaille pour le réseau Birr de la France libre, avant d’entrer en contact avec le SOE, solidement implanté dans le Sud-Ouest du département. Cette organisation, représentée par ses deux agents John BROWN BARTOLDI-TIBURCE et Michel DARTOIS-MICHEL, contrôle la majeure partie des maquis du Clunysois et du Charolais, les soumettant, en échange de matériel, à la stricte stratégie britannique.

La géographie comme la position du département en font un domaine stratégique pour le BCRA et le SAP. André JARROT comme Bernard MOREY y organisent parachutages, réceptions et envols de cadres. En diverses circonstances, le général DELESTRAINT, Jean MOULIN, Claude BOURDET, Henry FRENAY, Berthie ALBRECHT, Lucie et Raymond AUBRAC, le général de LATTRE DE TASSIGNY ont foulé le sol de Saône-et-Loire, y ont pour certains trouvé de durables refuges avant de s’en envoler. Berthie ALBRECHT y vécut malheureusement sa dernière arrestation, en gare de Mâcon. Le BCRA obtint de faire réaliser par la Résistance des destructions habituellement assurées par bombardements, accompagnés de ce que les militaires désignent par un terrible euphémisme de “ dégâts collatéraux ”. La mission Armada, venue de Londres avec André JARROT-GOUJON et BASSET-MARY fournit les moyens matériels, les maquis les hommes. Trois cibles furent alors neutralisées, évitant à Chalon-sur-Saône d’être bombardée (centrale thermique et barrage de Gigny) et au Creusot de l’être une troisième fois (destruction des infrastructures assurant l’alimentation électrique des usines SCHNEIDER travaillant pour l’occupant).

Les mouvements eux aussi sont précocement implantés. Combat est solidement organisé en Louhannais, à Tournus, dans le Clunysois. Libération-Sud naît fin 1941 de la rencontre du communiste Pierre DELACROIX alors coupé de son parti avec les jeunes socialistes mâconnais Pierre DENAVE et Louis ESCANDE. C’est en Charolais que Franc-Tireur trouve sa principale base dans le département, autour du garagiste Louis LAPALUS et du greffier du Tribunal de Charolles Félix VEZANT. En Zone-Nord, l’OCM est présente à Chalon et Rully, alors que les FTP possèdent des implantations dans le Bassin minier, Chalon, Autun, Chagny. Ils sont aussi présents en Zone-Sud, en Bresse, Mâconnais et Tournugeois.