4.1.1. Le contenu est choisi

Dans la fin des années 50, Gougenheim publie son Dictionnaire fondamental de la langue française, résultat d'une enquête statistique sur le français parlé et écrit, fondé sur la fréquence des mots utilisés. 1374 mots font partie de la première édition du français élémentaire 99. Jusqu'à la publication, en 1976, du Niveau Seuil 100 et de son Adaptation pour des contextes scolaires, c'est cet ouvrage qui fera référence dans la sélection du contenu lexical des méthodes. Nous allons donc devoir considérer trois périodes distinctes : celle précédant le Dictionnaire fondamental, la période située entre 1958 et 1976, celle d'après 1976.

La méthode audio-orale repose sur une analyse contrastive ou différentielle de la langue source et de la langue cible surtout en ce qui concerne les éléments phonétiques et structuraux. Ceci permet de prévenir les erreurs potentielles des apprenants et d'éviter la prise de mauvaises habitudes. Le vocabulaire est limité afin qu'il s'insère dans des cadres structuraux pré-déterminés.

Cette limitation du vocabulaire à l'environnement immédiat de l'apprenant, sans prendre en considération la fréquence statistique de l'utilisation réelle des mots, a été à l'origine des travaux de Gougenheim qui ont mis en évidence que, sur le plan lexical, les mots les plus fréquents dans la langue française sont être et avoir, suivis par les mots ayant une fonction syntaxique (articles, prépositions, coordonnants) et de la plupart des verbes irréguliers101. Sur le plan grammatical, l'interrogation est rendue par la seule intonation, voire par l'utilisation de est-ce que, ce qui évite d'introduire trop tôt l'inversion dans l'expression interrogative, le passé et le futur utilisent les formes venir de ou aller suivies de l'infinitif du verbe.

Ces travaux ont été repris dans l'élaboration des méthodes de type français fondamental, SGAV, méthode situationnelle, méthode suggestopédique. Les dernières méthodes, notionnelles-fonctionnelles, se fondent, elles, sur les travaux de Daniel Coste et de Janine Courtillon intégrés dans Un Niveau Seuil et vont ainsi plus loin que le seul français fondamental puisqu'ils y définissent non seulement des mots, mais des actes de paroles permettant l'accès à la communication écrite et orale.

Dans la méthode communicative, communautaire, naturelle, par le mouvement, en revanche, ce sont les apprenants qui vont déterminer eux-mêmes le contenu de leur apprentissage à travers leurs besoins de communication, à l'intérieur du groupe d'apprentissage, même si, comme on l'a déjà dit plus haut, l'enseignant est présent et veille à l'organisation didactique de ce contenu.

Si le contenu est choisi, comme on l'a suggéré dans le sous-titre, ce n'est pas pour autant le sujet qui est à l'origine de ce choix. Lorsque ce choix s'opère en son absence, on risque en effet une démotivation du sujet préjudiciable à l'interaction que l'on pourrait attendre de l'enseignement d'un objet participant à la communication.

Notes
99.

GOUGENHEIM, Georges (1958), Dictionnaire fondamental de la langue française, Didier, Paris, édition de 1972, 283 pages.

100.

COSTE, Daniel, COURTILLON, Janine, FERENCZI, Victor, MARTINS-BALTAR, Michel, PAPO, Eliane et ROULET, Eddy (1976), Un Niveau Seuil, Conseil de l'Europe/Hatier, Projet Langues Vivantes, 662 pages ; Cf. également PORCHER, Louis, HUART, Michèle, MARLET, François (1979), Adaptation de "Un Niveau Seuil" pour des contextes scolaires, Conseil de l'Europe/Hatier, Projet Langues Vivantes, 648 pages.

101.

Il faut bien sûr procéder à un "toilettage" profond de la liste des verbes irréguliers proposée par BESCHERELLE (1966) qui propose comme modèles de conjugaison des verbes comme assiéger, assaillir, ouïr, gésir, mouvoir, seoir, messeoir, choir, échoir, déchoir, traire, paître, clore, coudre, moudre, confire, qui ne font pas partie de cette liste, mais qui sont toujours considérés, en tant que modèles de conjugaison, comme des verbes à connaître...