I - Typologie des quartiers de la ville

Effectuer une typologie des quartiers de Niamey constituait une étape incontournable de la préparation de l’enquête-ménages si nous voulions ‘“ assurer une représentation la plus fidèle possible des populations vivants dans les différents quartiers de l’aire urbanisée ”’ (Diaz Olvera et alii [1], 1999).

Cette typologie se base sur les travaux de Jambes sur la ville de Niamey (par exemple, Jambes, 1996), sur l’analyse historique ci-dessus ainsi que sur les données du recensement de la population de 1988. Elle a été confirmée par les résultats de l’enquête-ménages qui ont permis de compléter la description de ces zones. Elle est constituée de cinq groupes de quartiers, identifiés par leur position géographique, l’ancienneté de l’urbanisation, la composition sociale et les caractéristiques de l’habitat (carte 2-6 et tableau 2-2).

Centraux Péricentraux
populaires anciens
Riches Périphériques
lotis
Périphériques
lointains et spontanés
 25 % de la population  25 % de la population  10 % de la population  20 % de la population  20 % de la population
         
6 zones enquêtées 7 zones enquêtées 3 zones enquêtées 7 zones enquêtées 6 zones enquêtées
         
Abidjan Bandabari Cité Fayçal Bagdad Aéroport
Balafon Boukoki 1 Ecoles Banifandou Banga Bana
Banizoumbou Boukoki 2 Issa Béri** Cimetière Yantala Foulani Kouara
Cimetière musulman Boukoki 3 Plateau 1 Cité Caisse Gaweye
Deizeibon Boukoki 4 Plateau 2** Couronne Nord Goudel
Grand Marché Château 9 Poudrière Dan Gao Karadjé
Kalley Gamkallé Golleye Radio Dar Es Salam Kirkissoye
Kalley Amirou Gamkallé Sebangeye Terminus Djidah Lamordé
Kalley Est Gounty Yéna Yantala Bas Garba Do Saga
Kalley Nord Madina   Kouara Kano Tondibia
Kalley Sud Talladjé***   Lazaret  
Lacouroussou Yantala haut   Nogaré  
Lycée Kassaï     Route Filingué  
Maisons Economiques     Yantala  
Maourey        
Nouveau marché        
Petit Marché        
Sabongari        
Zongo        

* Les quartiers d’enquête sont indiqués en caractères gras

** Une seule zone d’enquête, à cheval sur Issa Béri et Plateau 2

*** Comprend 2 zones d’enquête

Les quartiers centraux de Niamey sont des quartiers denses bien desservis. Ils abritent une population installée depuis longtemps et dans l’ensemble assez défavorisée et regroupent environ le quart de la population. Ce sont en partie les vieux quartiers du centre, assortis du Petit Marché et du Grand Marché construits ultérieurement, ainsi que leur extension Est (Nouveau marché, Sabongari). Ils regroupent des activités administratives (mairie, ministères, commissariat central, services publics), commerciales (marchés, boutiques, banques) et de loisirs (cinéma, café ou boîtes). Il existe d’autres marchés en ville mais ils n’ont pas l’ampleur du Grand et du Petit Marché. La multiplicité de ces fonctions permet bien d’attribuer à cette zone le nom de centre. Il faut noter aussi que c’est dans le centre et notamment à Lacouroussou que se trouve une grande partie des prostituées de la ville (Tiekoura, 1997).

Les quartiers péricentraux populaires anciens sont tout aussi denses et populaires. Ils sont plus ou moins éloignés du centre (comme Talladjé) et généralement lotis (à l’exception du quartier très populeux de Gamkallé) et situés à proximité de voies bitumées. Un quart environ de la population y vit. Ce sont les quartiers de la première extension “ indigène ” de Niamey. Boukoki et Talladjé ont été créés par des Niaméens au début de l’accroissement de la ville ; Gamkallé et Yantala sont d’anciens villages rejoints avant les années 50 par l’extension urbaine.

Les quartiers riches sont peu denses et ne regroupent qu’un habitant sur dix environ. Si la plupart de leurs résidents est assez ou très aisée, ces quartiers ne sont pas homogènes : Plateau 1 compte, à côté de villas à l’européenne, des poches d’habitats précaires ; à Poudrière, la Cité Fayçal est plus favorisée que les zones situées au Nord. Ils sont composés en grande partie à la fois des anciens quartiers blancs et des nouveaux lotissements pour fonctionnaires. On peut aussi trouver au bord du fleuve les zones regroupant des ministères (Ministère des Affaires Etrangères ou de la Santé Publique par exemple), le palais présidentiel et des ambassades, faisant des quartiers riches un pôle administratif certain.

Les quartiers périphériques proches lotis constituent un regroupement assez peu homogène, même si leurs points communs sont peut-être la faible densité de population, leur situation géographique en première couronne périphérique, leur création récente et non étatique (les autorités ont loti mais non construit). Ils sont donc desservis ou proches d’une voie goudronnée. Les populations sont assez différentes d’un quartier à l’autre. Cité Caisse accueille des fonctionnaires plutôt aisés, tout comme Dar Es Salam. Kouara Kano est lui-même un quartier favorisé et de lotissement récent, alors que Yantala, Banifandou, Couronne Nord ou encore Route Filingué, paraissent beaucoup plus hétérogènes, juxtaposant habitat loti et non loti, classes moyennes et pauvres. Du fait de leur développement récent mais rapide, il est difficile d’évaluer exactement leur population, aux environs d’un cinquième à un quart de la zone urbaine.

Les quartiers périphériques lointains, d’habitat spontané cumulent les désavantages du point de vue des conditions de déplacements d’être à la fois les plus éloignés du centre-ville, les plus pauvres et les moins accessibles. Lamordé et Kirkissoye, en particulier, semblent être très enclavés et, même si les autres quartiers de ce groupe sont situés le long de routes bitumées et desservis par les transports collectifs, dans l’ensemble, les véhicules à quatre roues y pénètrent difficilement du fait de l’étroitesse des voies (Goudel côté fleuve, Saga...), ce qui génère de longs trajets terminaux à pied. De densité moyenne ou faible, ce sont généralement d’anciens villages intégrés progressivement à la ville (Goudel, Saga, Lamordé), ou d’anciens campements peuls qui se sont progressivement élargis à d’autres groupes de population (Foulani Kouara, Kirkissoye). Ils gardent donc un caractère rural ou semi-urbain, même si le quartier Gaweye comporte des zones loties (la partie la plus proche de Pont Kennedy). Là encore, ce groupe de quartiers connaît un développement démographique certain, et représente, peut-être, un cinquième de la population de Niamey.

En termes de hiérarchie socio-économique, le groupe des quartiers riches est bien évidemment le plus favorisé, même si l’on trouve dans la périphérie proche lotie des quartiers aisés qui se sont développés. Les quartiers du centre et du péricentre populaire ancien sont plus pauvres dans l’ensemble, mais moins que la périphérie lointaine à habitat spontané.

Cette typologie sera celle utilisée toute au long de cette présentation. Elle a quelques désavantages comme, par exemple, celui de ne pas différencier les anciens villages rejoints par l'urbanisation des nouvelles périphéries lointaines pauvres et de les regrouper sous le terme “ périphérie lointaine, habitat spontané ”. Mais associant de nombreuses caractéristiques à la fois géographiques et socio-économiques, elle permet une analyse cohérente des répartitions spatiales des populations étudiées dans l’enquête-ménages et dans les entretiens.