2-En Saône-et-Loire, une ANACR multicolore

L’ANACR de Saône-et-Loire n’a pas vécu une telle fracture. A l’inverse, elle a su abriter derrière l’homogénéité organisationnelle une diversité bien plus forte que dans les autres départements de la région. Liée aux circonstances de la guerre comme aux singularités personnelles, elle se manifeste par la présence, chez les adhérents de base comme dans les structures dirigeantes, de résistants issus de l’AS ou de dispositifs extérieurs aux FTP. Avant sa disparition, l’ANACR compta dans ses rangs un homme comme Louis ESCANDE, député-maire socialiste de Mâcon, avant de démissionner de la SFIO par refus d’une union de la gauche qui mettait selon lui les socialistes à la remorque du PCF, pour rejoindre l’éphémère parti social-démocrate de Max LEJEUNE. Aujourd’hui, la co-présidence est assurée par Claude ROCHAT, issu de l’AS et Lucien RENOUD-GRAPPIN. Le bureau départemental a compté dans ses membres, jusqu’à son décès en juin 1999, Marcel VITTE, figure républicaine humaniste et esprit indépendant. Nous sommes en l’occurrence fort éloignés de l’image de réceptacle d’anciens staliniens qui est parfois, non sans raison, affectée à certaines sections départementale de l’ANACR. Si une telle diversité exige un pilotage délicat, particulièrement lors des moments où le legs est confronté à des circonstances difficiles comme la guerre du Golfe ou l’affaire du Kosovo, elle permet une large ouverture, face à une Association des CVR solidement identifiée par la personne d’André JARROT, paré d’une légitimité gaulliste incontestée.

Ces deux exemples, mais l’histoire des associations est riche de cette contradiction entre l’expression d’un héritage résistant multiple, éclaté et les tentations de repli sur une image unanimiste, figée et crispée, sont révélateurs de la difficulté pour les associations de gérer l’héritage d’un phénomène historique aussi complexe que la Résistance. Au contact de réalités locales diverses, au choc de personnalités multiples, cela donne un paysage associatif particulièrement diversifié, de surcroît fragilisé par les disparitions.

Ainsi, à l’image des traces matérielles, le monde associatif manifeste une certaine dispersion des organisations locales et des réseaux personnels échappant aux grandes structurations nationales. Reste le fait de plus en plus prégnant du recul des effectifs, par le jeu mécanique du vieillissement naturel d’hommes et de femmes dont les plus jeunes atteignent aujourd’hui 75 ans. Se pose alors brutalement la question de ce qu’il en adviendra, bientôt.