Nourrie d’une perception très pessimiste du monde actuel, elle constitue un repli crispé sur l’héritage glorieux et héroïque de la Résistance. Vice-président départemental du Rhône de l’ANACR, président du Comité Saône-Beaujolais de cette association, comité dont l’extension beaujolaise (Rhône) et mâconnaise (Saône-et-Loire) est le lointain reflet de réalités maquisardes 1 , Régis THEVENET en est une expression significative. Réputé pour la vigueur de ses discours commémoratifs, il y développe une rhétorique dont les termes clefs sont : ‘“ Nos espoirs immenses ont été déçus, de ce que nous fûmes rien ne restera après nous ”’. Parfaitement représentatif est son discours à la cérémonie du 24 mai 1992 2 au hameau des Capitans, commune de Juliénas, où tombèrent six maquisards, le même jour de 1944. Concluant un discours où il a développé l’idée que rien dans la France de 1992 n’incarne les valeurs de la Résistance, dénonçant pêle-mêle la justice, le chômage, la politique agricole commune, “ la spéculation ”, le “ démantèlement des acquis sociaux ”, “ la multiplication de la précarité ”, “ la chasse aux pauvres gens ”, “ la rentrée de nouveaux étrangers ” avec “ l’ouverture des barrières douanières ”, il salue ses camarades d’un : ‘“ avec vous, je suis bien ; tous unis, tous réunis, nous sommes les derniers purs et les derniers sages de la République, formons ensemble le dernier carré des grognards de Waterloo, le dos au mur, chaque fois que l’un de nous tombe, il n’est pas remplacé, restons la main dans la main et quand le dernier sera tombé, le pays ne portera pas le deuil et pourtant une partie de l’honneur de la France aura disparu ”’. Au-delà de la confusion des références historiques, mêlant Résistance et ultime bataille de l’Empire napoléonien, Régis THEVENET exprime ici une conviction certes minoritaire mais qui correspond à une forme de mémoire amère et repliée excluant toute forme de transmission, toute possibilité de legs. Le dérapage verbal sur les “ étrangers ” vient confirmer s’il en était besoin l’absence de capacité immanente d’intelligibilité des situations politiques postérieures que fournirait la fidélité à l’idéal résistant.
Les liaisons entre maquis ignoraient bien entendu les limites administratives. Les maquis FTP du Charolais, du Clunysois et du Beaujolais en eurent de fréquentes. Voir Jean-YvesBOURSIER, Chroniques du maquis (1943-1944), op.cit.,
Ami, entends tu ?, trimestriel de “ des résistants de la Saône-et-Loire, du Beaujolais et de la vallée de la Saône ”, n°93, 2e trimestre 1992.