II - Richesse individuelle et imaginaire spatial

‘“ Dans la ville, faire ou non partie des élites opère d’intenses partages et l’imaginaire lui-même obéit évidemment à ces ruptures entre groupes sociaux ”’ (Farge, 1995, p. 89-90). Les représentations spatiales reflètent particulièrement la hiérarchie sociale de Niamey.

Tout d’abord, en ce qui concerne la qualification des quartiers de la ville, les femmes modestes renforcent celle des zones identifiées : elles leur donnent un caractère plus prononcé que les femmes pauvres et leurs réponses sont moins dispersées. Le zonage est encore plus marqué pour elles : par exemple les quartiers de la zone animée, plus le jour que la nuit, sont cités plus systématiquement en réponse aux questions : ‘“ Quels sont les quartiers animés le jour ? ” ou “ Quels sont les quartiers animés la nuit ? ”’. De plus, la zone animée la nuit a des qualités diverses chez les femmes pauvres (elle peut être riche ou pauvre par exemple) alors qu’elle est plus caricaturée comme telle chez les femmes modestes (tableau 4-8). Enfin, les femmes à revenus modestes citent en moyenne plus de quartiers par question. Nous pouvons en conclure qu’elles ont une représentation plus globale de la ville, basée plus généralement sur des critères socio-économiques qui définissent l’espace urbain : les lieux et les quartiers sont clairement identifiés grâce à des caractéristiques liées à la richesse, à l’animation et aux modes de vie.

  Riche Pauvre Dangereuse Animée le jour Animée la nuit Villageoise Total
Zone animée le jour              
- femmes pauvres 4 4 3 59 29 1 100
- femmes modestes 2 3 1 64 31 0 100
Zone animée la nuit              
- femmes pauvres 22 21 7 20 25 5 100
- femmes modestes 10 15 11 22 34 8 100
Zone dangereuse              
- femmes pauvres 0 4 93 0 0 3 100
- femmes modestes 0 0 100 0 0 0 100
Zone dangereuse et pauvre              
- Femmes pauvres 12 24 34 10 8 11 100
- Femmes modestes 8 37 30 8 6 10 100
Zone villageoise et pauvre              
- femmes pauvres 2 35 8 4 4 47 100
- Femmes modestes 0 42 12 3 3 41 100
Zone riche              
- femmes pauvres 94 1 2 2 1 1 100
- femmes modestes 92 0 2 3 2 1 100
Note : Les chiffres représentent la répartition, pour chaque groupe d’individus, du nombre total de réponses appartenant à la zone (par exemple, les femmes pauvres ont cité 725 fois un quartier de la zone animée le jour, 59 % des ces réponses l’étaient à la question de l’animation de jour, et 29 % à la question sur l’animation de nuit). En gras, on indique les pourcentages relatifs aux qualités de la zone concernée.

Pour les hommes, ces différences sont nettement moins fortes car la pauvreté n’est pas synonyme d’inactivité, ce qui est moins le cas des femmes (graphe 4-18). Les pauvres peuvent également se déplacer en ville et y développer de nombreux contacts, se rendre compte des écarts effectifs entre les quartiers. Cependant, les tendances observées chez les femmes restent vérifiées pour les hommes.