3.3. Le modèle stratificationnel

La théorie stratificationnelle est très proche de la théorie générative-transformationnelle. Puisqu'elle prend en compte l'articulation aussi bien que l'audition, elle est une grammaire de l'encodeur et du décodeur qui définit le langage comme un code qui met en relation les corrélations phoniques et les corrélations conceptuelles. Pourtant, à l'opposition compétence/performance, on ajoute une nouvelle distinction: dans cette théorie, la performance s'articule en performance idéale qui contient le modèle de compétence et les conventions nécessaires à son activation et la performance actuelle qui ajoute au modèle de la performance idéale des informations sur le comportement linguistique déviant et, dans la mesure du possible, sur les limitations extralinguistiques. Se proposant de découvrir les opérations mentales qui président à l'acte de parole, la stratificationnalisme se veut une théorie linguistique cognitive.

Le langage est structuré en couches dont chacune est un stratum auquel on assigne une tactique correspondant à la syntaxe traditionnelle mais qui caractérise chaque stratum. On en distingue essentiellement quatre: sémémique, lexémique, morphémique et phonémique, ayant chacun ses unités spécifiques ainsi qu'une tactique spécifique: sémotactique, lexotactique, morphotactique et phonotactique. Aux règles de la grammaire générative-transformationnelle succèdent des impulsions qui traversent le treillis des relations linguistiques.

En introduisant la distinction entre performance idéale et performance actuelle, le modèle stratificationnel est utile à l'analyse des énoncés déviants, ainsi qu'à l'analyse des erreurs. En outre, l'encodage et le décodage ont lieu dans un temps réel, la génération du discours se trouve sous le contrôle du contenu sémantique.

On conclura de ces quelques remarques préliminaires que l'attention des enseignants s'est longtemps portée surtout sur la phrase en tant qu'unité qui se suffit à elle-même, pour en mettre en évidence les propriétés formelles. Il a ainsi été longtemps difficile d'utiliser la langue en situation d'enseignement dans des conditions normales. Le recours à la combinaison des phrases, c'est-à-dire au texte, et leur utilisation dans une situation donnée, à savoir le discours, permettent de souligner l'importance de la fonction référentielle qui permet à un signe linguistique de désigner des êtres ou des objets, voire des phénomènes de l'univers extralinguistique. Cette dimension, appelée référence, permet d'atteindre l'objectif essentiel de l'enseignement des langues étrangères, la compétence de communication. C'est grâce à ce concept de référence que l'analyse contrastive a pu développer des stratégies d'investigation de son objet.