Des parcours migratoires particuliers dans les entretiens

De par leur nature même et la faible taille de l’échantillon, nous avons choisi de sélectionner précisément la population enquêtée au cours des entretiens, afin de pouvoir mettre en évidence l’influence des parcours migratoires. Nous avons donc travaillé auprès d’individus appartenant à des catégories homogènes en termes de genre et de position dans le ménage (fortement liée à l’âge par ailleurs). Il s’agit de 60 hommes, tous chefs de ménage. Nous avons choisi des hommes parce que ce sont eux qui migrent le plus, et le plus loin, ainsi que nous le verrons ultérieurement. De plus, les chefs de ménage sont principalement des actifs, ayant en charge parfois une famille. Interroger un autre membre du ménage aurait conduit à une disparité des situations de dépendance et de rôles sociaux (les cousins hébergés ne sont pas considérés comme les enfants, ni comme de simples amis par exemple) qui aurait sans doute rendu moins lisibles les résultats. Ce choix s’est effectué aussi en relation avec l’enquête-ménages dans laquelle nous avions pu seulement recueillir les parcours migratoires des chefs de ménage et de leurs épouses (voir paragraphe suivant).

De plus, toujours à cause de la taille de cet échantillon, nous nous devions de sélectionner des parcours migratoires singuliers. Dans le cas contraire, la multiplicité des situations et des histoires individuelles quant à ces itinéraires ne nous aurait pas permis d’en faire un traitement agrégé. De fait, nous avons opté pour trois types d’individus : ceux qui sont nés à Niamey et n’ont pas migré en Occident (les Niaméens), ceux qui sont nés au village, y ont été élevés, sont venus s’installer en ville sans avoir migré en Occident et n’en sont pas encore reparti (les villageois) et enfin ceux qui, quel que soit leur lieu de naissance, ont effectué un séjour en Occident de plus de 6 mois (les migrants en Occident). Les individus se répartissent de la façon suivante : 13 Niaméens, 17 villageois et 30 migrants en Occident.

Les entretiens se sont déroulés en deux temps. Quarante-quatre entretiens ont tout d’abord été réalisés au cours des mois de juin et juillet 1996 lors d’une première mission. Une seconde série de seize entretiens s’est déroulée au moins de décembre 1996. Un questionnaire spécifique à chaque parcours a été utilisé, les guides d’entretien peuvent être consultés en annexe 1 et 2.

Chacun des entretiens a duré en moyenne une heure et demi. La plupart des entretiens (les deux tiers) se sont effectués en français. Lorsque cela n’a pas été possible, j’ai été assistée par une étudiante nigérienne (Bibata DILLE) qui m’a servi d’interprète en djerma et en haoussa. Les contacts ont été établis principalement d’ailleurs grâce à son aide, ainsi qu’à celle des enquêteurs et des superviseurs de l’enquête-ménages. Les entretiens ont été aussi souvent que possible enregistrés, les retranscriptions qui en ont été faites sont fidèles aux réponses des enquêtés : le français peut donc paraître maladroit dans certaines citations, il ne faut cependant pas oublier que cette langue n’est jamais la langue maternelle des individus et que, culturellement, la langue parlée, même si c’est le français, ne correspond pas au français “ métropolitain ”, peu de citadins ayant été à l’école et sachant lire le français.