Cette interrogation, que Claude ROCHAT soulève encore aujourd’hui, en penchant pour une réponse négative, qu’Henri VINCENT se posa jusqu’à sa mort, renvoie à la nature du fait maquisard comme à celle du processus politique de la période suivant la Libération.
Les maquis (notons d’ailleurs que dans l’acception familière le pluriel désigne aussi bien plusieurs maquis que les maquisards) restent un objet historique, humain, politique résistant à bien des analyses. De problématiques nouvelles 1 permettent d’en identifier la nouveauté radicale comme son irréductibilité à tout processus restaurateur, tant il était potentiellement porteur d’une approche nouvelle de la question de la nation comme de l’organisation sociale.
A partir du moment où ce qui l’emporte en 1944-1945 relève plus de la restauration que de la transformation, que tout ce qui était porteur de cette nouveauté radicale se retrouvait marginalisé ou intégré, il n’y avait plus de place pour ceux qui, au sein de l’appareil d’Etat restauré, rechignaient à ce renoncement.
Il ne restait plus qu’à transformer le combat résistant en geste héroïque, statufier les héros, faire opérer le mythe, comme celui d’un programme du CNR dont la mise en œuvre résoudrait de façon magique les difficultés des temps nouveaux.
L’exemple de ces deux sous-préfets est significatif parce que, par leur parcours résistant, par leurs qualités personnelles comme par leur réussite dans des fonctions auxquelles ils n’étaient pas préparés, ils mettent, à travers la singularité de leur cas, les réalités politiques de la France libérée en pleine lumière. Leur échec concrétisé par leur éviction de l’administration préfectorale est celui de ce que la Résistance portait de nouveau en elle.
Jean-Yves Boursier, Chroniques du maquis (1943-1944), FTP du camp Jean Pierson et d’ailleurs, L’Harmattan, 2000, 352 p.