ANNEXE 6 Partie II.

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Les programmes de 1967.

LES INSTRUCTIONS OFFICIELLES DE 1967.

‘Quand on fait un mouvement, ce mouvement a un sang tout comme il a une couleur et une peau ... Il existe une structure interne dans la forme des gestes qui produit la forme désirée. Malgré vos conceptions très précises et correctes, il y a en chaque individu une intégration qui n’est qu’à lui, et qui est unique. Il faut lui donner l’occasion de faire se rencontrer son expérience et sa matière. “ Jérôme ANDREWS. ( Conférence 1975.)’

Les instructions officielles de 1967, préparées dans leur contenu par celles de 1962, institutionnalisent les pratiques d’enseignement qui s’exercent depuis le début des années 60. Les pratiques sportives se développent dans les clubs et l’engouement de la jeunesse pour le sport motive les enseignants à l’introduire, presque de façon systématique à l’école, délaissant ainsi les activités gymniques jugées rébarbatives, et ne correspondant plus aux besoins des jeunes que la dégénérescence physique ne guette plus. Le contexte social économique et politique permet de comprendre les nouvelles valeurs que va se donner l’école. La reconstruction d’après guerre produit un élan industriel et économique, renforcé par des nouvelles technologies, et provoque des organisations sociales nouvelles. Les nouvelles concentrations des populations dans les villes, les nouveaux emplois entraînent des mutations sociales qui remettent en cause les anciennes valeurs attachées au monde rural ou au travailleurs manuels. Une nouvelle génération d’employés ne cesse de se développer et constitue une classe moyenne dont les modes de vie et les revendications culturelles changent. La société de consommation et les possibilités de temps libre qu’elle offre incitent à l’individualisme, à la prise en compte du corps qui devient un véritable marché du loisir. Le système capitaliste libéral développe la concurrence, la recherche de profits dans une perspective de progrès. L’accélération des moyens de production entraîne une accélération du temps, et nécessite des adaptations nouvelles au travail qui font éclater les anciennes valeurs d’altruisme et de solidarité. L’individualisme prend le pas sur le collectivisme.

Des vécus corporels contradictoires s’expriment. Les considérations sur le corps comme entité communicante dans un environnement changeant traversent la vie sociale de ces années 60 / 70. Les façons de vivre son corps dans un mode de travail urbanisé évoluent. Nous assistons à une valorisation du corps qui se conjugue avec des conceptions hédonistes et jouissives, recherchant des espaces d’expression dans les moments de loisirs organisés par la société de consommation.

Jean MAISONNNEUVE nomme “‘corporéisme l’ensemble des pratiques et des discours conférant au corps une primauté en investissement et en valeur’”210. Cet auteur analyse comment dans les sociétés qui ont une représentation unitaire de l’homme, les valeurs qu’elles accordent au corps jouent un grand rôle. Il est rejoint dans cette conception par MAFFESOLLI211, qui analyse la post-modernité ainsi. Avec la résurgence de la corporéité, on assiste à un présentéisme fort, au besoin d’éprouver ensemble des émotions, de privilégier l’apparence et la théâtralisation du corps.

La libération des corps, et celle de la sexualité qui l’accompagne sont des facteurs de transformations sociales déterminants pour les femmes. Elles revendiquent l’égalité devant le travail et dans la famille. Elles obtiennent le pouvoir de maîtriser leur maternité et de contrôler leur sexualité. Les événements de 68 cristallisent le rejet des anciennes valeurs et mettent en avant les revendications d’une liberté individuelle.

Le corps, dans cette perspective, est objet d’interrogations quant à sa place, sa fonction, son rôle. Les nouvelles sciences humaines se propagent et incitent à une perception unifiée de la personne. Etre bien dans son corps devient une demande de l’ensemble de la société en même temps qu’une exigence de liberté. La société capitaliste a besoin d’hommes et de femmes adaptables à des postes de travail nouveaux, elle développe les idées de concurrence et de compétitions acharnées. Elle permet l’individualisation des projets de vie et en même temps qu’elle en socialise tous les moments, au travail et pendant le temps libre. Dans cette mouvance sociale, les textes officiels délimitent le nouveau cadre d’une culture scolaire.

Notes
210.

MAISONNEUVE Jean. “Modèles sociaux Modèles esthétiques” in, Le corps en jeu. CNRS éditions. 1993.161 p.

211.

MAFFESOLI. Michel. “Aux creux des apparences”. Plon. Paris. 1990. 127 p.