5.4.2. Transfert et interférence

Une autre source d'erreurs vient de ce que l'apprenant d'une langue étrangère essaie de trouver un équilibre entre les moyens dont il dispose dans L2 et ses intentions de communication. Il cherche ainsi des points d'ancrage qu'il trouve soit dans le système de L1 soit dans les connaissances qu'il a de L2. Il recourt alors à des extensions analogiques qui peuvent se révéler abusives et qui donnent ainsi des erreurs qu'on appelle interférentielles si elles proviennent du système de L1 ou internes s'il a utilisé les données acquises dans L2.

La langue source exerce en effet sur l'acquisition de la langue cible une double influence, à la fois positive et négative. C'est grâce à la connaissance de sa propre langue qu'un individu peut apprendre une langue étrangère, mais cette langue maternelle est aussi un facteur de ralentissement de l'acquisition de la langue cible. DEBYSER appelle ‘"transfert l'effet positif d'un apprentissage sur un autre et interférence l'effet négatif"173 ’. L'interférence peut être psychologique, et est alors considérée comme une contamination de comportement, mais elle peut être aussi linguistique, parce qu'elle caractérise un accident de bilinguisme ou pédagogique si elle représente un cas particulier d'erreur. Elle est fonction de différences régulières qui séparent les deux langues en contact, favorisée par des ressemblances quant au contenu ou à l'expression.

La présence des interférences montre que l'apprenant fait des rapprochements, même s'ils se révèlent abusifs, à cause d'équivalences sémantiques et de ressemblances formelles entre les deux langues. Les interférences peuvent aussi affecter des constituants d'étendue différente allant de l'unité constitutive non significative et du mot jusqu'à la phrase dans son ensemble. Elles peuvent en outre affecter aussi bien la réception que l'émission.

L'erreur interne est surtout visible dans les paradigmes de conjugaison verbale. L'apprenant tente de régulariser selon un nouveau système interne des formes aberrantes en les ramenant à des formes statistiquement plus fréquentes.

Toutes ces analogies sont fondées sur la puissance inductive des formes de haute fréquence d'une part et des formes antérieurement acquises d'autre part. L'enseignant devra faire face à ces productions d'erreurs par l'élaboration d'une stratégie d'enseignement des formants aberrants.

Notes
173.

DEBYSER, Francis (1970), "La linguistique contrastive et les interférences", in: Langue française, 8, pages 31 à 61.