I - 4 : Les voies et carrefours

De nombreuses cartes comportent des routes et des carrefours qui les quadrillent de façon partielle ou totale. Quatre des vingt cartes ne comportent pratiquement aucune de ces données, les rues et les carrefours apparaissant alors plus comme des indications supplémentaires que des éléments de première importance structurant la ville.

Dans le cas des cartes de la ville, il s’agit le plus souvent de routes goudronnées et de carrefours du centre-ville. Les enquêtés ne connaissent pas les noms de ces voies mais ceux des carrefours sont clairement identifiés. Ainsi, les rues identifiées sont en premier lieu le boulevard qui mène à l’aéroport, officiellement appelé Boulevard du Quinze Avril. Aucun individu n’indique ce nom mais quatre enquêtés le signalent clairement en l’indiquant par une flèche et le nom “ aéroport ”. Les autres voies goudronnées sont indiquées généralement en fonction des quartiers ou des repères qu’elles traversent ou vers lesquelles elles se dirigent. C’est le cas par exemple du Boulevard de l’Indépendance, appelé “ Boulevard du Stade G. S. Kountché ” ou simplement indiqué par une voie fléchée vers Boukoki, ou du Boulevard du Gourma noté “vers Burkina Faso ”. Un seul individu a indiqué un nom officiel de rue : il s’agit de l’avenue de l’O.U.A. Enfin, malgré l’existence de plusieurs voies goudronnées sur la rive droite du fleuve, elles ne sont pratiquement jamais indiquées (elles le sont uniquement deux fois sur toutes les cartes de Niamey).

Cette connaissance plutôt pratique du réseau de voirie urbaine n’est pas totalement vérifiée en ce qui concerne les carrefours. Certains sont bien nommés en fonction des bâtiments qui les entourent, tels le rond-point du Ministère de l’Environnement ou le rond-point Sixième appelé ainsi en raison du Camp Garba Hassane ou Camp Sixième qui le borde. Mais la plupart ont attribué aux carrefours des noms similaires à ceux trouvés sur une carte officielle : il s’agit du rond-point Maourey, du rond-point Kennedy (ancien nom de la place des Martyrs) ou du rond-point Liberté. Malgré sa place centrale, le Grand Marché n’a été identifié en tant que carrefour qu’une seule fois. Il reste que, globalement, de tels renseignements restent rares, seules 4 cartes de la ville faisant figurer des noms de carrefours.

En ce qui concerne les cartes des quartiers, étant donné la structure de ces derniers et la voirie complexe qui les quadrille, les dénominations des rues et des carrefours sont encore plus rares que précédemment. Lorsqu’elles apparaissent, elles sont du même type que pour les cartes de la ville. Nous pouvons trouver “ Boulevard Aéroport ”, “ vers ex-président ”, par exemple. Une carte indique aussi spécifiquement la route de desserte de l’autobus dans son quartier. Seuls trois ronds-points sont clairement nommés, deux possédant des noms officialisés (la place Toumo et le rond-point Liberté) tandis que le troisième est appelé rond-point Route Filingué, nom du quartier près duquel il se trouve. Cependant, ces cartes font apparaître plus de rues et de carrefours que celles de la ville, même s’ils ne sont pas nommés, puisque seule une carte ne possède pas de telles indications. Nous pouvons ici remarquer qu’elles peuvent ou non appartenir au quartier lui-même. Elles servent donc à la fois de structures internes et de limites, mais n’ont pas du tout le même rôle que pour les cartes de la ville, comme nous le verrons plus loin.

L’importance de la voirie, en termes de rues, de carrefours, ou, au contraire, son absence, est l’aboutissement de processus différenciés d’élaboration des cartes mentales. Elle comporte en effet un ensemble d’indications essentielles quant à la manière dont l’individu tente de reconstruire un schéma cohérent de l’espace dessiné. C’est donc elle qui nous a guidés dans l’identification des types de cartes mentales, tant au niveau de celles de la ville que de celles des quartiers d’habitation.