II-UN CORPS PREFECTORAL ISSU DES ORGANISATIONS RESISTANTES

1-A la recherche d’un préfet

La Saône-et-Loire se singularise, à l’instar de quelques autres départements, lors de la désignation d’un préfet de la Libération. Après qu’un premier personnage pressenti ne se soit pas présenté, c’est le préfet LANQUETIN qui est désigné par les autorités nationales et le Commissaire de la République. Celui-ci ayant été récusé par le CDL, c’est finalement son président, Lucien DREVON qui est désigné pour siéger à la Préfecture de Mâcon 1 . Cela soulève une double question : comment expliquer que, contrairement à ce qu’il fit dans d’autres circonstances, à Toulouse par exemple, le gouvernement qui avait pourtant considéré que la désignation des préfets relevait de sa compétence, cède aussi facilement ? Ceci étant établi, pourquoi le choix se porta-t-il sur quelqu’un tardivement arrivé en Saône-et-Loire, aux liens ténus, essentiellement administratifs, avec les structures résistantes ? Plusieurs acteurs survivants 2 estiment, sans bien sûr pouvoir en apporter la preuve, que, derrière le Commissaire de la République MAIREY, il faut voir en action l’appareil politique de la SFIO qui aurait alors pesé de tout son poids pour laisser faire les choses. Quant à la personne de DREVON, il faut remonter à son arrivée dans le département pour discerner le fil de son parcours, de la direction des MUR à la Préfecture, en passant par la présidence du CDL. Sa nomination à la tête des MUR, lors de la réunion de Villefranche de mai 1944 vient là encore de l’échelon supérieur. C’est en effet sur proposition d’ALBAN-VISTEL qu’il fut désigné, alors qu’aucun participant à la réunion, à l’exception du dirigeant régional ne le connaissait. Cette nomination fut certes prise par défaut, les autres personnes envisagées ayant refusé le poste, comme Henri VINCENT-VIC, chef du secteur du Louhannais de l’AS et des MUR, ou ayant été récusées, comme Rupert POLFIET que ses imprudences comme ses liens avec François MITTERRAND rendaient suspect aux yeux de certains. Il n’empêche que c’est bien le représentant régional qui avança le nom de cet ancien directeur du bureau des pneumatiques de la préfecture du Jura.

Chargé par VISTEL de structurer avec son Etat-major un Comité départemental de la Résistance, qui devint dès août CDL, DREVON devient naturellement son président puis, aidé par les circonstances, préfet de la Libération.

Notes
1.

Cette situation apparut alors comme une manifestation positive d’autonomie. Chantal ROCHAT, devenue LOIZILLON en 1945, pour avoir connu le préfet DREVON puis LANQUETIN alors que son mari était en garnison d’occupation à Fribourg en Brisgau et que ce dernier y était fonctionnaire, considère aujourd’hui qu’il aurait bien mieux valu l’avoir comme préfet, vues ses qualités humaines. Entretien 11 août 1999.

2.

Notamment Claude ROCHAT et Raymond BARRAULT.