La démarche pédagogique est complexe et difficile à mener.

Les démarches pédagogiques oscillent entre deux orientations opposées. D’une part, un suivi des élèves en apprentissage avec l’utilisation des outils didactiques élaborés dans les autres activités physiques et sportives. D’autre part, un accompagnement qui incite les danseurs scolaires à la recherche et à la création par l’emploi connue de l’improvisation, et qui encourage l’investissement personnel de chacun, seuls gages de la réussite de cet enseignement.

Les enseignants se questionnent alors sur l’aide qu’ils peuvent apporter. Ils se sentent en difficulté lorsqu’il s’agit d’être à l’écoute des élèves alors qu’ils sont dans l’incapacité d’anticiper les réponses des élèves. (voir annexe 5 Partie III).

Comment faire face à l’imprévu disent-ils ? Cette question est d’autant plus lancinante que le rôle de l’enseignant apparaît comme essentiel dans cette activité. Il est d’ailleurs multiforme : incitateur et meneur dans l’engagement du jeu corporel, respectueux des réponses et attentif aux élèves et à leur corps en mouvement, et aussi, évaluateur comme tout enseignant qui se respecte ! Les enseignants reflètent bien les exigences institutionnelles concernant les apprentissages à mener et à évaluer dans le cadre de l’EPS.

Le graphique sur l’intelligibilité laisse apparaître une part importante donnée à la catégorie cinq (couleur grise). Les questions de la prise en charge par les élèves de leur activité semble essentielle. Les intentions (catégorie un) pour agir restent incontournables. Les connaissances (catégorie deux) sont faibles, tout comme la pensée en image catégorie quatre).

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Graphique 24 : Intelligibilité E

Le graphique montre une assez grande homogénéité dans la répartition du discours dans les différentes catégories. Les âges des enseignants ne sont pas n’ont plus un indicateur diversité dans les réponses.

‘Les enseignants E sont des modèles singuliers concernant la sensibilité et la sociabilité qui sont les maillons faibles en général.’

La correspondance musique/mouvement est perçue différemment.

La relation à la musique semble importante pour trois enseignants. Les trois autres ne la mentionnent pas comme un élément déterminant.

La construction des regards sur les expressions dansées est questionnée diversement.

Lire ce que font les élèves demande des compétences et des connaissances culturelles pour établir un code, des critères communs à partir des productions des élèves. Une enseignante relève cette difficulté.

Rechercher de meilleurs d’outils d’évaluation et se donner des repères de travail, des critères et un cadre pas trop rigide pour permettre la liberté d’expression de chacun, motivent la réflexion de deux autres enseignants.

Etre capable de visualiser le produit fini est une difficulté.

Ces remarques mettent à l’évidence des regards d’enseignants différents sur les réalisations des élèves. Ils témoignent d’une mise en jeu culturelle différente. La volonté de ne pas mettre en avant de modèle préétabli, provoque la confusion dans l’exercice des regards sur l’activité expressive. Les regards sur les pratiques éducatives ne croisent pas toujours ceux des pratiques culturelles artistiques. Ils ont tendance plutôt à s’exclure.

‘Les modèles des enseignants sont influencés par les textes officiels de 1967 et 1985 qu’ils complètent par leurs expériences pédagogiques.’

Globalement, nous observons la durabilité du modèle de 1967 quant aux valeurs, auquel s’est ajoutée une intelligibilité accrue : un bon mixage 1967, 1985.

Le rapport à la musique a cependant évolué, puisqu’il devient peu important, pour beaucoup d’enseignants, excepté pour ceux qui sont nouvellement formés (année 1989, 1993). La rythmique n’existe plus !

La forte tendance des enseignants à privilégier l’activité d’expression avec une implication personnelle importante, valorise le modèle des années 1967, 1990. Le refus de toute modélisation, la recherche d’une pratique de danse scolaire, possible pour tous, accordent une grande place à la personne, ses émotions, son imagination. Les APEX159 sont encore très présentes chez ces modèles d’enseignants.

La sensibilité est celle de la modernité, affaire de sensations, de perceptions kinesthésiques, et reflète là encore les années 1970.

La motricité quasiment inexistante est dans la même lignée du modèle appauvri de 1985.

Une seule enseignante parle de mélange des techniques possibles, ou questionne la place possible des techniques à l’école, s’emparant alors de la problématique du modèle des années 1996.

Deux enseignantes évoquent la dimension artistique et esthétique qui est la valeur qui articule le modèle de 1996.

Les démarches de création font une place à la recherche, l’improvisation, la présentation de danse. La notion de spectacle est largement présente tout comme dans le modèle de 1996.

‘Les mots récurrents utilisés mettent en avant le corps et ses émotions, ainsi que les problèmes d’évaluation.’

Le corps est le mot le plus représentatif de la motricité en danse. Vient ensuite le mot enchaînement, terme générique qui conforte l’idée d’expression libre (voir annexe 6 Partie III).

La musique côtoie les notions de mal-être. Si le registre de l’écoute musicale est évoqué, les émotions suscitées par la mise en scène de soi sont importantes. Les enseignants soulignent le caractère éprouvant de l’acte dansant, reprenant ainsi la classification de Bernard JEU : danser est une mise à l’épreuve de soi. Ils expriment aussi comme le souligne LEGENDRE, l’aspect de la souffrance que provoque la mise en image de soi, et que le langage commun reprend par une expression explicite. “On va danser !” signifie passer un mauvais moment !

L’identification des élèves en fonction de leur genre est dominante. Les mots filles et garçons révèlent une différenciation des élèves que les programmes d’enseignement ne font pas. L’histoire de la danse occidentale montre l’empreinte féminine sur l’acte dansant au XIXème siècle, et perdure encore dans les représentations. La danse est une activité féminine pour beaucoup d’élèves, une activité à part de la vie sociale qui n’incite pas une identification spontanée.

L’expression, la création et l’importance accordée au vécu et à l’expérience du mouvement dansé marquent fortement les discours.

Les mots récurrents appartenant à la démarche pédagogique sont l’évaluation, les critères, et entrer dans la danse. Les discours font une large place aux démarches pédagogiques qui nécessitent un besoin de formation, car elles semblent impliquer l’enseignant d’une autre manière que l’ensemble des autres activités physiques.

Du point de vue quantitatif les items sont repris souvent par l’ensemble du groupe des enseignants. Plus d’un mot sur deux est répété. La sensibilité est le pôle le plus riche dans la diversité des expressions.

La danse est une affaire de corps qui implique les élèves dans leur intimité et la construction de l’identité de genre.

La création et l’expression sollicitent une démarche pédagogique adaptée, qui favorise l’engagement dans l’activité. La difficulté est d’intervenir pour faire progresser les élèves sans les normaliser.

Le discours est pauvre et peu abondant, et s’appuie sur les références de l’éducation physique et sportive.

Notes
159.

Activités physiques d’expression (expression corporelle).