III - Avoir une activité, sortir de son quartier

Pour les femmes comme pour les hommes, être actif ou non modifie fondamentalement la mobilité quotidienne en semaine. Par exemple, si 10 % des actives seulement ne se sont pas déplacées la veille de l’enquête, c’est le cas d’un quart des inactives. Les actifs se déplacent en effet plus et utilisent plus fréquemment les modes motorisés que les inactifs (tableau 4-6).

  Mobilité urbaine quotidienne (depl/jour/ind.) Mobilité motorisée (depl/jour/ind.) Part de la mobilité motorisée sur mob. totale (en %)
Inactives 2,4 0,5 21
Actives 3,6 1,6 44
       
Inactifs 5,1 1,2 24
Actifs 5,8 2,9 50

Ainsi, si 80 % des inactifs hommes ou femmes se déplacent à pied, un quart des actifs utilise la voiture (voir l’exemple des modes utilisés par les femmes sur le graphe 4-15).

Note : Il s’agit ici des modes de transport utilisés pour les déplacements de la veille en semaine.

Pour les femmes, cet accès plus grand aux modes de transports mécanisés pour les actives s’explique non seulement par leur propre richesse mais aussi par le fait qu’elles appartiennent à des ménages plus aisés.

Ce déterminant a aussi une influence sur la répartition horaire des déplacements : les actifs se déplacent plus en heures de pointe que les autres qui préfèrent les heures creuses du matin (8h45-11h45). Cette observation est surtout vraie pour les femmes qui ont en charge les achats pour les repas.

De façon identique, les motifs de déplacements différent : si la moitié des actives et 38 % des actifs se déplacent pour leur travail, la moitié des actives et 62 % des inactives sortent pour des activités liées à la vie quotidienne (les achats pour les femmes, la religion pour les hommes comme nous l’avons déjà indiqué). En conséquence, la localisation de ces sorties est plutôt interne au quartier pour les inactifs et externe à celui-ci pour les actifs.

En semaine les déplacements radiaux concernent, pour les actifs comme pour les inactifs, environ 15 % des déplacements quotidiens. La fréquentation du centre-ville ne dépend pas en elle-même de l’activité, ce sont seulement les raisons qui varient. En effet, les inactifs hommes et femmes y vont pour leurs loisirs et/ou leurs achats. Leur type de fréquentation est plutôt relationnel. En revanche, les actifs y ajoutent une dimension professionnelle liée aux différentes fonctions du centre-ville (graphe 4-16). Il faut aussi noter que, du fait que les femmes actives travaillent plus dans leur quartier d’habitation, leur fréquentation du centre-ville reste globalement motivée par la sociabilité et les achats.

En conclusion, les actifs sont des individus amenés à fréquenter généralement d’autres quartiers que leur quartier d’habitation. Ils circulent en ville, marchent peu à pied. Ils sont alors moins attachés à la qualité de vie de leur environnement, et, pour les hommes, aux relations de proximité. L’activité professionnelle conduit ainsi à une représentation de type “ urbaine ”, plus centrée sur la concession que sur le quartier. Leur volonté d’ascension sociale passe par un habitat valorisé et par un meilleur statut social est nettement affirmée.

Les déplacements des inactifs, hommes et femmes, se déroulent plus dans leur quartier ; ils donnent de ce fait plus d’importance aux services de proximité et le quartier présente alors relativement plus les caractéristiques d’un village d’où l’on sort peu. Le quartier d’habitation est familier et les inactifs lui attachent une valeur non liée à sa situation dans l’ensemble de l’espace urbain. Peu importe presque le quartier, tant que l’on peut y trouver un environnement sécurisant.

Mais nous avons pu observer dans la présentation ci-dessus que les femmes actives ont exprimé des attentes moins urbaines, plus liées à la qualité de leur quartier que les hommes actifs. Ceci est dû en grande partie au type d’activité : une majorité des femmes exerce des métiers d’appoint à faibles rémunérations dans leur quartier, ce qui les différencie peu des femmes inactives. De plus, une femme appartenant à un ménage aisé, même inactive, a accès à des modes de transport, à des quartiers non similaires à ceux des femmes appartenant à des ménages pauvres. C’est pour préciser ces implications qu’il nous faut maintenant présenter l’influence de la richesse de l’individu et de la richesse du ménage sur les représentations et pratiques spatiales.