III - 2 : Une approche analogique de l’espace urbain

Sur un autre plan, non physique mais ici culturel et social, l’individu attribue à un lieu des significations du fait de ‘“ ses coordonnées qui relèvent de certaines orientations’ ”, ses limites culturelles, historiques ou symboliques par exemple, ses valeurs et ‘“ les propriétés symboliques et/ou fonctionnelles ”’ (Bailly, 1992, p. 379). Ce symbolisme n’est donc pas uniquement lié à la perception du monde matériel mais aussi aux gens qui fréquentent les lieux, à leur passé, et aux préjugés sociaux par exemple. Il résulte du caractère relationnel de la représentation et de la variété des expériences spatiales individuelles (Bailly, 1985). En effet, la ville ne peut pas se résumer à un ensemble physique de monuments, de volumes mais est aussi constituée de la somme des expériences : ‘“ La ville est un vécu ”’ (Ledrut, 1973, p. 58).

Au niveau symbolique des représentations, deux dimensions peuvent être identifiées (Ledrut, 1973). La première est la dimension du moi qui fait référence à une affectivité liée à un lieu (lieu de naissance, de travail, d’études, lieux passés ou présents par exemple). Elle comporte donc des notions d’enracinement, par référence au passé, ou d’appartenance. La seconde est la dimension de valeur positive ou négative que l’individu attribue à un endroit. Dans le discours sur l’espace de l’individu, les qualificatifs employés sont nettement caractéristiques de l’importance de ces deux concepts. En ce qui concerne la dimension du moi, ce sont des termes comme “mon enfance” ; pour l’autre dimension, des mots comme “agréable” ou “bien-être”, qui sont révélateurs de toute la subjectivité dont peut être chargé un lieu. Le discours va être alors structuré en un certain nombre de catégories, regroupant des pôles opposés (Roy, 1989). La combinaison des deux référentiels, égocentré et exocentré (dans ce dernier, les coordonnées sont fonction de codes externes et de symboles liés à la société, et donc indépendants de la position de l’individu qui devient un objet parmi les autres) expliquerait les variations de cette image. En outre, la variabilité des discours s’explique aussi par la formation même de la représentation spatiale ‘“ à la fois issue de la mémoire à long terme (représentation abstraite) et de l’expérience directe des sens (image perpétuelle). Les images sont donc des représentations utilisant des informations conceptuelles et perceptives, qui peuvent exister sans la présence physique d’objets ” ’(Bailly, 1985, p. 199). Révélés dans les discours, ces contrastes permettent de discerner des espaces vécus et leurs structurations.