4-Des soutiens sous conditions

Les différents cas envisagés ont montré la distance, les hésitations, les palinodies manifestées par les organisations résistantes dans la défense de résistants emprisonnés. S’enchevêtrent deux catégories de conditions pesant sur l’ampleur et la forme des soutiens. La nature des faits faisant l’objet de l’action judiciaire est manifestement déterminante, en particulier jusqu’en 1947. La gêne provoquée par des faits peu conformes à l’image idéalisée pure et héroïque des actes résistants inhibe beaucoup d’initiatives. La conjoncture politique joue alors dans le même sens tant que le PCF est engagé dans une expérience de participation gouvernementale. Le contenu de France d’abord est significatif de cette prudence. Jusqu’à l’été 1947, les articles consacrés à la question des “ patriotes emprisonnés ” sont relégués en pages intérieures, le plus souvent en bas de page, avec une typographie très réduite. Ainsi le n° 147, daté du 24 avril 1946 ne rend compte qu’en page huit, au bas de la page, de l’entrevue entre le président du Comité national de défense des patriotes emprisonnés, Pierre VILLON en personne, avec le ministre MICHELET à propos d’environ 2 000 détenus provisoires, sans qu’aucun choix technique, position, taille du titre ne vienne indiquer au lecteur qu’il s’agit là d’une question décisive dans la vie de l’association. Sur un même registre, le compte rendu du 2e Congrès de l’Association dans le n° 198 du 15 mai 1947, occupant les 2/3 d’une page, une seule phrase concerne ce problème, constituant un des 5 points du 5e des six thèmes abordés par la résolution finale. C’est seulement au cours de l’été 1947 que l’on voit se manifester de véritables campagnes d’opinion, comme les communistes savent les mener. Singulièrement alors, la première catégorie de conditions, portant sur la nature des faits, la moralité des acteurs, parfois même leur appartenance à d’autres dispositif que les FTP, passe au second plan, des hommes comme François FLAMAND, anticommuniste avéré, chef maquisard dissident, faisant alors l’objet de campagnes de soutien.

Ces données sont constitutives d’une mémoire très particulière de cet aspect du devenir des anciens résistants. Les hommes jugés, souvent condamnés et petitement soutenus, ont intégré cela dans une certaine confusion, comme leurs anciens camarades de combats.