5.3.3. Représentations culturelles et pédagogie

La décentration négociée que nous avons mentionnée plus haut ne peut se produire si enseignant et enseignés ne vivent ensemble dans un climat de confiance et de compréhension mutuelles. Seul l'enseignant se trouve en mesure de créer ce climat à l'intérieur de ses interventions didactiques.

Il lui incombe donc de définir une méthode lui permettant à la fois d'effectuer une analyse des représentations et des stéréotypes véhiculés par la culture - homogène ou hétérogène - des apprenants et de présenter une analyse objective des connaissances indispensables à l'élucidation de la culture cible. Une approche contrastive des deux cultures en présence permet de développer un mode opératoire susceptible de répondre à ces deux attentes concomitantes. Le dialogue sous la forme d'entretien ou de débat menés en début de formation permet une analyse des représentations et des stéréotypes présents chez les apprenants concernant à la fois la culture source et la culture cible. Il devient alors possible à l'enseignant d'orienter la progression didactique en fonction des problèmes soulevés.

On a vu qu'apprendre une langue étrangère consistait également à apprendre la culture étrangère, que langue et culture étaient indissociables. Enseigner une langue, c'est permettre à l'apprenant d'approcher l'altérité, d'appréhender la différence afin de la tolérer, voire de la comprendre.

L'enseignant accepte d'être un médiateur d'une altérité qu'il connaît parce qu'il l'a déjà analysée en se défendant le recours au relativisme culturel.

Cette démarche lui reste cependant personnelle, et, dans un souci d'autonomisation de l'apprenant, elle exige de sa part une diffusion de sa méthode auprès de l'apprenant.

Pour conclure ce chapitre, on peut dire que le processus contrastivant est effectivement susceptible de proposer aux pédagogues des applications pédagogiques intéressantes. Il est certes nécessaire de compléter cette ébauche concernant les différents domaines visés ci-dessus, phonologie, morphologie, lexicologie, syntaxe et culture.

Il serait aussi important de poursuivre le travail de Malblanc pour approfondir une stylistique comparative dont la théorie de la traduction a un impérieux besoin. Une pragmatique contrastive aurait également pour tâche de décrire les comportements verbaux pertinents comme les différentes formes de salutation métalinguistiques en français et en allemand (formules de politesse, comportements gestuels, etc.)

Un tel élargissement du champ d'intervention de la contrastivité ne peut toutefois, aussi logique qu'il puisse paraître, surtout d'un point de vue pragmatique, se passer de la résolution de toute une série de problèmes concernant à la fois la théorisation et la modélisation d'une approche contrastive. Ces contrastes sémantiques non superficiels rendent nécessaire une réflexion supplémentaire sur les fondements théoriques de cette contrastivité comme nous avons pu tenter de le faire dans ce travail.