1-Polonais de France, maquisard

Théodore PLONKA est né en France, en 1921, de parents mineurs polonais. De nationalité française, il se considère alors 1 comme “ Polonais de France ”, ce qui signifie que s’il garde des liens forts avec son pays, sa langue, ses compatriotes polonais, il se sent pleinement citoyen de France. Après l’école primaire, il rompt avec la continuité générationnelle des familles de mineurs pour faire un apprentissage de boulanger.

Son récit commence avec son engagement dans l’armée d’armistice en mai 1941, sa mise en permission renouvelable le 30 novembre 1942 et le début de ses actions résistantes. Ce qu’il en dit, pour la période où il garde un couverture légale, comme ouvrier boulanger, soulève plus de questions qu’il n’apporte de réponses sur les données de cette action.

Les “ nous ” mal défini qu’il utilise pour désigner “ le groupe de jeunes gens venant de la ville et des alentours ” ne nous renseigne pas sur le dispositif initial autour duquel ce “ groupe ” a pu se constituer. Or, l’histoire de la Résistance montre qu’il n’y eut pas de génération spontanée, qu’il y eut toujours à l’origine un cadre organisationnel, un réseau d’individus constituant un noyau attractif et structurant. Les liaisons existant avec “ Paris ”, via l’agent de liaison CATHERINE, qui “ apporte des ordres nouveaux, de l’argent… ”, le fait d’envoyer “ des armes à Paris ”, enfin les liens établis avec les FTP du maquis Valmy permettent d’affirmer que ces jeunes Polonais ou Français d’origine polonaise comme PLONKA sont en fait pris en main par les structures clandestines du PC polonais directement lié aux appareils étatiques soviétiques. PLONKA est donc au cœur de cette réalité complexe qui voit se rencontrer un authentique soulèvement de masse contre l’occupant nazi, exprimant de fortes réalités nationales, et le travail de structures au service des intérêts géopolitiques de l’Etat soviétique. Tout comme il serait naïf et idéaliste de nier cette dernière réalité, ne pas prendre en compte la première reviendrait à tomber dans une approche strictement étatique, stérilisante du fait résistant. Serait alors effacée ou négligée la riche et chaleureuse réalité des processus politiques locaux, qui virent des femmes et des hommes, décidés à en découdre avec l’occupant, se rallier sans barguigner à ce qui existait.

De sa période maquisarde, l’événement qui constitue probablement un élément déterminant dans ses dérives de l’été 1945 est constitué par la libération d’Autun, véritable bataille mettant aux prises d’un côté plusieurs milliers de soldats de la Wehrmacht encore très opérationnels, refluant vers le nord-est pour éviter d’être pris en tenaille et de l’autre plusieurs centaines de maquisards du régiment Valmy, les avant-gardes de la colonne SCHNEIDER ou Groupement mobile du Sud-Ouest, enfin les chars du 2e régiment de Dragons. L’attaque de la ville par les maquis, à l’aube du 8 septembre, pour des raisons encore mal élucidées, transforma les premières heures de la bataille en lourd échec pour les résistants locaux. S’il s’épanche peu dans son récit sur le massacre de 28 maquisards pris par les troupes hitlériennes, Théodore PLONKA témoigne aujourd’hui du véritable traumatisme que fut pour lui leur découverte, alors qu’“ avant l’heure H, (il) avai(t) encore discuté avec eux ”. Il revécut ces scènes terribles puisque, chargé du “ service social pour aider les familles des combattants ” du régiment, il fut amené à contacter les familles des victimes.

Il ressort du récit de ses pérégrinations, de la Libération à son affectation en janvier 1945 à un régiment de la Ière Armée, ce qui fut le sort de beaucoup d’unités FFI en cours d’intégration, c’est-à-dire une succession de multiples cantonnements, où les séances de formation et d’entraînement étaient bien en peine de satisfaire de jeunes combattants ayant signé un engagement pour la durée de la guerre et pour la plupart décidés à en découdre avec l’ennemi. Même s’il s’étend peu aujourd’hui sur ces épisodes médiocres, il apparaît au cours de l’entretien qu’il n’y eut pas pour lui continuité entre le temps du combat résistant et le temps de l’intégration à l’armée.

Notes
1.

Théodore PLONKA, entretien 23 décembre 1994.